Fondateur de La Compagnie du Vent. Président de SUNTI et MGH.
Il fait partie de ceux qui agissent concrètement pour une vie plus écologique donc moins polluante. Ingénieur de formation, il a gardé des années 70 quand il faisait ses études (filière doctorale de physique de l’énergie, mention énergies renouvelables), le goût de l’indépendance et une farouche envie de trouver des solutions au tout pétrole, au tout nucléaire. Passionné de voile depuis l’enfance, il a fait du vent son allié pour naviguer dans la vie comme sur la mer. C’est un homme libre et déterminé qui nous livre son analyse sur l’écologie aujourd’hui en 2015 :
« Aujourd’hui on sait très bien que la seule solution pour préserver la planète, c’est de laisser les ressources pétrolières là où elles sont, de ne pas chercher à les sortir. La position française qui interdit les gaz de schistes est une position qui me convient parfaitement.
L’actualité de l’écologie ce sont les gaz à effet de serre qui provoquent les modifications des climats dues au réchauffement climatique. L’homme est évidemment à l’origine de ça et c’est la production d’énergie qui est le plus gros impactant sur le réchauffement climatique, avec l’utilisation massive des énergies fossiles. Il y a beaucoup de sources de gaz carbonique dans l’univers qui ne sont pas liées aux activités humaines, mais celles liées aux énergies fossiles sont fatales. Vous imaginez bien que je ne suis pas un climatosceptique ».
« Je ne suis pas un écologiste alarmiste, l’homme sait faire, l’humanité a du génie… »
Alors que la conférence des nations unies pour le climat (COP21) s'est ouverte à Paris fin novembre 2015, Jean-Michel Germa reste prudent avec l’engagement du politique pour l’écologie. « La conscience écologique ? elle n’est pas encore au niveau politique, elle ne fait pas partie du raisonnement de toute décision politique et économique ! Or aujourd’hui toute décision politique et économique devrait être prise sous la contrainte de la protection de l’environnement. Et on va y arriver. Les Sarkozy, Chirac et Hollande sont des productivistes, pour eux la production, la maîtrise de la force, de la puissance pour satisfaire le besoin humain et pour dominer la nature et l’homme, c’est simplement du productivisme. Aujourd’hui on vit dans une société qui est dominée par un certain nombre de lobbys, de forces plus importantes que d’autres, le pétrole et le nucléaire en sont les principales. La transition va se faire de telle sorte que les politiques et les gens qui ont le pouvoir économique du nucléaire prendront petit à petit le pouvoir des énergies renouvelables ».
« On consomme beaucoup plus d’énergie que ce qu’on pourrait en consommer pour satisfaire les besoins que l’on a. Je n’ose même pas vous dire qu’il va falloir réfléchir à modifier nos comportements. Pourtant actuellement, les gens chauffent beaucoup moins qu’avant, il y a donc eu modification du comportement qui ne s’est pas faite au préjudice des personnes qui modifient leur comportement. Ça peut être très bénéfique de vivre à 19 voir 20 degrés l’hiver.
Je ne suis pas un écologiste alarmiste, l’homme sait faire, l’humanité a du génie, sait avancer, le tout c’est que la bonne foi, l’honnêteté intellectuelle, la conscience, soient suffisamment fortes pour endiguer les lobbys de pouvoir, financiers, politiques, pour que petit à petit les choses se fassent.
Je suis en ce moment dans un univers qui est malveillant (il fait référence aux conflits – procédures en cours – qui l’opposent à Engie ex GDF-Suez, actionnaire majoritaire de la compagnie du vent qu’il a créée) alors que j’ai été dans un univers bienveillant, celui de la création scientifique, de l’entreprise, où j’ai vécu des années extraordinaires où j’imaginais que la loi du talent s’exerçait. Il suffisait de faire les choses, d’avoir les bonnes idées, de les mettre en œuvre pour que ça avance, et c’est vrai, ça existe, je l’ai vécu. Mais vous pouvez tomber dans des endroits qui sont contigus, vous passez de l’un à l’autre sans vous en rendre compte, ou règne une loi de l’omerta, de la jalousie, du plus fort, de la carrière, de l’augmentation du capital, de la duplicité etc., et ces mondes se côtoient. Je pensais que la loi du talent prévalait sur la loi du plus fort, et j’avoue m’être égaré dans une démarche honnête avec des individus qui fonctionnent selon des modalités ou l’honnêteté n’est pas une fondation, mais juste un accessoire de COM. Je n’avais pas la connaissance de la loi française qui encourage ce genre de comportement et si nous avions été en Allemagne ça ne se serait pas passé comme ça ».
