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Comment concilier conservation de la biodiversité et développement agricole ?



  • Tel est le thème  choisi par  le Cirad pour le premier Salon Planète Mode d'emploi  qui se tient du 24 au 27 septembre 2009 à Paris, Porte de Versailles. Placé sous le Haut Patronage du Président de la République et organisé en étroite collaboration avec le Ministère de l'Ecologie, de l'Energie et du Développement Durable et de la Mairie de Paris, ce salon a pour objectif d'expliquer au grand public les enjeux du développement durable et les actions à entreprendre pour "vivre mieux ".

     

    Le Cirad a choisi de présenter deux exemples de recherche - l'un concerne la  forêt amazonienne et l'autre le  Parc régional du W en Afrique de l'Ouest - qui montrent comment concilier conservation de la biodiversité et développement agricole. Avec l'augmentation de la population mondiale, les sociétés vont être amenées en effet à accroître leurs prélèvements sur les richesses naturelles déjà menacées et à exercer une pression supplémentaire sur les écosystèmes, au risque de les fragiliser.
    Comment, dès lors, assurer un développement agricole durable et équitable dans les pays du Sud et préserver la diversité biologique ? Aussi le Cirad se mobilise-t-il  pour aider les sociétés du Sud à produire selon leurs besoins et à préserver les espaces ruraux et naturels, en prenant en compte la pluralité des usages et des intérêts liés à la gestion de cette biodiversité (gestion concertée des espaces naturels, aménagement rationnel des territoires, exploitation judicieuses des ressources...).

    La forêt amazonienne représente la moitié des forêts tropicales humides de la planète (500 millions d'ha) et constitue le plus grand massif forestier tropical du monde. Sur les dix dernières années, elle a connu un taux de déforestation oscillant entre 1,3 et 2,5 millions d'ha par an. La conservation de ce plus grand massif forestier tropical constitue donc un des grands défis de notre siècle, à la fois technique, social, politique, culturel et économique.

    " Une terre sans homme pour des hommes sans terre, c'est le slogan des années 1970 pour la colonisation de l'Amazonie brésilienne. Il a eu un impact considérable sur la disparition de la plus grande forêt tropicale humide du monde.  Dans le seul Brésil, 17% de cette forêt (soit un territoire grand comme la France) ont  été convertis en pâturage ou en terres agricoles ou simplement abandonnés en raison de la dégradation des sols ", explique Plinio Sist*, chercheur au Cirad.

    Depuis trente ans, l'utilisation des terres suit toujours la même stratégie : obtention d'un lot de 100 ha par le colon, défrichement d'une parcelle (2-4 ha) pour la mise en culture vivrière pendant 2-3 ans puis mise en place d'un pâturage extensif. Au bout de 20 ans la propriété est totalement défrichée, les sols le plus souvent épuisés, et la productivité des pâturages diminue en raison d'une gestion peu adaptée. Le colon migre alors vers d'autres lots de forêt pour assurer la subsistance de sa famille et réitère le même cheminement ...

     Proposer des itinéraires techniques permettant à la fois de mettre en place une agriculture durable sur des surfaces limitées ( culture de maïs et riz, gestion des pâturages, systèmes agro-forestiers) et des systèmes de gestion capables de valoriser les ressources forestières est donc pour l'agriculture familiale en Amazonie une question de survie. C'est là que prend place le projet Floagri (2005-2009), financé par l'Union Européenne et coordonné par Plinio Sist. Il permet aussi d'intégrer en région amazonienne les techniques de semi direct sous couvert végétal(SCV), introduites dans les cerrados depuis plusieurs décennies et de valoriser parallèlement les ressources forestières (bois, gaines, latex....) afin d'assurer sur le long terme une rente complémentaire aux agriculteurs. Le projet Floagri inclue trois pays amazoniens, Brésil, Pérou et Equateur et 5 institutions, Cirad , Embrapa, IPAM, Universidad agronoma de la Selva (UNAS) et Instituto nacional de investigaciones agropecuarias (INIAP).

    Le séminaire final du projet se tiendra du 29 au 30 septembre 2009 à Lima (Pérou).

     
     

    Le Parc régional du W déclaré "Réserve transfrontalière de la biosphère " par l'Unesco, représente une réserve naturelle d'un million d'hectares, aux confins de trois pays africains : le Bénin, le Burkina Faso et le Niger. Il doit son nom aux méandres en forme de W que le fleuve Niger décrit en le  traversant. C'est aussi l'un des derniers refuges de la faune d'Afrique de l'Ouest, typique des grandes étendues de savanes : éléphants, buffles, lamantins, girafes, lions, oiseaux etc.

    Ces aires protégées sont toutefois inscrites dans des paysages de plus en plus agricoles marqués par l'intensification. La périphérie de ces espaces protégés est ainsi l'objet d'une compétition accrue entre une culture de coton en expansion, une indispensable production de vivrier et les besoins en pâturage de grands troupeaux transhumants. Cette situation conflictuelle se répercute logiquement sur les aires protégées voisines qui sont alors vues et utilisées illégalement comme sources de fourrage, de protéines (braconnage) ou de terre agricoles.

    De 2001 à 2007, le Cirad grâce au soutien financier de l'Union européenne et en lien direct avec le Bénin, le Burkina Faso et le Niger a assuré la coordination scientifique du projet Ecopas (Ecosystèmes protégés d'Afrique sahélienne), programme d'appui pour une conservation durable du Parc régional du W, au bénéfice des populations riveraines.

    Comme le précise Marie-Noël De Visscher **, chercheur au Cirad : " nous étions là pour contribuer par la recherche à la résolution de questions de développement local et de gestion et conservation de la biodiversité,  tout en participant au renforcement des compétences. Nous nous sommes particulièrement intéressés à la gestion des conflits fonciers en périphérie, à la valorisation locales des ressources naturelles et culturelles et  à l'écologie de la grande faune emblématique".

    Pour ce faire, le Cirad a organisé autour des gestionnaires du Parc un réseau de scientifiques réunissant les universités des trois pays du W et des institutions de recherche européennes. Outre son appui direct à la gestion, ce réseau a encadré 8 thèses de doctorat et  une vingtaine de stages de  masters tant du nord que du sud et produit  une cinquantaine de publications scientifiques et techniques. Le projet Ecopas a en outre accueilli un projet de recherche en écologie soutenu par l'ANR (Agence nationale de la recherche).

     

    * chercheur à l'UPR (Unité propre de recherche) Dynamique des forêts naturelles

    ** chercheur à l'UPR (Unité propre de recherche) Agirs (Animal et gestion intégrée des risques)

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