Ploiesti, une ville roumaine de 250 000 habitants à 50 km au nord de Bucarest n'a assurément rien de touristique. La ville s'est développée autour de l'industrie du pétrole, ou plutôt l'inverse : puits de pétrole et raffineries encerclent la ville de toutes parts. Les maisons aux façades sculptées construites à l'âge d'or rappellent que la région a été aussi riche que la Suisse. Quelle est la place de l'écologie dans cette ville qui se relève tout juste de la période communiste ?
Une ville marquée par la période communiste
Certaines zones industrielles sont maintenant abandonnées, laissant des friches parcourus par les tziganes à la recherchent de métal à revendre. Les raffineries en fonctionnement ont obtenus une dérogation jusqu'en 2012 pour se mettre aux normes européennes. Résultat : un air irrespirable un jour sur deux lors de mon séjour. Une odeur de souffre et une poussière noire envahie la ville jusqu'à l'intérieur des appartements.
L'or noir pollue également le sol. La zone Sud de la ville repose sur une couche de pétrole enfouis à 1m de profondeur. Une partie provient des bombardements américains de 1943 qui visaient les raffineries, une autre part provient des stocks déversés par les allemands pour éviter qu'il ne tombe aux mains de l'armé alliés qui progressait.
Un passage difficile vers la société de consommation
Même si la Roumanie reste un pays pauvre par rapport à l'Europe de l'Ouest, les salaires sont en hausse. Mon hôte français travaille depuis 5 ans dans le pays, le salaire moyen étaient de 150 euros par mois et atteignent actuellement les 350 Euros. Débarrassé de la dictature de Ceausescu et du collectivisme, les roumains sont passé dans un individualisme tape à l'oeil. En quelques années, les vielles Dacia font places aux voitures étrangères les plus grosses possible pour lesquelles les familles s'endettent sur des dizaines d'années.
Les déchets sont collectés par une entreprise française en délégation de service public. Le service fait ce qu'il peut face à l'indiscipline des habitants qui n'hésitent pas à jeter leurs déchets un peu n'importe où. Mon immeuble a été construit à l'époque communiste pour héberger les membres de la Securitate, la terrible police politique, et bon nombre de policiers de la zone, et leur famille.
L'immeuble est prévu pour environs 600 habitants. Une ouverture par étage permet aux habitants de se débarrasser de leurs ordures qui atterrissent dans un local sans poubelle dont la porte reste ouverte. Les tziganes viennent effectuer leur activité traditionnelle de récupération des matériaux recyclables (métaux et bouteilles en PET), et aussi les restes de nourritures qui peuvent nourrir leurs cochons. On constate hélas que des personnes très pauvres et même sans domicile viennent régulièrement y trouver de quoi se nourrir ou de quoi revendre. Enfin, les chiens viennent fouiller les restes à la recherche de nourriture.
Tout n'est pas noir pour autant !
Les initiatives pour préserver l'environnement existent même si elles sont difficiles à mettre en place.
J'ai rencontré Sabina et Lucian, les vice-présidents de la jeune association ZAPODIA. Ils développent la sensibilisation auprès des jeunes et moins jeunes pour préserver le cadre de vie. L'histoire débute il y a trois ans au lycée, où une bande de copains décident qu'il n'est pas possible de rester les bras croisés face à toutes ces pollutions, et qu'ils ne doivent pas attendre que la municipalité ou le gouvernement agissent. Les premières actions se répandent d'un lycée aux autres puis aux collèges. Le groupe grandis à une vingtaine de membres actifs et sors des murs des établissements scolaires.
La première action du groupe sera de nettoyer les abords de l'hôpital départemental. Situé à la limite de la ville, le terrain vague qui jouxte le bâtiment accueille toutes sortes de déchets : plastique, textile, métal, gravats... Des semaines d'actions sont également organisées, par exemple à Brasov, une station de ski réputé. Des messages incitant à ne pas jeter les déchets dans la nature sont placardés le long des pistes.
Peu à peu, des partenariats se créent. Des séances de deux cours d'éducation à l'environnement ont eu lieu l'an dernier et un concours a organisé entre les écoles de Ploiesti. C'était une première pour les enfants qui pouvaient de plus réagir sur un blog créé pour l'occasion. ZAPODIA a également fait un sondage dans la rue pour demander à leur concitoyen ce qu'ils connaissent des actions de leur mairie dans les domaines de l'eau et des déchets par exemple.
Une société devenu méfiante envers les campagnes de sensibilisation
Les freins à de telles initiatives sont cependant nombreux. Le principal reste l'héritage communiste. La dictature réclamait un quotta de verre et de papier à rapporter pour chaque habitant. Le mot recyclage n'existait par, il s'agissait de réutiliser les ressources disponible dans un pays fonctionnant en partie en autarcie. Les ressources étaient utilisées pour des projets pharaoniques, comme le creusement d'un canal reliant le Danube à la mer noire.
La population était rationnée pour les produits alimentaires comme le pain, le sucre, l'huile, la viande etc... Le gouvernement menait des campagnes incitant à économiser l'eau ou le gaz, des ressources disponibles seulement quelques heures par jours. Cette époque pas si lointaine a laissé des traces dans la mentalité roumaines. Les campagnes actuelles de protection de l'environnement ont un but différent, mais le message reste à peu près le même et il est difficile de le faire passer.
On retrouve finalement la problématique du développement. Notre société occidentale est un miroir aux alouettes. La prospérité de l'Ouest est déversée à l'Est par les médias. Notre modèle polluant de société de consommation tend à être répliqué, avec les mêmes erreurs. Espérons que les roumains se réveilleront plus tôt que nous et qu'ils arriveront à développer leur bien être sans l'accompagner du pillage et de la destruction des ressources naturelles qui les environnent.
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