Sa Majesté le Roi du Maroc,
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,
Mesdames et messieurs les chefs d’Etat et de gouvernement, Madame et Monsieur les Présidents des COP 21 et 22, Madame la Secrétaire exécutive,
Mesdames et messieurs les ministres, ambassadeurs, délégués et observateurs,
Je tiens d’abord à remercier sa Majesté le Roi Mohammed VI et le Maroc pour l’organisation de cette Conférence qui est la première réunion des Etats parties à l’accord de Paris.
Je mesure le chemin parcouru depuis ce jour du 12 décembre 2015 où était scellé un accord à Paris. Et il était historique, lors de la COP 21 sous la présidence de Laurent Fabius et en présence de nombreux Chefs d’Etat et de Gouvernement, dans un contexte particulièrement grave.
Il est désormais irréversible. Irréversible en droit.
Il est entré en vigueur le 4 novembre. Plus de 100 Etats, représentant les
2/3 des émissions de gaz à effet de serre, l’ont ratifié. Je salue l’action menée par le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki Moon et la Présidente de la COP21, Ségolène Royal, pour parvenir à ce résultat et j’appelle tous ceux qui ne l’ont pas encore fait à prendre aux plus vite les mesures nécessaires.
Irréversible, l’accord l’est aussi de fait. Les Etats, les entreprises, les citoyens du monde entier multiplient les initiatives, les projets, les solutions concrètes permettant de conjuguer la lutte contre le changement climatique et le développement.
La transition vers un modèle de croissance sobre en carbone est d’ores et déjà une réalité : les énergies renouvelables ont représenté 90% de la nouvelle production d’électricité en 2015 ; le coût de fonctionnement des technologies solaires photovoltaïques a diminué de plus de 80% en moins de 10 ans.
Un mouvement est lancé pour donner un prix au carbone : 74 pays et plus de 1000 entreprises se sont engagés dans cette coalition qui s’est fixé pour objectif de doubler la part des émissions mondiales couvertes par un prix du carbone en 2030.
La mobilisation du secteur financier s’amplifie : 80 Mds de dollars d’obligations vertes devraient être émis en 2016. La France y contribuera avec la première émission souveraine dès le début de l’année prochaine. Au G20, les travaux avancent pour que le risque climatique et les enjeux du développement durable soient pris en compte par la finance internationale.
Irréversible, l’accord de Paris l’est enfin dans les consciences.
L’urgence climatique ne s’est pas arrêtée le 12 décembre dernier. Les dernières années ont été les plus chaudes de l’histoire moderne. Le lien entre le réchauffement, qui est le fait de l’homme, et les catastrophes
L’inaction a un coût bien plus élevé que celui de la responsabilité. Elle est même dangereuse pour la paix. Partout et notamment dans les pays les plus vulnérables : des millions de personnes déplacées, des conflits liés à l’accès aux ressources. Ici, en Afrique, la famine liée à la sécheresse concerne des millions de personnes et le lac Tchad est menacé de disparition. Le combat pour le climat est indissociable de
l’enjeu de sécurité et de stabilité.
Je suis venu à Marrakech pour lancer un appel. Un appel à la cohérence.
L’accord de Paris est l’œuvre de tous ; il appartient à tous ; il dépend de tous. Je salue l’engagement de Barack Obama qui a été crucial pour obtenir un accord à Paris, notamment dans le cadre des décisions qui ont été prises avec la Chine.
Il est essentiel que les Etats-Unis, première puissance économique mondiale, deuxième émetteur de gaz à effet de serre, respectent les engagements qui ont été pris. C’est leur intérêt, celui de la population américaine qui est frappé par les dérèglements climatiques, c’est celui des entreprises américaines qui sont engagées dans la transition écologique, celui des villes et des Etats fédérés qui se sont mobilisés.
La France, avec l’Europe, mènera ce dialogue avec les Etats-Unis, dans l’ouverture, la confiance, mais avec exigence. Celle des plus de 100 Etats qui ont ratifié.
