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Le secteur environnement au Niger


Résumé : Sécheresses, pression démographique et désertification, participent d’une dégradation accélérée de l’environnement du Niger et de sa situation alimentaire. Aussi les autorités nigériennes ont mis l’accent sur les questions environnementales, qui représentent cinq des quatorze programmes de la Stratégie de Développement Rural adoptée fin 2003. Elles ont par ailleurs joué un rôle moteur dans la signature de la déclaration de Paris pour une gestion durable du bassin du fleuve Niger. Enfin, l’année 2004 a vu la ratification des protocoles de Kyoto et de Carthagène, la préparation d’une Consultation sectorielle environnement, reportée en 2005 pour cause d’élections.

I. CONTEXTE

Le Niger, situé en plein cœur du Sahel, fait face depuis la sécheresse de 1973 à une dégradation annoncée de son environnement. La conjonction des sécheresses récurrentes et d’une forte pression démographique a considérablement entamé ses possibilités d’augmenter encore ses productions agricoles, exposant le pays à une situation alimentaire précaire.
La désertification est, à l’évidence, la problématique environnementale majeure du Niger ; elle apparaît comme un phénomène complexe et insidieux qui freine le développement socio-économique du pays tout en étant aussi une conséquence de la grande pauvreté du milieu rural.
Cette problématique de la désertification regroupe en fait un ensemble varié de phénomènes : ensablement (particulièrement marqué au niveau des cuvettes oasiennes à l’est du pays), dégradation des plateaux forestiers pour l’alimentation des villes (91 % de l’énergie domestique provient du bois), intensification des processus d’érosions hydrique et éolienne, mise en culture d’écosystèmes fragiles, baisse tendancielle des rendements, surpâturage autour des points d’eau, mauvaises pratiques de l’irrigation, etc...
Ces phénomènes, pour partie liés aux changements climatiques, se traduisent par :
• une irrégularité du régime pluvio-thermique ;
• une tendance à la hausse des températures ;
• un accroissement de l’albédo au sol ;
• une tendance à la raréfaction des pluies et un raccourcissement de l’hivernage utile ;
• une perturbation de la circulation atmosphérique des masses d’air et des vents dominants ;
• une évolution régressive des écosystèmes terrestres et aquatiques (ensablement du fleuve...) ;
• une perturbation du régime des écoulements des cours d’eau et des nappes phréatiques ;
• une dégradation très marquée des ressources naturelles et une perte de la diversité biologique (érosion génétique) ;
• une dégradation des aires de pâture et leur colonisation par des espèces herbacées à faible appétence (Sida cordifolia...) ;
• une infestation des points d’eau par des végétaux flottants envahissants (jacinthe d’eau, laitue d’eau...) ;
• une accentuation du phénomène de la désertification vers des zones plus fertiles et verdoyantes du sud...
En outre, le Niger est confronté à d’autres problèmes environnementaux, notamment :
• les pollutions urbaines et industrielles et leurs conséquences au plan sanitaire (le fleuve Niger apparaît comme l’exutoire des eaux usées de la ville de Niamey) ;
• l’extinction de la grande faune sahélo-saharienne (conflits armés et braconnage ont pratiquement réduit à néant un des plus grands avantages comparatifs du pays : une richesse biologique exceptionnelle, autruches, Oryx, Addax...).

II. POLITIQUES NATIONALES

Avec l’adoption fin 2003 de la stratégie de développement rural, les autorités nigériennes ont particulièrement mis l’accent sur les questions environnementales. Dans cette stratégie de développement rural, secteur considéré à juste titre comme moteur du développement économique du Niger, on compte cinq programmes prioritaires qui touchent directement à l’environnement (sur un total de 14 programmes) :
• Gouvernance locale des ressources naturelles (foncier, eau, végétation, faune...),
• Kandadji : régénération des écosystèmes et mise en valeur de la vallée du fleuve Niger,
• Restauration des terres et reboisement,
• Aménagement pastoral et sécurisation des aménagements pastoraux,
• Préservation de l’environnement.

La mise en œuvre effective de ces programmes reposera sur la mise en application, au niveau local (arrondissement, département...) des recommandations préconisées par la communauté internationale en matière d’environnement (adaptation aux changements climatiques, lutte contre la désertification, préservation de la biodiversité...).

