Améliorer les politiques de développement
Objectifs de développement pour le millénaire : la lutte pour les atteindre est loin d'être finie
Il est probable qu'aucune région dans le monde ne parviendra à réaliser l'objectif que s'était fixée la communauté internationale de diminuer d'un tiers le nombre d'enfants qui meurent dans le monde pour l'année 2015.
C'est l'un des constats d'un rapport récent produit conjointement par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, dont le titre est : Rapport mondial sur le suivi, 2004.
Le Rapport mondiale sur le suivi (a) classe les progrès réalisés à ce jour en matière de réalisation des Objectifs de développement pour le millénaire (a), un ensemble d'ensemble d'objectifs que s'est fixé la communauté internationale à l'horizon 2015.
Il y a à peine quatre ans, en 2000, les leaders du monde entier se sont réunis au Sommet du millénaire à New York et se sont réengagés à réaliser une série d'objectifs en matière de santé, d'éducation, de promotion féminine et d'environnement.
Nous sommes aujourd'hui à mi chemin, si l'on sait que ces objectifs avaient en fait déjà été fixés au début des années 90. Le Rapport mondial sur le suivi pose un constat pessimiste sur les perspectives d'atteindre plusieurs de ces objectifs de développement pour le millénaire (ODM).
Pour le président de la Banque mondiale, M. James D. Wolfensohn, le rapport tire la sonnette d'alarme : la plupart des objectifs ne seront pas réalisés dans la plupart des pays à l'horizon 2015.
« Le monde est confronté à deux choix : soit nous, la communauté internationale, nous-nous réengageons à atteindre ces objectifs, ou ces objectifs que nous nous sommes fixés avec fanfare à la face du monde ne seront pas atteints, et les pauvres du monde seront encore moins bien lotis qu'avant et nos enfants auront à faire face aux conséquences de ce désastre, » dit Wolfensohn.
Une seule chance
Le Rapport mondial sur le suivi mesure les progrès réalisés à ce jour et son évaluation est alarmante. Si la tendance actuelle se maintient, un seul des ODM sera réalisé, celui de réduire de moitié le nombre de personnes vivant avec moins d'un dollar EU par jour.
Même pour cet objectif, dit le rapport, des résultats seront mitigés.
Le déclin spectaculaire du nombre de personnes vivant avec moins d'un dollar par jour est dû au succès de deux pays, la Chine et l'Inde, qui ont réussi à maintenir une croissance économique solide.
Mais le rapport ajoute que la situation est loin d'être aussi brillante en Afrique, où les populations pauvres, en particulier celles vivant au Sud du Sahara, n'ont que très peu d'espoir de sortir de la pauvreté et de la déchéance.
Perspectives maussades
Selon le rapport, la mortalité infantile et maternelle et l'accès à l'eau potable et à l'assainissement sont les domaines où les retards sont les plus importants.
Dans quasiment aucune région du monde, ces objectifs ne pourront être atteints à l'horizon 2015. Très peu de progrès ont été réalisés dans la réduction du taux de mortalité infantile. Par exemple, en 1999, environ 10 million d'enfants de moins de cinq ans sont morts dans les pays à faible revenu, dont 2,1 millions rien qu'en Inde.
Malgré sa performance spectaculaire en terme de réduction de la pauvreté de revenu, la Chine aussi accuse du retard en matière de réduction de la mortalité infantile.
Le rapport souligne également les liens entre les différents ODM. Il est très difficile dit le rapport, de réduire la mortalité infantile si à peine 10 pour-cent des ménages pauvres ont accès à une source d'eau améliorée, ce qui est le cas en Ethiopie, par exemple.
Pour atteindre l'objectif de diminuer de moitié la proportion de la population mondiale qui n'a pas accès à l'eau potable à l'horizon 2015, il faudra que 1,5 milliard de personnes dans le monde ait accès à une source d'eau potable améliorée.
De même, environ 2 milliards de personnes supplémentaires dans le monde ont besoin d'un accès à un assainissement sûr, si l'ODM de réduire de moitié la proportion de la population mondiale ayant accès à une hygiène améliorée doit être atteint pour 2015.
Le rapport considère comme insuffisant les progrès réalisés dans la réduction de la mortalité maternelle, et ajoute que les perspectives pour l'avenir sont très moroses.
Il en va de même pour d'autres objectifs comme combattre le VIH/SIDA, le paludisme et d'autres maladies.
Selon le rapport, les maladies transmissibles les plus prévalentes et les plus dévastatrices, comme le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose, se sont avérées difficiles à maîtriser et en diminuer l'incidence représente un immense encore plus difficile à relever.
Les perspectives sont meilleures en éducation que dans le domaine de la santé. Si les tendances actuelles se maintiennent, plusieurs régions atteindront ou se rapprocheront de l'objectif d'une éducation primaire universelle.
Mais, ajoute le rapport, il est à craindre les progrès en Afrique sub-saharienne et peut être en Asie du Sud ainsi qu'au Moyen Orient et en Afrique du Nord resteront insuffisants.
C'est également dans ces trois régions que les retards en matière de genre sont les plus importants.
