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Bulgarie : le genre et les changements climatiques – un lien absent, un débat à provoquer


Par Jivka Marinova, GERT, Bulgarie

 

Pendant les deux dernières décennies Les pays de l'Europe de l'Est se sont heurtés au triple défi des changements économiques et politiques, la vulnérabilité aux hasards de l'environnement et l'impacte du changement global du climat. Et si les changements économiques et politiques sont plus ou moins soumis à la volonté des gens et diffèrent d'un pays à l'autre, la vulnérabilité aux hasards de la nature ne connaît pas de frontières dans le temps et l'espace. Mais en plus des défis mentionnés, les changements climatiques pourrait présenter des opportunités et des menaces pour l'environnement et les ressources naturelles aussi bien que pour les gens. Bien que dans les pays de l'Europe de l'Est les changements climatiques ne sont pas considérés comme un problème à résoudre immédiat, leur impact est de plus en plus reconnu comme l'importance de la pollution, des désastres naturels et l'importance de l'efficacité énergétique. Et si on parle déjà de plus en plus souvent d'économiser l'énergie dans toutes les sphères de la vie y compris la cuisine a la maison et la voiture personnelle, on entend rarement mentionner la composante " point de vue femme " ou " égalité de genre " dans ce débat naissant. On est loin encore de penser aux changements climatiques globalement et à y associer l'impact différant sur les femmes et les hommes malgré les recherches et les preuves existantes.

 

L'approche genre absente

Où en sont les femmes et l'inégalité de genre existante dans ce débat naissant ? Les femmes ont-elles une influence sur le changement climatique ? Ont-elles un rôle à jouer sur les décisions pour atténuer les effets de ce changement ? C'est difficile de répondre si on ne considère pas le genre et les changements climatiques comme intrinsèquement liés. Donc il faut associer les femmes au débat pour trouver une réponse valable. Partant du fait que les personnes les plus vulnérables et les plus pauvres sont les premières victimes du changement climatique, il est facile de mettre en relief les effets dévastateurs du climat sur les femmes, regroupées dans ces catégories. Pourtant, le mode de vie des femmes a moins d'impact sur ce changement que celui des hommes. En même temps les femmes ont su développer des connaissances afin de contrer les effets néfastes sur l'agriculture, la collecte de l'eau et du bois de chauffe. Elles sont aussi les premières a s'organiser pour sauver ce qui reste de la nature.

 

On revient toujours à l'exemple des pays d'Afrique

Et voila, on est toujours sur ce point de départ : quand on traite la question de l'influence des changements climatiques sur la population et spécifiquement l'influence différente sur les femmes et les hommes, on a tendance de prendre toujours les mêmes exemples des pays d'Afrique et le monde en développement, plutôt que le monde développé. Mais il ne faut pas oublier que le monde développé est responsable pour la dégradation de la nature dans les pays en développement. En Europe, l'utilisation des ressources et la production de déchets continuent d'augmenter. Bien que l'extraction des ressources au sein de l'Europe ait été stable au cours de la dernière décennie, la dépendance sur les importations est en hausse. Les problèmes écologiques associés à l'extraction et au traitement de nombreux matériaux et ressources naturelles se déplacent de l'Europe vers les pays exportateurs concernés. Par conséquent, les impacts de la consommation et de l'utilisation des ressources en Europe sur l'environnement dans d'autres régions dans le monde sont en augmentation. Donc même si les pays du Nord sont les grands responsables de la pollution et ses effets sur le climat, et si les pays de l'Est s'y associent très vite, ceux qui souffrent le plus sont les populations des pays en développement, les femmes comme les plus pauvres.

 

