L’évolution de la population mondiale et la nécessité de préserver les ressources naturelles impactent directement le monde agricole. L’agriculture actuelle est confrontée à de nombreux enjeux environnementaux, sociaux et techniques, et la volonté de réduire les effets négatifs sur l’environnement et la santé humaine (Chaumet et al. 2009) amène les acteurs du monde agricole, les politiques et les citoyens à se positionner pour une évolution des mentalités, des pratiques et des modes de consommation. L’évolution des politiques agricoles européennes a permis de mettre en place des normes et de nouveaux objectifs pour l’agriculture dès les années 1980.
C’est en 2006 que les systèmes innovants collectifs intègrent les discours politiques via la création de dispositifs pour financer la constitution et l’animation de ces groupes multi-acteurs (PEI). Puis, de nombreuses études se sont accordées à dire que seules des approches agronomiques qui mobilisent les principes et concepts de l’écologie permettent de concevoir des modèles agricoles durables (Aubertot et al. 2007; Bui 2015) alliant le principe tripartite d’une amélioration économique, sociale et environnementale pour créer des systèmes vivables, viables et équitables. L’objectif est de produire des aliments sans porter préjudice au milieu naturel. Si l’agroécologie est un « ensemble de pratiques agricoles basées sur l’écologie », elle implique des changements d’ordre technique et scientifique mais est obligée de s’envisager comme une relation interconnectée entre sciences et société (Stassart et al. 2012), dépassant alors les simples systèmes de production pour englober l’ensemble des systèmes agri-alimentaires : en associant à la dimension de production agricole, l’organisation des filières sur le territoire et la commercialisation (Francis et al. 2003).
Pourtant c’est sous certains processus particuliers que ces innovations agroécologiques vont pouvoir voir le jour et se pérenniser : la dimension collective joue un rôle fondamental dans une évolution des systèmes puisqu’elle permet de mettre en place des systèmes co-construits. (Corrales 2017). L’adage africain bien connu « Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin » est bien synonyme de plus de force et d’impact dans les décisions prises en groupe. En effet, même s’il peut être source de lenteur lorsqu’il faut prendre une décision, ce dernier rassure et permet une plus grande transversalité des opinions.
Enfin, l’agriculture biologique peut être vue comme un processus de développement à part entière puisqu’il impacte très souvent tous les niveaux des exploitations agricoles mais également les systèmes de transformation et de commercialisation. C’est dans ce contexte global où les innovations collectives sont mises en avant, que l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique (ITAB) a mis en place le projet Innovez Bio, dont l’objectif était de recenser, caractériser et mettre en réseaux les groupes multi-acteurs innovants en bio.
La présente étude s’intègre dans ce projet. L’objectif est d’examiner comment les innovations collectives en agriculture biologique naissent et se mettent en place au sein de groupes d’acteurs et comment elles contribuent à la transition agroécologique, ceci, en analysant les différents processus des innovations, à la croisée entre évolutions techniques et sociales. Après une présentation du contexte dans lequel s’insère le projet Innovez bio, une synthèse bibliographique (partie 1) et la présentation de la méthodologie appliquée (partie 2), nous présenterons les résultats de l’étude (partie 3), à savoir une typologie des innovations en agriculture biologique en France et un retour sur les différentes enquêtes (en ligne, entretiens semi-directifs) menées durant ces 6 mois. Enfin, la discussion (partie 4) permettra de définir les mécanismes qui œuvrent dans la construction des processus de mises en place des innovations ainsi que l’implication des pratiques dans la transition agroécologique.
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