Entre le "produire plus et pas cher" de l'après-guerre et le "produire mieux et durable" d'aujourd'hui, l’agriculture est à la croisée des chemins. Christian Huyghe analyse les verrous de l'ancien modèle et les leviers disponibles pour permettre à l'agriculture de remplir son nouveau contrat social.
Pour que les choses bougent, plusieurs approches sont possibles, comme l’ont conceptualisé les chercheurs Stuart B. Hill & Rod J. MacRae à qui l’on doit une grille d’analyse permettant d’évaluer le degré de changement d’un système, selon trois grands niveaux.
Il y a d’abord l’« efficience » : on ne change rien radicalement mais on essaie d’améliorer l’existant, en ajustant chaque composante d’un système. Vient ensuite la « substitution » : on part d’une même organisation en explorant les bénéfices permis par une substitution à l’une ou l’autre des composantes d’un système. Enfin, la « reconception » : tout le système est repensé.
Prenons l’exemple de la gestion des mauvaises herbes pour la production de colza d’hiver (semé à la fin de l’été). On peut régler au mieux le pulvérisateur pour réduire au maximum la quantité d’herbicides nécessaires (efficience). On peut, en adaptant l’écartement des rangs, utiliser le désherbinage, qui combine désherbage mécanique et traitement chimique sur le rang (substitution). Enfin, on peut semer le colza d’hiver avec des légumineuses gélives (reconception). Dans ce dernier cas, les légumineuses vont s’installer rapidement en automne, empêchant ainsi la croissance des mauvaises herbes, puis elles vont geler en hiver, laissant le sol propre et permettant au colza de se développer. À noter que dans ce dispositif, les légumineuses gelées vont libérer de l’azote favorable à la croissance du colza et empêcher la survenue en automne d’un insecte, la grosse altise. Cela permet donc aussi d’éviter un traitement insecticide...
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