Je lance un appel à la persévérance.
L’objectif que nous nous sommes donné c’est de limiter la hausse des températures en deçà de 2 degrés et si possible 1,5 degré d’ici la fin du siècle. Il nous faut accélérer.
Accélérer pour que les négociations de mise en œuvre de l’accord avancent au plus vite d’ici 2018.
Accélérer pour traduire dans nos stratégies nationales les contributions qui ont été annoncées. La France est prête, avec d’autres Etats à rehausser le niveau d’engagement pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
Accélérer sur l’ensemble des coalitions qui ont été lancées, et je salue le travail du Maroc pour faire de la COP22 la conférence des solutions.
La priorité c’est l’Afrique.
La COP22 offre l’occasion de placer l’avenir du continent au cœur de l’agenda international et je salue l’initiative prise par sa Majesté Mohammed VI de réunir demain un sommet des chefs d’Etat et de gouvernement africains.
Les pays développés ont à l’égard de l’Afrique une dette écologique, car elle subit très fortement les conséquences des dérèglements climatiques sans en être responsable. Sur les 50 pays les plus meurtris par le réchauffement climatique, 36 se situent en Afrique subsaharienne. Or, ses conséquences, tout comme le manque d’accès à l’énergie, agissent comme un démultiplicateur de toutes les inégalités, de toutes les injustices, de tous les obstacles au développement. Il y a urgence à agir pour définir les bases d’un nouveau partenariat, entre l’Europe et l’Afrique, entre l’Afrique et le monde, pour le développement, pour le climat, pour la paix.
C’est la raison pour laquelle j’ai appelé en septembre à la tribune des Nations Unies à un Agenda 2020 pour l’Afrique, dont l’objectif est de permettre à tous les Africains d’accéder à l’électricité, de répondre aux besoins de 15% de la population mondiale, de permettre aux pays africains de bénéficier d’un potentiel de croissance immense qui est aussi une opportunité pour le monde.
La France ajoute les actes à la parole. Une initiative pour les énergies renouvelables en Afrique a été lancée à la COP21: 10 Mds d’euros ont été promis, dont 2 de la France sur 5 ans. Cet engagement sera dépassé. Ces financements contribueront à l’installation d’1,8 GW de capacités supplémentaires sur le continent. Plus de 40 projets sont déjà en cours. La présidente de la COP21 en a identifié 240 en moins d’un an.
Nous avons désormais une feuille de route qui nous permet d’avancer, avec la Banque africaine de développement, avec l’Union africaine, avec l’ensemble des pays du continent.
Nous ferons aussi en sorte de mobiliser l’Union européenne car les destins de l’Afrique et de l’Europe sont liés. Mais c’est à un changement d’échelle que nous sommes appelés dans les années qui viennent et j’appelle ici la communauté internationale à en poser les bases pour répondre aux attentes des pays d’Afrique.
La justice climatique est au cœur de l’accord de Paris. Les 100 milliards d’ici 2020 promis aux pays en développement doivent impérativement être au rendez-vous. La France tiendra parole. Nos financements annuels pour le climat seront de 5 milliards par an d’ici 2020, dont 1 milliard pour l’adaptation, qui sera la priorité de l’Agence française de développement avec une attention prioritaire à l’Afrique et aux pays les plus vulnérables. Mesdames et Messieurs, Le monde traverse une période de forte incertitude. Partout, les conflits s’aggravent, les menaces se multiplient, les populations civiles souffrent et les extrémismes prospèrent sur les peurs, les rejets, la haine de l’autre.
Parmi toutes ces menaces il y a aussi des facteurs d’espoir, l’accord de Paris en est un.
Il est la preuve que la communauté internationale peut surmonter ses divisions pour agir et préserver ce que nous avons de plus essentiel.
On ne trahit pas une promesse d’espoir. La France y veillera. Sous la présidence du Maroc, avec tous les Etats parties ici représentés, nous serons les gardiens de la lettre et de l’esprit de l’accord de Paris.
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