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Guadeloupe : impact marqué du réchauffement de 2005 sur les récifs coralliens


Au cours de l’année 2005, la température des eaux marines a dépassé 29°C sur une durée de 6 mois (mai à novembre) dans le bassin caraïbe. Ce fait constitue une anomalie puisque habituellement seul le mois de septembre présente des températures aussi élevées. Les récifs coralliens se développent grâce à la croissance de millions de coraux qui bâtissent des structures telles que la barrière du Grand Cul-de-Sac Marin. Ces animaux constructeurs, ne peuvent supporter une température supérieure à 29°C sur une durée importante. Lorsqu’un tel événement survient, les coraux prennent une couleur blanche ; ce phénomène est appelé « blanchissement » et correspond à l’expulsion d’algues microscopiques qui vivent en symbiose avec le corail. Si ce blanchissement perdure durant plusieurs mois, le corail dépérit et finit par mourir faute de nourriture qui est normalement produite par ces micro-algues.

La Guadeloupe a été frappée en 2005 par un phénomène de blanchissement massif des coraux. Des suivis réguliers réalisés par l’équipe DYNECAR du laboratoire de biologie marine de l’Université Antilles-Guyane ont permis de mettre en évidence qu’environ 50 % en moyenne des colonies coralliennes avaient blanchi en 2005. Un an plus tard, la poursuite de cette étude a pu démontrer que ce phénomène de blanchissement avait entraîné une mortalité massive des coraux des récifs de la Guadeloupe. Au début 2005, le taux de recouvrement en coraux des récifs de Guadeloupe était, en moyenne, de 25 % (cela signifie que 25 % de la surface des fonds propices au développement des récifs était couverte par des coraux). En fin 2006, il n’était plus que de 14 %, traduisant ainsi une mortalité retardée qui a frappé 40 % des coraux.

Cette baisse a notablement été observée sur les sites des Ilets Pigeon, de Port Louis et de la barrière récifale du Grand Cul-de-Sac Marin. Les autres îles des Antilles n’ont pas été épargnées puisque le même phénomène a été constaté en Martinique et à Saint-Barthélemy. L’installation sur le récif de jeunes coraux, susceptibles de pallier la mortalité des adultes et de régénérer les récifs, fait également l’objet d’un suivi dans le temps. À la suite du blanchissement, en 2005 et 2006, une baisse significative du renouvellement de ces jeunes coraux a été également observée. Les pertes de coraux constatées sur les différents récifs n’ont pas partout la même ampleur. En effet, il est probable que les pressions dues à l’Homme contribuent à fragiliser les récifs. Cela pourrait expliquer l’existence d’une mortalité des coraux plus importante sur des récifs exposés à des pollutions.

Si cet événement particulier a fortement touché les coraux, il apparaît que les poissons de récif n’ont pas été affectés de façon similaire, dans la mesure où, pour l’instant les abris que constituent les coraux (vivants ou morts) sont encore en place. Il est cependant probable que l’architecture récifale se dégrade sous le fait de l’érosion marine, l’absence de vie des coraux ne permettant pas de la maintenir en place.

L’augmentation de la température de la mer en 2005 a donc eu un impact désastreux sur les coraux, qui s’est traduit par une mortalité massive des adultes et une baisse du recrutement des jeunes. Par ailleurs, les Antilles françaises présentent des récifs coralliens largement dégradés sous l’action de pressions anthropiques telles que les rejets polluants, la déforestation et la surexploitation de certaines espèces marines. Les phénomènes de blanchissement, viennent s’additionner aux effets de ces pollutions chroniques qui menacent déjà les récifs. Si ces dernières ne sont pas maîtrisées, la disparition des récifs coralliens dans les Antilles françaises pourrait intervenir dans les 30 ans.

Plusieurs actions pour l’amélioration de la qualité du milieu marin ont déjà été mises en œuvre : la modernisation des stations d’épuration, la protection des côtes (« loi littoral »), la mise en place de réserves naturelles et de projet de cantonnement de pêche… Pour conclure, il est indispensable de maintenir une vigilance de chaque instant pour protéger les récifs coralliens et de poursuivre l’effort de chacun pour améliorer la qualité du milieu marin côtier de nos îles. Ce sont les seules solutions qui puissent garantir un retour à un bon état écologique propice à la conservation de notre patrimoine naturel et au maintien d’activités économiques majeures telles que la pêche et le tourisme.

Contacts :
Claude Bouchon : Université Antilles-Guyane, laboratoire de biologie marine, équipe DYNECAR (Dynamique des Ecosystèmes Caraïbes et Biologie des Espèces Inféodées)
Claude.Bouchon@univ-ag.fr
Franck Mazéas : Direction Régionale de l’Environnement, programme IFRECOR (Initiative Française pour les REcifs CORalliens)
franck.mazeas@guadeloupe.ecologie.gouv.fr
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