Jean-Michel Germa en vient à parler de sa vision du capitalisme :
« Le capitalisme n’a pas vocation à faire du commerce, il sert à augmenter la rotation du capital pour augmenter les revenus du capital, et une des bonnes manières de le faire c’est de commercer en vendant des produits dont les gens n’ont pas besoin. Et comme ils n’en ont pas besoin « on » va vendre en plus un système qui consiste à faire la promotion de ces produits et services dont personne n’a vraiment besoin. On en arrive à l’écologie, aux choses qui sont nécessaires et celles qui ne le sont pas. Le commerce éthique est un commerce qui consiste à répondre à un besoin, celui là il est bon, le commerce qui consiste à répondre à la rotation du capital pour augmenter le profit de ceux qui ont du capital, celui là il est dangereux.»
« Je pense que le monde manque de personnes bienveillantes ».
« Aux jeunes je leur dis, crois en toi, crois en la possibilité que les hommes ont de vivre pas trop malheureux. Le bonheur, ce n’est pas toujours plus, plus loin, plus grand, plus fort ; le bonheur, il est dans les interstices de la vie, il est un peu partout et parfois on ne le voit pas. Moi je suis préservé des besoins matériels, ça ne me donne pas des joies infinies ».
Pour Jean-Michel Germa, il y a trois grands sujets sur lesquels nous devons nous centrer, la transition énergétique l’eau et les déchets :
« Le passage de la transition énergétique du tout fossile et nucléaire au 100 % renouvelable c’est évidemment faisable. Le scénario Négawatt est une voie sérieuse qui méritera d’être traduite pour le grand public. On s’intéresse aux gaz à effet de serre, aux énergies, aux OGM, aux pesticides et aux molécules de la chimie qui sont partout, ce sont des vrais grands problèmes mais l’eau c’est un grand problème qui est en train de naître. L’eau n’est pas perçue dans nos sociétés développées comme un problème, parce qu’elles se sont développées là où il y avait de l’eau justement. La fonte des glaciers due aux changements climatiques fait que le Rhône est en train de s’assécher et son débit à la fonte des neiges a considérablement baissé. Or ce fleuve est en équilibre entre ce qu’il offre et la demande, on y puise toute l’eau nécessaire pour irriguer, fabriquer des produits, alimenter les personnes. Aujourd’hui on considère avec la baisse du niveau hydrique que le Rhône ne va plus pouvoir fournir la demande, l’offre sera inférieure à la demande. Le problème de nos pays développés ce sera bientôt le problème de l’eau. Actuellement on traite les problèmes dont on parlait il y 20 ans, l’énergie par exemple.
L’ingénieur chercheur aérodynamicien spécialiste de la couche limite atmosphérique a fait du chemin depuis les années 80 quand il réfléchissait avec son ami Richard Perez aux différents process d’énergies renouvelables. « Je suis parti aux Etats-Unis rencontrer tous les exploitants d’éoliennes et j’ai étudié la productivité des parcs pour connaître par exemple le taux de pannes des machines. Rentré en France j’ai commencé à chercher des sites avec mes boussoles et mes cartes d’état major tout en réalisant des études pour l’ADEME ».
Il créera plus tard La Compagnie du Vent (début des années 90), pionnière française de l’énergie éolienne. L’aventure de l’énergie éolienne française sera conduite par cette entreprise.
Il faudra sûrement compter sur lui dans les années qui viennent pour faire avancer les énergies de la croissance écologique. Il développe actuellement deux sociétés, SUNTI (Sunny Times for Industry) créée pour produire de chaleur d’origine solaire permettant aux industries et services grands consommateurs de chaleur de diminuer jusqu’à 50% leur consommation d’énergie fossile et MGH, une solution innovante de stockage massif d’électricité en mer.
Pour conclure !?
« Je suis un industriel de l’écologie, un écologiste de l’industrie et j’observe que ce qui manque beaucoup à l’écologie ce sont des gens qui font les choses ; on en manque. Il y a beaucoup de gens qui parlent et c’est important. Il y a le faire, il y a aussi le savoir faire, le faire savoir et le faire connaître. Mais une fois que les gens ont pris conscience, après la parole, il est nécessaire d’agir. »
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