La Liste rouge de l’UICN, qui fête son 50ème anniversaire cette année, porte à 73 686 le nombre d’espèces évaluées, dont 22 103 sont menacées d’extinction.
"Au cours des cinquante dernières années, la Liste rouge de l’UICN a orienté le travail de conservation. Rares sont les actions positives qui ne s’appuient pas sur la Liste rouge, véritable point de départ des actions de conservation", affirme Julia Marton-Lefèvre, Directrice générale de l’UICN. "Cette réussite n’est pas sans importance, mais il reste encore beaucoup à faire. Nous devons absolument élargir nos connaissances sur les espèces au niveau mondial pour mieux appréhender les défis auxquels nous sommes confrontés, établir les priorités en matière de conservation mondiale et mettre en œuvre des actions concrètes pour enrayer la crise de la biodiversité".
L’évaluation mondiale des orchidées de la sous-famille des Cypripedioideae des zones tempérées de l’hémisphère nord, dont fait partie le fameux Sabot de Vénus, révèle que 79 % de ces plantes ornementales prisées sont menacées d’extinction. Leur disparition est en grande partie due à la destruction de leur habitat et à la cueillette excessive des espèces sauvages pour le commerce local et international, et ce, malgré le fait que le commerce international de toutes les espèces d’orchidées de cette sous-famille soit réglementé. Avec ses fleurs caractéristiques en forme de pantoufle destinées à piéger les insectes pour assurer leur pollinisation, ces orchidées comptent parmi les plantes à fleurs les plus connues et emblématiques.
"Le plus surprenant dans cette évaluation, c’est le degré de menace qui pèse sur ces orchidées", souligne Hassan Rankou, de l’Autorité pour la Liste rouge de la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN (SSC) représentative du groupe de spécialistes des orchidées. "Les orchidées de la sous-famille des Cypripedioideae sont des espèces priséesdans le commerce horticole mondial, un secteur qui pèse plusieurs millions de dollars. Même si cette industrie est alimentée par des plantes issues de stocks cultivés, la conservation des espèces sauvages est vitale pour l’avenir de cette espèce."
Cypripedium lentiginosum, une espèce classée En danger ne compte plus que 100 spécimens dans le sud-est du Yunnan, en Chine, et dans la province de l’Ha Giang, au Vietnam. Une cueillette excessive et la déforestation ont conduit au déclin de cette espèce. Également classé En danger, le Cypripède de Dickinson (C. dickinsonianum) se rencontre uniquement dans certaines populations isolées au Mexique, au Guatemala et au Honduras. Son habitat naturel, les forêts claires, est détruit pour les besoins de l’agriculture et à cela s’ajoute l’élagage des arbres qui change les conditions environnementales permettant aux orchidées et aux autres plantes des sous-bois de bien se développer.
Cette mise à jour de la Liste rouge de l’UICN vient confirmer les rapports selon lesquels 94 % des lémuriens sont menacés d’extinction. Parmi les 101 espèces de lémuriens existantes, 22 sont En danger critique, dont la plus grande espèce vivante de lémuriens, l’Indri de grande taille (Indri-Indri), et 48 sont En danger, notamment le plus petit primate du monde, le microcèbe de Mme Berthe (Microcebus berthae). Au total, 20 espèces sont classées comme Vulnérables. Les lémuriens comptent ainsi parmi les groupes de vertébrés les plus menacés de la planète.
Les lémuriens sont principalement menacés d’extinction en raison de la destruction de leur habitat naturel, la forêt tropicale de Madagascar, où l’instabilité politique et la pauvreté croissante ont accéléré l’exploitation illégale du bois. Récemment, la chasse de ces animaux pour se nourrir est également devenue une menace majeure.
"Malgré l’accentuation des menaces déjà lourdes qui pèsent sur les lémuriens, causée par la crise politique qui secoue Madagascar, nous pensons qu’il y a encore lieu de garder espoir", affirme le Professeur Christoph Schwitzer, Vice-président pour Madagascar du Groupe de spécialistes des primates de la SSC de l’UICN et Directeur des programmes de conservation de la Société zoologique de Bristol. "Les succès antérieurs démontrent que la collaboration entre les communautés locales, les organisations non gouvernementales et les chercheurs peut mener à protéger efficacement les espèces de primates en péril. Nous invitons d’urgence tous les acteurs à unifier nos efforts pour préserver les lémuriens et la richesse biologique, culturelle et économique qu’ils représentent."
