La destruction de la nature coûterait 2 000 milliards d'euros par an à la planète, selon les résultats d’une étude publiée à la CdP9 de la CDB
La destruction de la nature coûterait 2 000 milliards d'euros par an au monde, soit 6% du produit national brut (PNB) mondial, selon une étude qui a été présentée le 22 mai à Bonn, lors de la neuvième session de la Conférence des Parties à la Convention sur la Diversité Biologique, dans l’événement parallèle (side event) consacré à l’assemblée des partenaires du « Compte à rebours 2010 ».
Les écosystèmes nous assurent un grand nombre de services : purification de l’air et de l’eau, régulation du climat, fourniture de la nourriture, des abris, des vêtements et des médicaments. Ils assurent ces fonctions et services pour nous et pour toute forme de vie lorsqu’ils sont en bon état. En général, ils fonctionnent gratuitement. Mais la plupart du temps, pour préserver leur fonctionnement et leur santé, nous devons cesser leurs utilisations concurrentes, telles que l’extraction des ressources, l’élimination des déchets ou la mise en valeur des terres (pour les résidences, les loisirs, le transport, l’industrie).
Jusqu'à récemment, il a été difficile d’estimer le coût que représente la perte des services que nous rendent les écosystèmes, et donc de déterminer les conséquences de cette perte par rapport aux avantages que l’on retire des utilisations concurrentielles. L’étude intitulée "The Economics of Ecosystems and Biodiversity", (TEEB : L'économie des écosystèmes et de la biodiversité") a apporté des éléments nouveaux en la matière. Cette étude, qui a été initiée par l'Union européenne et le ministère allemand de l'Environnement, de la conservation de la nature et de la sécurité nucléaire, a été présentée lors de la CdP9 de la CDB. Selon Pavan Sukhdev, chef de l’étude, chaque année, la défragmentation des écosystèmes forestiers et la perte des services qu’ils nous rendent, les disparition d'espèces animales et végétales coûteraient 6% du Produit national brut (PNB) mondial, soit 2 000 milliards d'euros.
Le rapport TEEB démontre de façon chiffrée le coût de l’inaction. Si nous n’adoptons pas les politiques adéquates, le déclin actuel de la biodiversité et les pertes subséquentes des services rendus par les écosystèmes vont continuer et parfois s’accélérer. Certains écosystèmes seront endommagés jusqu’au point de non retour. Avec un scénario basé sur l’économie et le business habituels, l’horizon 2050 serait confronté à des conséquences très sérieuses :
• 11% des surfaces qui restent en 2000 à l’état naturel seraient perdues, sous la pression des conversions pour l’agriculture, l’expansion des infrastructures et les changements climatiques ;
• presque 40% des terres qui sont actuellement concernées par des formes d’agriculture à faible impact seraient converties à l’usage intensif de l’agriculture, avec des pertes supplémentaire en biodiversité ;
• 60% des récifs coralliens pourrait être perdus - même d'ici 2030 – sous l’effet de la pêche, la pollution, les maladies, les espèces exotiques envahissantes, et le blanchiment de corail dû au changement climatique.
Quel est le coût économique de la perte de services de la biodiversité et des écosystèmes ?
Certaines valeurs de la biodiversité ne peuvent être mesurées en termes économiques. Pour beaucoup de personnes, la nature a une valeur intrinsèque qui est indépendante de son utilité pour les humains. En outre, seulement une partie de la gamme complète des bénéfices fournis par la biodiversité et les écosystèmes peut être évaluée, en raison des limitations courantes dans notre compréhension en termes économiques des fonctions écologiques. Cependant, il existe maintenant une large évidence sur les valeurs marchandes et les valeurs non marchandes qui sont considérées par le public sur divers avantages de la biodiversité et des écosystèmes, et donc sur les coûts de leur perte. Le rapport présente les résultats d'une analyse préliminaire des coûts de la perte de services de biodiversité et d'écosystèmes des forêts sur la période 2000-2050. En prenant en compte les effets cumulatifs des pertes futures, la valeur nette des services des écosystèmes de forêts que nous perdons tous les ans est estimée entre 1.35 trillion et 3.1 trillions d’Euros, pour des taux d'escompte respectivement de 4% et de 1%.
Les tendances actuelles sur terre et dans les océans démontrent les dangers graves que la perte de biodiversité pose à la santé et au bien-être des personnes. Le changement climatique aggrave ce problème. Et, une fois de plus, ce sont les pauvres du monde qui sont les plus exposés à la disparition continue de la biodiversité. Ils sont les plus dépendants des services des écosystèmes, qui sont minés par des erreurs défectueuses d'analyse économique et de politiques.
"Les pauvres du monde portent la charge la plus lourde," écrit Pavan Sukhdev, qui est un haut responsable de la Deutsche Bank en Inde. Ainsi, dans les pays pauvres, la perte de biodiversité représente chaque année la moitie de leurs richesses économiques. Selon les experts, la déforestation dans le monde, outre de favoriser l'extinction des espèces, est responsable de 20% des émissions de dioxyde de carbone (CO2), soit davantage que toutes les industries de transport. Un mammifère sur quatre, un oiseau sur huit, un tiers des amphibiens et 70% des plantes sont menacés de disparition sur terre, selon la liste rouge publiée par l'Union mondiale pour la nature (UICN).
Ce constat alarmant a été rappelé par le secrétaire exécutif de la Convention Biodiversité à l’occasion de la journée mondiale de la biodiversité. Le mercredi 28 mai, à l’ouverture à Bonn du débat ministériel de haut niveau de la CdP, la chancelière Allemande Angela Merkel a souligné le lien intrinsèque entre l’éradication de la pauvreté et la conservation de la biodiversité, et a annoncé une nette augmentation de la contribution allemande pour la protection mondiale des forets et des écosystèmes entre 2008 et 2012. Le gouvernement allemand a lancé l’Initiative Life Web, une initiative mondiale qui vise à soutenir le programme de travail de la CDB sur les aires protégées, à travers le renforcement des partenariats à l’échelle mondiale et les engagements volontaires des États, en vue de désigner de nouvelles aires protégées et d’améliorer la gestion de celles qui existent. Les ministres de l’Environnement des pays Parties sont invités à annoncer des engagements concrets et si possible quantifiables en faveur de la biodiversité.
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