Lorsque la Commission européenne a autorisé la mise sur le marché d’un aliment génétiquement modifié, la législation européenne sur les OGM, dans son état applicable dans ce litige et telle qu’interprétée par la Cour de justice de l’Union européenne, permet aux États-membres de prendre des mesures conservatoires, notamment pour en interdire provisoirement l’utilisation et la commercialisation. Mais ces mesures conservatoires ne peuvent être prises qu’en cas d’urgence et en présence d’une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l’environnement. Un tel risque doit être constaté sur la base d’éléments nouveaux reposant sur des données scientifiques fiables.
Le maïs MON 810 est une variété de maïs génétiquement modifiée en vue de lui donner une plus grande résistance aux insectes ravageurs. La Commission européenne a autorisé sa mise sur le marché le 22 avril 1998. Le 14 mars 2014, le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt a pris un arrêté pour en interdire la commercialisation, l’utilisation et la culture. L’association générale des producteurs de maïs et d’autres requérants demandaient l’annulation de cet arrêté.
Dans la décision qu’il a rendue aujourd’hui, le Conseil d’État a constaté que les conditions posées par la législation européenne pour prendre une telle mesure d’interdiction totale n’étaient pas remplies. Il a relevé que les avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) avaient certes admis certains risques de développement d’une résistance chez les insectes ou d’atteinte à certaines espèces de lépidoptères, mais que ces mêmes avis concluaient que ces risques pouvaient être maîtrisés et que les études scientifiques ne permettaient pas d’estimer que le maïs MON 810 était plus risqué pour l’environnement que le maïs conventionnel. L’administration n’apportait pas élément réellement nouveau par rapport aux deux décisions identiques précédentes, déjà annulées par le Conseil d’État. En particulier, le juge a estimé que les quatre nouvelles études que le ministre avançait pour justifier son interdiction ne démontraient pas davantage l’existence d’un « risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l’environnement ». Aucun autre élément avancé par l’administration ne permettant de conclure à l’existence d’un tel risque, le Conseil d’État a donc annulé l’arrêté interdisant la commercialisation, l’utilisation et la culture du maïs MON 810.
Communiqué du Conseil d'État (895 hits)