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France : Faire de l'INES un centre de référence européen dans le domaine du solaire.


Quand le Conseil Général de la Savoie et la Région Rhônes-Alpes décident de créer un centre de référence européen dans le domaine du solaire, en partenariat avec quatre grands acteurs de la R&D -le CEA, le CNRS, l'Université de Savoie et le CSTB- cette démarche aboutit à la création, le 3 juillet 2006, de l'Institut National de l'Energie Solaire, l'INES.D'ici 2009, plus de 200 personnes travailleront dans cet établissement, dont l'une des spécificités est de couvrir l'ensemble des compétences du secteur de l'énergie solaire, photovoltaïque et thermique, qui englobe également leur intégration dans l'habitat et leur association avec d'autres sources d'énergie. Jean Therme, directeur de la recherche technologique du CEA, dresse un bilan de la première phase de développement de l'INES et esquisse quelques-uns des projets futurs. Propos recueillis par Jean-François Desessard.

BE France - Les activités de l'INES s'articulent aujourd'hui autour de trois plates-formes. Quelle est la mission de chacune d'entre elles ?

Jean Therme- Il existe en effet trois plates-formes, baptisées"INES Education","INES RDI"et"INES Démonstration", qui travaillent en synergie. La première d'entre elles, INES Education, qui prend progressivement son rythme de croisière, recouvre la formation et l'information. A mon sens, elle est essentielle puisque c'est grâce à elle qu'il sera possible de déployer dans la société la totalité des solutions technologiques et industrielles.

La seconde, dont l'appellation"RDI"associe à la fois"R&D"et"Innovation industrielle", va permettre à cet institut de faire de la science et de développer des technologies tout en initiant des partenariats entre le public et le privé de manière à réaliser des transferts en direction des industriels, voire à créer de nouvelles entreprises dans le secteur de l'énergie solaire.

Grâce à la troisième plate-forme, celle dite de"démonstration", nous allons pouvoir mettre en situation réelle des résultats de la recherche, mais aussi des outils pédagogiques, de manière à ce que l'on puisse tester leurs performances en environnement réel. Nous pourrons également tester la façon dont les utilisateurs accepteront ou pas ces technologies, voire les faire évoluer. Il faut préciser que le développement de cette plate-forme suit celui de la plate-forme RDI qui nécessite elle-même la mise à disposition de bâtiments par le Conseil Général de la Savoie et la mise en place des infrastructures de recherche nécessaires par la Région Rhônes-Alpes.

BE France - Quelles sont les priorités de l'INES dans le domaine du photovoltaïque ?

Jean Therme- La première est liée à la pénurie de silicium à destination du photovoltaïque. C'est un silicium qui est issu des déchets du silicium utilisé pour la microélectronique. Or ce dernier marché ne croit pas à la vitesse de celui du photovoltaïque. Dans ce contexte, nous avons développé un deuxième axe de production du silicium à partir du silicium dit"métallurgique"que l'on trouve dans la pâte de silicone ou les alliages à base d'aluminium. Il en existe une quantité illimitée à l'échelle du photovoltaïque qu'il suffit de purifier pour obtenir de bonnes performances des cellules photovoltaïques. Un pilote industriel, utilisant un procédé très innovant qui permet d'enlever certaines impuretés avec une torche plasma, a donc été mis en place. Dès les premiers essais, nous avons obtenu des rendements de 14%, seuil à partir duquel ce procédé devient économiquement rentable et performant sur le marché. Rappelons que les meilleures cellules photovoltaïques sur polycristallin disponibles sur le marché ont un rendement de 16%.

Une fois fabriqués, ces cellules et ces modules doivent être testés sur des toits. Aussi avons-nous transféré à l'INES nos activités de Cadarache. Les chercheurs disposent ainsi de bancs tests de modules photovoltaïques, en ensoleillement réel, qui leur permettent de tester leurs performances mais aussi leur fiabilité. Parfois, le photovoltaïque n'est pas couplé au réseau mais utilisé en mode autonome. C'est la raison pour laquelle les équipes du CEA de Cadarache spécialisées dans le domaine des batteries ont aussi été transférées à l'INES, notre objectif étant de constituer un laboratoire de référence européen dans ce domaine. Dans un premier temps, celui-ci s'intéressera essentiellement au stockage électrique de l'énergie photovoltaïque. Mais à terme, ce laboratoire travaillera également sur les applications transports. Nous croyons beaucoup en effet au couplage entre l'habitat et les transports.

Enfin, l'activité sur les cellules solaires de génération future basée jusqu'à présent au centre de Saclay du CEA a été transférée aussi à Chambéry. Il s'agit de cellules organiques qui se présenteront sous la forme d'un revêtement plastique pouvant être installé sur toutes les vitres afin de récupérer l'énergie solaire. A plus long terme, elle pourrait même prendre l'aspect d'une peinture qu'il suffira alors d'étendre sur un mur ou sur un toit. Aujourd'hui, les rendements que nous avons obtenus, de l'ordre de 3 à 4%, représentent les meilleurs résultats au monde. Cela dit, cette technologie n'apparaîtra pas sur le marché avant dix ou quinze ans.

BE France - Comment allez-vous tester les performances de ces technologies, qu'il s'agisse du solaire photovoltaïque ou du solaire thermique, quand elles sont introduites au sein de l'habitat ?

Jean Therme- Là encore, nous allons créer une plate-forme de test et de démonstration qui regroupe de petites maisons individuelles que nous instrumentons. Les deux premières représentent les référentiels européens dans ce domaine, c'est-à-dire l'allemand et le suisse. Notre objectif est de les adapter au confort d'été. En effet, ce sont des maisons à très basse consommation d'énergie. Or leur isolement trop parfait fait qu'il est difficile de gérer leur température intérieure sous certaines latitudes européennes.

L'INES disposera également d'une maison dite"très hautes technologies"dans laquelle seront mis en place les meilleurs outils technologiques, les solutions matériaux les plus performantes, tout comme les solutions de gestion d'énergie. D'autres maisons, celles-ci de démonstration, réalisées en collaboration avec des industriels, permettront de tester leurs solutions technologiques. Par la suite, nous travaillerons également sur le tertiaire où nous souhaitons apporter de véritables solutions.

Enfin, cet établissement va mener des recherches, d'une part sur la rénovation de l'habitat, d'autre part sur le couplage entre l'habitat et le transport. Il est en effet essentiel de réfléchir à la manière de produire l'énergie nécessaire au mode de transport de chacun et à la façon d'utiliser ce dernier comme moyen de stockage ou source d'énergie dans une maison. C'est un axe de recherche très innovant qui passe par le vecteur électricité mais aussi l'hydrogène. Or ces solutions, nous les testerons sur plusieurs démonstrateurs de l'INES.

Source :

BE France numero 193 (6/06/2007) - ADIT / ADIT -http://www.bulletins-electroniques.com

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