L’organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) s’est prononcé aujourd’hui en faveur de l’Union européenne. Il a confirmé les conclusions, présentées par le groupe spécial en mars 2014, selon lesquelles les restrictions à l’exportation imposées par la Chine sur certaines terres rares, le tungstène et le molybdène sont contraires aux règles de l’OMC. Donnant gain de cause à l’Union, ainsi qu’aux États-Unis et au Japon, également à l’origine de la plainte, l’OMC a constaté que les droits d’exportation et les contingents fixés par la Chine n’étaient pas justifiés par des raisons de protection de l’environnement ou d’application d’une politique de conservation.
Karel De Gucht, commissaire européen au commerce, a estimé que cette décision marquait un «nouveau tournant dans les efforts déployés par l’Union pour garantir à son industrie un accès équitable aux matières premières dont elle a le plus grand besoin». «C’est un signal fort, qui montre que des restrictions des exportations ne peuvent pas être utilisées pour protéger ou favoriser une industrie nationale au détriment de ses concurrents étrangers. Je compte maintenant sur la Chine pour aligner rapidement son régime d’exportation sur les règles internationales, comme elle l’a fait pour d’autres matières premières en vertu d’une décision précédente de l’OMC», a ajouté le commissaire.
En 2012, la Chine a perdu une autre affaire portée conjointement devant l’OMC par l’Union, les États-Unis et le Mexique concernant des restrictions à l’exportation de matières premières, restrictions qu’elle a ensuite levées. Toutefois, elle n’a pas levé des mesures similaires, des contingents et des droits d’exportation, s’appliquant à d’autres matières premières telles que le tungstène, le molybdène et certaines terres rares, de sorte que l’Union et les autres plaignants n’ont pas eu d’autre choix que de saisir à nouveau l’organe de règlement des différends de l’OMC.
La Chine a défendu ses restrictions à l’exportation de terres rares comme faisant partie de sa politique environnementale et de conservation. Or, le verdict rendu aujourd’hui par l’OMC est clair: des restrictions à l’exportation ne peuvent être instituées pour préserver des ressources naturelles non renouvelables si la production ou la consommation de ces matières premières n’est pas limitée pour la même raison à l’échelle nationale.
Ni les plaignants ni le groupe spécial de l’OMC ne contestent le droit de la Chine de mettre en place des politiques de conservation. Toutefois, comme le groupe spécial de l’OMC l’a précisé, le droit souverain dont dispose un pays sur ses ressources naturelles ne l’autorise pas à contrôler les marchés internationaux ou la répartition mondiale des matières premières. Un membre de l’OMC peut décider du niveau ou du rythme d’utilisation de ses ressources, mais une fois que les matières premières sont extraites, elles sont soumises aux règles commerciales de l’OMC. Le pays d’extraction ne peut pas instituer des restrictions s’appliquant uniquement aux utilisateurs étrangers.
Contexte
Les matières premières concernées correspondent à plusieurs terres rares, ainsi qu’au tungstène et au molybdène. Elles sont utilisées dans un large éventail d’applications dans les secteurs des produits écologiques et de haute technologie, de la construction automobile et de machines, des substances chimiques, de l’acier et des métaux non ferreux.
Les restrictions à l’exportation imposées par la Chine prennent essentiellement la forme de contingents et de droits d’exportation, ainsi que d’exigences et de procédures supplémentaires applicables aux exportateurs. Elles désavantagent nettement les industries étrangères en gonflant artificiellement les prix à l’exportation de la Chine et en faisant monter les prix mondiaux. Ces restrictions abaissent aussi de manière artificielle les prix des matières premières sur le marché chinois en augmentant l’offre au niveau national. L’industrie chinoise bénéficie donc d’un avantage concurrentiel, poussant les producteurs étrangers à transférer leurs activités et technologies en Chine.
L’Union, les États-Unis et le Japon ont lancé une procédure de règlement des différends devant l’OMC en mars 2012. Les premières consultations menées avec la Chine n’ont pas permis de trouver une solution à l’amiable. L’OMC a donc mis en place un groupe spécial en juin 2012. Le rapport du groupe spécial a été publié le 26 mars 2014, donnant pleinement gain de cause à l’Union et aux autres plaignants. La Chine a fait appel de ce rapport le 25 avril 2014. Les rapports seront adoptés par l’organe de règlement des différends de l’OMC dans un délai de 30 jours et la Chine devra se conformer à la décision immédiatement ou dans le délai raisonnable qu’elle peut solliciter pour la mise en œuvre.
http://www.wto.org/french/news_f/news14_f/431_432_433abr_f.htm
http://europa.eu/rapid/press-release_IP-14-912_fr.htm
[VEIJURIS]
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