Par Philippe Cury et Yves Miserey.
Si la mer, vue du rivage, continue à«danser le long des golfes clairs», sous la surface, c’est une tragédie qui se joue: àforce d’être mangée par l’homme, la mer se meurt. En l’espace d’un siècle et demi, loin des regards, des ressources qu’on pensait inépuisables ont étépoussées au bord de l’effondrement par une surpêchequi prélève plus de 100 millions de tonnes de poissons par an dans le monde.En pêchant toujours plus loin, toujours plus profond, et àprésent toujours plus «petit», l’homme est en train de transformer les océans du globe en désert liquide. Des bateaux et des technologies toujours plus performants ne laissent aucune chance aux poissons. Du bateau-usineàla pirogue, toutes les embarcations capturent des espèces réputées inaccessibles ou non consommables. Le pillage est systématique et aveugle, car il est particulièrement difficile de sélectionner les espèces capturées.
A ce rythme, ce sont des maillons entiers de la chaîne alimentaire marine qui ont déjàétérayés de la liste du vivant, avec comme conséquence, àterme, une déstabilisation inquiétante de tout l’écosystème marin. L’effondrement brutal et irréversible des ressources halieutiques n’est plus une hypothèse fantaisiste. Que font les pouvoirs publics? Si peu, alors qu’il faudrait une mobilisation générale. On cherche en vain les prémices d’une gouvernance mondiale, seule àmême de rétablir la productivitédes océans. Et la plupart des pays redoutent de se mettre àdos leurs pêcheurs, la France plus que tout autre…
Une mer sans poissons est un état des lieux d’autant plus alarmant qu’il est factuel et qu’il s’appuie sur une documentation très complète et souvent inédite en français. Après l’avoir lu, on ne pourra pas dire qu’on ne savait pas.
Philippe Cury, docteur ès sciences, membre de l’Institut de recherche pour le développement, est directeur du Centre de recherche halieutique méditerranéenne et tropicale, basé à Sète.
Yves Misereyest journaliste scientifique au Figaro.
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