Depuis quelques décennies, on constate que les camerounais présentent une certaine propension à consommer les produits du terroir. Est-ce par manque de moyen ou par un souci de valorisation des produits locaux ? Enquête à travers les rues de Yaoundé la capitale politique.
Lorsqu’on parcourt les rues de Yaoundé, on remarque que des vendeurs de produits vivriers locaux et des boissons locales sont installés en bordure de route. Il s’agit des vendeurs de banane plantain, de banane douce, de manioc, de macabo, de bâtons de manioc, de vin de palme (encore appelé vin blanc) ou d’ « odontol », une boisson, dry djin en son genre, résultant de la distillation du vin de palme.
L’historique.
Sous le règne du Président Amadou Ahidjo, l’odontol était proscrit à partir de sa distillation. Tous ceux qui enfreignaient cette loi étaient systématiquement poursuivis au point où les autorités organisaient des perquisitions pour traquer tous ceux qui se livraient à cette activité ou alors qui étaient soupçonnés de la faire. La raison de cette interdiction était liée au fait que la teneur en alcool de l’odontol était trop forte et qu’il contenait même de l’éthanol. Il fallait alors sauvegarder la santé et même la vie des citoyens.
Pourtant, beaucoup de fils de paysans n’ont pu aller à l’école qu’en la faveur de la distillation de l’odontol par leurs parents qui étaient contraints de séjourner en brousse pendant leur activité et ne retournaient au village que pour en assurer la vente, discrètement.
Avec l’accession du Président Paul Biya à la magistrature suprême, il y a eu un relatif assouplissement de la loi qu’on finira même par ne plus appliquer depuis la décennie 90, lorsque la crise a fortement frappé le pays provoquant du même coup une baisse drastique des salaires et une paupérisation des masses laborieuses. Le Président Paul Biya a alors personnellement invité ses concitoyens à « consommer camerounais ».
Retour aux sources et risques de dérives.
C’est ainsi qu’on a pu vivre un retour aux sources. Les camerounais se sont mis à consommer les produits de chez eux. Auparavant, ils avaient honte de le faire. Une espèce de snobisme qui consistait à penser que ceux qui consommaient ces vivres étaient des arriérés ou alors des pauvres. On avait honte d’acheter, sous le regard des autres, son bâton de manioc pendant qu’on était fier de se montrer dans la rue achetant du pain. De même qu’on avait honte de boire du vin de palme ou de l’odontol. Aujourd’hui, les camerounais consomment ces produits en bordure de route. Ces boissons sont même très prisées lorsqu’elles sont bio.
Seulement, pour ce qui concerne le vin de palme et l’odontol, on n’est pas toujours sûr de la qualité. Ces produits sont de conservation difficile et on ne saurait les recueillir en abondance. C’est ainsi que certains vendeurs, mus par l’appât du gain, font souvent des mélanges qui créent des coliques et d’autres énormes problèmes de santé.
S’il est bon de consommer bio, il n’en demeure pas moins qu’il faut s’assurer de la qualité de ce que l’on doit consommer. Le développement durable est aussi une affaire de santé. Et la santé c’est d’abord ce qu’on consomme.
A bon entendeur, salut !