L’anguille du Japon (Anguilla japonica), un mets fin traditionnel japonais et le poisson de consommation le plus cher du pays, a été classée « En danger » en raison de la perte de son habitat, de la surpêche, mais aussi des obstacles à la migration, de la pollution et des modifications des courants océaniques. L’Asie de l’Est est la plaque tournante de l’élevage, de la commercialisation et de la consommation de cette espèce. Son déclin s’est traduit par l’augmentation de la commercialisation d’autres espèces d’anguilles, notamment de l’anguille à nageoire courte (A. bicolore).
"Alors que la situation concernant cette espèce est préoccupante, l’évaluation de l’anguille du Japon et des autres anguilles représente un premier pas extrêmement important", affirme le Professeur Matthew Gollock, Président du sous-groupe de spécialistes des anguillidés de l’UICN. "Cette information nous permettra de prioriser les efforts de conservation des espèces d’anguilles et de façon plus générale desécosystèmes d’eau douce dont ces espèces dépendent."
L’actualisation de la Liste rouge de l’UICN comprend également la réévaluation de la mascotte de la Coupe du Monde 2014 de la FIFA, le tatou à trois bandes du Brésil (Tolypeutes tricinctus). Le nombre de spécimens de cette espèce aurait décliné de plus d’un tiers au cours des 10 à 15 dernières années, en raison d’une perte de 50 % de son habitat, la fruticée sèche de la Caatinga. Elle conserve donc son statut d’espèce Vulnérable.
La fleur nationale des îles Caïmans, l’orchidée Wild banana (Myrmecophila thomsoniana), a été évaluée pour la première fois et a fait son entrée dans la catégorie En danger. Les orchidées Wild banana sont présentes dans les forêts sèches et la fruticée des trois îles de l’archipel des Caïmans, mais sont menacées par la disparition accélérée de leur habitat au profit de la construction de logements et du développement du tourisme. La protection d’un habitat convenable sur les trois îles de l’archipel constitue l’action de conservation la plus urgente en faveur de cette espèce.
La Fougère du Gouverneur Laffan (Diplazium laffanianum) est une fougère relativement grande que l’on trouvait habituellement dans les grottes et les crevasses rocheuses des Bermudes. Désormais, cette espèce est considérée officiellement comme Éteinte à l’état sauvage, suite à la destruction de son habitat par les activités humaines et l’introduction d’espèces exotiques envahissantes. Elle a été vue pour la dernière fois en 1905.
La mise à jour met en exergue la réinsertion d’une espèce de poisson grâce aux mesures de conservation menées sous l’égide de l’Autorité israélienne de protection de la nature et des parcs nationaux. Le statut de l’ablette du Yarkon (Acanthobrama telavivensis), une espèce présente uniquement en Israël, s’est considérablement amélioré, passant de Éteinte à l’état sauvage à Vulnérable. L’augmentation de la fréquence des épisodes de sécheresse et l’extraction de l’eau pour l’irrigation ont conduit à la destruction du seul habitat qui lui restait dans la rivière Yarkon et dans le ruisseau Tut. L’espèce a été sauvée en transférant 120 des derniers poissons sauvages dans une installation prévue par le programme d’élevage en captivité de l’Université de Tel-Aviv. En 2006, 9 000 ablettes du Yarkon nées en laboratoire ont été réintroduites dans un habitat restauré, dans la rivière Yarkon et dans d’autres rivières d’Israël. Huit ans plus tard, leur population a augmenté considérablement.
"Même si la Liste rouge de l’UICN est à chaque fois l’occasion de célébrer quelques réussites en matière de conservation, au vu de la situation actuelle, un long chemin reste encore à parcourir pour atteindre les objectifs de la Convention sur la diversité biologique à l’horizon 2020, date limite que se sont fixée près de 200 gouvernements pour enrayer le déclin de la biodiversité et éviter l’extinction des espèces", affirme Jane Smart, Directrice du Programme mondial de l’UICN pour les espèces. "Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de ne pas tenir ce délai".
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