Retour à l'Est - l'impact différent du climat sur les femmes

Si les femmes de l'Est dans leur majorité ne souffrent pas de l'inconvenance de la collecte d'eau, de bois et d'autres ressources indispensables à la survie, elles n'en souffrent pas moins des effets des changements climatiques. C'est dans leur santé qu'elles sont touchées le plus gravement. La pollution presque incontrôlée, le manque de culture de nourriture et le système de la santé étant en crise permanente font de sorte que les vulnérables deviennent encore plus vulnérables. Bien que le climat en Bulgarie soit plutôt doux et tempéré, pendant les années dernières on a vu des inondations et des tempêtes détruisant les maisons dans les petits villages un peu partout dans le pays. Vu que la population villageoise est composée surtout de vieilles personnes, habitant toutes seules et ce sont dans la majorité des femmes seules il est facile de voir a quel point elles sont affectées par les changements de la nature. Les températures de plus en plus hautes mettent en danger aussi la production des petites fermes personnelles qui sont la source principale de nourriture dans les villages. Les gens qui y travaillent sont surtout des femmes, de vieilles femmes souffrant de hypertonies et autres maladies causées par l'age et le climat changeant. Le rapport " L'Environnement en Europe - état et perspectives 2010 " montre que les femmes sont beaucoup plus touchees par la hausse des températures en été que les hommes. Dans les villes les femmes sont celles qui utilisent le plus le transport public qui, a l'exception du metro n'est pas climatisé. En été il ressemble à un aquarium, en hiver, bien que froid se transforme en nid de contagion des grippes. Il n'est pas donc nécessaire de vivre dans un pays en développement pour souffrir des changements climatiques. Le plus triste c'est le manque total de débat public non seulement sur le genre mais aussi sur l'influence de toute activité humaine sur la nature et donc sur le climat. Le profit a tout prix et le développement économique étant une priorité absolue pour le gouvernement, les gros projets d'infrastructure et de production d'énergie laissent en plan arrière les programmes de protection de l'environnement et la modernisation viable du système de la santé publique. Si au début de la démocratisation le mouvement écologiste était au front des changements politiques mettant en évidence le manque de politique de protection de la nature et de la population contre l'invasion de l'industrie souvent perdante et ineffective, a présent ce mouvement même s'est affaibli dilué et a cédé la place aux activités rares des organisations non gouvernementales. Celles la font de leur mieux pour garder la flamme allumée, mais ce n'est pas suffisant. Depuis 2005, toutes les années au début du mois de décembre ces organisations entreprennent des démonstrations pour le Jour Mondial d'Action contre les changements climatiques. Ces démonstrations sont accompagnées d'expositions en plein air, de discours, de présentations du travail des ONGs, de concerts et le plus important - de l'intérêt des media. Le Jour d'Action de 2006 avait plus de public que le jour de 2005. En 2007 les citoyens de Sofia ont assisté à un Art Show et des débats publics dans les centres populaires de débat comme " La maison Rouge ". Le spectacle était centré sur les mesures faciles à mettre en oeuvre par les citoyens eux-mêmes et qui en même temps étaient économiquement viables et durables. Les spectateurs ont entendu de l'information sur les sources d'énergie renouvelable, la contre productivité des agro essences, l'agriculture organique non intensive, les principes essentiels de l'économie écologique etc. Les organisateurs ont voulu créer un forum d'échange d'idées entre les autorités, les institutions et la société civile pour générer ou stimuler des actions effectives contre les effets du changement climatique. En 2008, le Jour d'action a été commémoré par une exposition sur les sources d'énergie durable pour la Bulgarie. L'expo a été montée au centre de la ville en face du Parlement. En 2009, le Jour d'action a été célébré par des activités sportives à l'entrée du plus grand parc de Sofia. Les activités étaient orientées vers le Sommet a Copenhague et les politique de mitigation et adaptation au changements climatiques. L'année dernière, 2010, a vu une démonstration sous le slogan " Pari équitable " suivi de dix jours de campagne continuelle pour plus d'actions et de ressources pour sauver la terre de ses habitants intelligents. C'est clair qu'avec des actions sporadiques et des ressources restreintes il est difficile d'avoir des résultats tangibles. En plus en aucune de ces actions le genre n'a reçu la moindre attention. Le dernier programme de l'Etat bulgare traitant les changements climatiques date de 1997. Pourtant le temps en Bulgarie devient de plus en plus extrême. Les données climatiques nous montrent que les 15 ans plus chauds de la planète ont été pendant les derniers 20 ans. On voit chez nous des périodes secs de plus en plus longs, des tempêtes violentes presque tropiques, des inondations massives avec des victimes, ce qui n'était pas de coutume avant. Le climat devient plutôt méditerranéen, les terres au nord se désertifient et la neige diminue mais la quantité annuelle des précipitations augmente aussi bien que la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes. Plus généralement, Les prévisions pour l'Europe de l'Est montrent que les précipitations d'été vont diminuer ce qui apportera la pénurie d'eau et les risques pour la santé causes par les vagues de chaleur. La fréquence des incendies forestiers va augmenter - on a vu ce qui s'est passé en Grèce cet été et l'horreur des habitants d'Athènes devant les incendies avançant vers la ville. Le changement climatique est plus qu'une question d'efficacité énergétique ou d'émissions industrielles de carbone; c'est aussi une question de dynamique de la population, de pauvreté et d'équité de genre, a souligne le dernier rapport de l'UNFPA sur l'état de la population mondiale. Il avertit qu'il y aura un accroissement des mouvements de population découlant du changement climatique et il faut s'attendre a des flux migratoires influencés par des facteurs environnementaux. Une représentation plus grande des femmes dans la société civile, au cours des négociations formelles sur le changement climatique est une première étape cruciale, mais aussi les voix des femmes devraient être entendues... " Les gens causent le changement climatique, les gens en sont touchés, les gens doivent s'y adapter. Et seuls les gens peuvent l'arrêter " dit le rapport... j'ajouterai, si les femmes sont celles qui sont plus touchées par le réchauffement climatique et elles sont celles qui doivent s'y adapter pour que la race humaine survive il faut donner les moyens au femmes d'arrêter ce processus et utiliser au maximum leur sagesse et leurs ressources. Il est donc nécessaire d'intégrer à tous les niveaux le genre pour trouver des réponses durables et équitables aux conséquences désastreuses des changements climatiques. Les femmes, actrices du développement doivent être conviées aux tables de négociations pour mettre a disposition leurs capacités et leurs savoirs.

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