Une consultation sectorielle sur l’environnement et la lutte contre la désertification devait également permettre de renforcer la concertation sur ces domaines afin d’aboutir à une vision partagée des intérêts du Niger en matière d’environnement, d’énergies renouvelables, de gestion des aires protégées... . Cette consultation n’a pu se tenir comme prévu en cette année marquée par les élections et a été reportée en 2005. Elle s’appuiera sur un programme qui intègre les stratégies et politiques nationales tant en matière d’environnement que de développement économique et social, et repose sur des principes qui tiennent compte de l’hétérogénéité des situations socio-économiques et environnementales du pays, des disparités régionales en terme de disponibilité des ressources naturelles, et du souci de les gérer durablement au bénéfice des générations futures.
Enfin, les autorités nigériennes, avec la collaboration du Centre culturel franco-nigérien, ont cette année souligné la dimension culturelle aussi de l’environnement, et maintenu, comme prévu dans le cadre de la Consultation sectorielle, la programmation du 1er Festival International de Films d’Environnement de Niamey (FIFEN).

III. POLITIQUE EXTERIEURE

Le Conseil National pour l’Environnement et le Développement Durable (CNEDD) et le ministère de l’Hydraulique, de l’Environnement et de la Lutte Contre la Désertification (MHE/LCD) assurent, avec l’appui des partenaires au développement (notamment PNUD, Italie, France), la prise en compte des préoccupations du Niger lors des réunions internationales.
Le Niger s’est très tôt engagé dans la ratification de toutes les grandes conventions issues de Rio. Les dossiers nécessaires à la ratification des protocoles de Kyoto et Carthagène ont été déposés à l’assemblée nationale qui devrait en principe les ratifier.
Le projet du Fonds de Solidarité Prioritaire ROSELT (Réseau national de surveillance écologique à long terme), outre la mise en place d’un réseau national d’observatoires environnementaux sur le territoire nigérien, doit permettre de renforcer les capacités des acteurs nationaux sur ces conventions. Ainsi ROSELT appuie le CNEDD pour améliorer l’information de la société civile (ONG, organisations professionnelles agro-pastorales, communes rurales) et du groupe développement rural de l’assemblée nationale sur les enjeux liés à ces grandes conventions ; des fascicules de vulgarisation/sensibilisation sur les trois conventions et leur déclinaison nationale ont été largement diffusés et plusieurs ateliers devraient avoir lieu en 2005, notamment sur le Mécanisme de Développement Propre (MDP).

1. Gestion intégrée des ressources en eaux du fleuve Niger
Assurant la présidence de l’Autorité du Bassin du Niger (ABN) depuis 2002, les autorités nigériennes ont été particulièrement actives en 2003-2004 pour mobiliser les partenaires au développement autour de la dégradation de l’environnement dans le bassin versant du fleuve Niger. La visite au Niger et au Mali du Président Jacques CHIRAC en octobre 2003 a été l’occasion pour les autorités nigériennes, suite aux recommandations du Conseil des ministres de l’ABN, de préparer « la déclaration de Niamey » demandant à la France d’être le porte-parole des Etats membres de l’ABN auprès des autres bailleurs de fonds pour mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre d’une vision partagée pour l’aménagement et le développement durable du bassin versant du fleuve Niger. Outre des engagements financiers significatifs de la France (suivi hydrologique, mobilisation mathématique des écoulements, fonds d’étude et observatoire environnemental, assistance technique), le Président de la République a proposé au Président nigérien Mamadou TANDJA d’organiser à Paris une réunion internationale pour lancer le partenariat sur le bassin versant du Fleuve Niger. Cette réunion s’est déroulée à Paris les 26 et 27 avril 2004 et a vu la signature :
• par les chefs d’Etat, de la « Déclaration de Paris » qui décline des principes de gestion et de bonne gouvernance pour un développement durable et partagé du Bassin du Niger,
• par les partenaires de l’ABN d’un « Cadre de Coopération ».
Depuis, la France poursuit son appui à l’ABN, tant technique qu’institutionnel, aux côtés en particulier de la Banque mondiale, de la BAD, du FEM/GEF et du Canada. L’Union européenne s’est également déclarée prête à appuyer l’ABN, en particulier à travers l’Initiative européenne pour l’Eau et l’Assainissement dont la composante GIRE est pilotée par la France.