Il faut une action rapide
M. Zia Qureshi, conseiller principal du Secrétariat du Suivi mondial à la Banque mondiale et auteur principal du rapport, explique qu'il y a deux forces fondamentales qui concourent à la réalisation des ODM.
« La première est d'avoir une croissance économique à la fois solide et soutenable, et la seconde est l'amélioration, l'expansion, l'élargissement de la prestation des services au segment pauvre de la population, » dit-il.
M. Qureshi explique que la conclusion inéluctable est que les pays en développement comme les pays développés doivent élargir l'échelle de leurs actions, de façon considérable et rapidement pour atteindre les ODM.
Pour ce faire, il préconise un programme à trois éléments :
•Accélérer les réformes pour réaliser une croissance économique plus solide, ce qui pour l'Afrique implique de doubler le taux actuel de croissance
•Investir dans les populations pauvres et leurs donner le moyen de prendre leur sort dans leurs propres mains, en élargissant et en améliorant la prestation de services sociaux
•Accélérer la mise en oeuvre du partenariat de Monterrey, en assurant que des efforts de réforme plus importants par les pays en développement entraînent un appui plus important des pays développés et des agences internationales.
Priorités pour les pays en développement
Le rapport encourage les pays en développement à agir dans quatre domaines spécifiques:
1. Améliorer le climat pour le secteur privé
Sur le plan macroéconomique, le principal domaine d'amélioration est celui de la gestion des finances publiques. Le renforcement des droits de propriétés et l'état de droit sont également des domaines essentiels demandant beaucoup plus d'attention.
2. Renforcer le secteur public et améliorer la gouvernance
Selon le rapport, ceci est le défi de loin le plus important à relever par les pays. Les domaines où les retards sont les plus graves sont ceux de la transparence, de l'obligation de rendre compte et de la maîtrise de corruption.
En moyenne, les pays à faible revenu peuvent augmenter leurs recettes fiscales d'au moins un à deux pour-cent du PIB s'ils suppriment les exonérations fiscales et s'ils améliorent leur administration du fisc.
3. Plus d'investissement en infrastructure
Le rapport estime qu'il faut augmenter les dépenses en infrastructure de 3,5 à 5 pour-cent du PIB dans les pays à faible revenu et de 2,5 à 4 pour-cent du PIB dans les pays à revenu intermédiaire.
4. Améliorer l'efficacité de la prestation de service en matière de développement humain
Ceci revient tout simplement à mieux cibler les services d'éducation, de santé et d'assistance sociale sur les segments pauvres de la population, ainsi que d'augmenter la participation des communautés et éliminer tous les obstacles qui s'opposent à la prestation de ces services.
C'est pourquoi le rapport recommande que les projets particulièrement réussis et financés par la Banque comme le Programme d'assistance à l'enseignement secondaire féminin au Bangladesh soit mis à l'échelle.
Priorités pour les pays développés
Le rapport souligne le contraste qui existe entre d'une part l'importance des promesses faites par les pays développés et d'autre part la modestie de leurs actions. Les principaux problèmes que doivent aborder les pays développés sont les suivants :
1. Assurer la stabilité et une croissance solide de l'économie mondiale
Le principal problème ici, dit le rapport, est de pouvoir résoudre de façon ordonnée des déséquilibres des finances publiques et extérieurs, en particulier le déficit important du compte courant des Etats-Unis.
2. Assurer que les discussions de Doha réussissent et débouchent sur des décisions en temps opportun et en faveur du développement.
Le rapport estime que les pays à haut revenu, vu leur importance dans l'économie mondiale, doivent montrer l'exemple.
Une forte croissance résultant d'une issue favorable au développement des discussion de Doha, dit le rapport, pourrait augmenter les revenus réels des pays en développement de 350 milliards de dollars EU pour l'année 2015 (c'est-à-dire environ la totalité du PIB de l'Afrique au Sud du Sahara)
Si ceci était réalisé, dit le rapport, 140 millions de personnes pourraient sortir de la pauvreté à l'horizon 2015.
3. Augmenter l'aide et en améliorer la qualité
Le rapport estime qu'au moins 30 milliards de dollars EU d'aide annuelle supplémentaire pourrait être utilisés efficacement par les pays en développement.
Il recommande qu'une fois que les pays en développement auront amélioré leurs politiques et gouvernance, les montants d'aide additionnelle qui pourraient être utilisés de façon efficace seraient supérieurs à 50 milliards de dollars EU par an, de quoi aider les pays en développement à réaliser leurs ODM.
Tout en saluant l'augmentation récente du volume de l'aide, le rapport s'inquiète qu'une grande partie de cette augmentation soit due à des considérations stratégiques, comme la guerre contre le terrorisme, les conflits et la reconstruction en Afghanistan et en Irak.
Améliorer les politiques de développement
Le rapport souligne que l'augmentation de l'aide et d'autres actions doivent faire partie d'un cadre d'ensemble cohérent d'appui au développement.
Dans de nombreux cas, dit-il, les politiques sont loin d'être cohérentes, et l'appui fourni dans un domaine risque de nuire aux activités entreprises dans un autre.
Source: Banque Mondiale
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