2. Les institutions régionales basées à Niamey
Outre l’Autorité du bassin du Niger (ABN), plusieurs institutions à vocation environnementale et météorologique ont leur siège à Niamey :
Le Centre Africain pour les Applications de la Météorologie au Développement (ACMAD),
Le Centre Régional du CILSS pour l’Agriculture, l’Hydrologie et la Météorologie (AGRHYMET),
L’Ecole Africaine de la Météorologie et de l’Aviation Civile (EAMAC) de l’ASECNA,
Le Centre Régional d’Enseignement Spécialisé en Agriculture (CRESA),
L’Institut de Recherches Internationales sur les cultures semi-Arides et Tropicales (ICRISAT),
Le Centre d’Etudes et de Recherches Médicales et Sanitaires (CERMES).
En juillet 2002, ces structures régionales se sont regroupées sous forme d’une Plate forme des Institutions Régionales pour l’Environnement et la Météorologie, la PIREM. Plusieurs groupes de travail inter institutions se sont créés dans une approche pluri-disciplinaire autour des thématiques suivantes : Climat, Gestion Intégrée des Ressources en Eau, Communication de la PIREM, Formation et Technologie, Ecologie.

Des partenariats entre la PIREM et d’autres pôles d’excellence environnementale et météorologique sont envisagés. La Météopole de Toulouse (Météo France) et le Centre Agropolis (IRD/CIRAD) de Montpellier devraient très probablement renforcer ces partenariats scientifiques en 2004/2005.
Ainsi, le Groupe Climat est étroitement associé à la mise en œuvre du programme international Approche Multidisciplinaire de la Mousson Africaine (AMMA) et du FSP RIPIECSA (Recherche Interdisciplinaire et Participative sur les Interactions entre les Ecosystèmes, le Climat et les Sociétés d’Afrique de l’Ouest). ROSELT fait également partie de ce groupe, et ce FSP, en liaison avec les institutions régionales présentes à Niamey, devrait permettre de conduire certaines études susceptibles d’éclairer et/ou d’étayer les positions du Niger à l’international.

IV. RELATIONS BILATERALES ET EUROPEENNES

Il peut être signalé dans ce domaine l’approche originale des autorités nigériennes en terme de coordination des interventions. Elles ont en effet sollicité l’Italie comme chef de file « Désertification », l’Allemagne comme chef de file « Biodiversité » et la France comme chef de file « Changement climatique ». Une coordination régulière a donc lieu entre ces trois pays européens et les autorités nigériennes sur la mise en œuvre des recommandations liées à ces conventions. En outre, la recherche d’une meilleure synergie entre ces conventions peut être facilitée par le fait que le CNEDD en est l’unique point focal au plan politique (sous la tutelle de la Primature).
Dans le cadre de nos interventions avec les institutions de la PIREM, outre les appuis d’ores et déjà évoqués pour l’ABN/AFD/FFEM/MAE (10 Millions d’Euros), plusieurs FSP mobilisateurs appuieront les activités 2005 : a) FSP mobilisateur d’appui au Comité permanent Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel (CILSS) : 3 millions d’Euros (2 assistants techniques régionaux), b) FSP mobilisateur RIPIECSA « changement climatique » pour lequel l’ACMAD, le Centre AGRHYMET, l’ICRISAT et l’ABN seront largement impliqués, en partenariat avec l’IRD, le CNRS et Météo France.
Au niveau national, la France s’implique avec les moyens suivants :
• FSP ROSELT destiné à mettre en place un réseau national d’observatoires de l’environnement et à accompagner les autorités nigériennes sur les conventions issues de Rio,
• FSP Maîtrise de la desserte en eau potable particulièrement centré sur les questions de gestion de l’eau en zone pastorale et de qualité de l’eau,
• FSP POLSECAL qui finance plusieurs actions relatives à l’élaboration d’un code pastoral et à la problématique foncière dans les zones de transition agriculture,
• FFEM - ASS projet régional de conservation et repeuplement des antilopes sahélo-sahariennes conduit par la Convention sur les Espèces Migratrices (CMS),
• FFEM IREM/LCD (Initiative Régionale Environnement Mondial et Lutte contre la Désertification en Afrique sahélienne),
• Interventions de l’AFD qui prennent largement en compte les priorités environnementales notamment en matière de gestion de la ressource en eau.

Commentaires

Niamey est un pôle d’excellence dans le secteur météorologique, avec plusieurs institutions de valeur et de nombreux experts soutenus par des financements conséquents. Malgré les nombreuses actions des bailleurs de fonds, on peut déplorer un manque d’engagement véritable du gouvernement nigérien plutôt enclin à gérer les priorités au jour le jour qu’à monter des opérations dont les effets qui ne seront visibles que sur le long terme. La coordination des bailleurs, organisée par le PNUD, semble s’essouffler car, mise en place précocement, elle a bien des difficultés à produire des résultats concrets. Des résultats sont tangibles sur l’approvisionnement en eau potable, où la communauté des bailleurs s’est largement mobilisée, en marge du secteur environnement stricto sensu.
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