Par Karin Rives
Rédacteur
Washington - Près d'un an après que les députés à la Chambre des représentants eurent adopté un projet de loi sur les changements climatiques, deux de leurs collègues du Sénat ont présenté à la chambre haute leur version de ce texte de loi. Si elle est adoptée, cette loi assurera une diminution spectaculaire des émissions de gaz à effet de serre aux États-Unis au cours des prochaines décennies.
" Nous sommes enferrés dans une politique énergétique dysfonctionnelle, bâtie sur une dépendance dangereuse à l'égard des importations pétrolières " a affirmé, le 12 mai, le sénateur démocrate du Massachusetts John Kerry alors qu'il dévoilait ce projet de loi en compagnie du sénateur indépendant du Massachusetts Joe Lieberman. " Nous sommes menacés par les effets d'un climat en évolution. Et voici maintenant que l'une des pires marées noires de l'histoire de notre pays échoue sur nos rivages : qui pourrait douter de l'urgence d'une nouvelle politique énergétique pour notre pays ? "
Les groupes écologistes et les milieux industriels intéressés au premier chef par cette législation sont tenus en haleine depuis des mois, tandis qu'au Sénat les auteurs du projet de loi s'efforcent d'élaborer un texte ayant des chances de rallier la majorité des voix au sein d'un corps législatif politiquement divisé. Aux termes de la procédure législative fédérale, la Chambre et le Sénat produisent et adoptent normalement leurs versions respectives d'une loi. Si ces textes sont adoptés, ils sont ensuite examinés en commission mixte, puis le texte définitif est repassé au scrutin des deux chambres avant d'être déposé sur le bureau du président des États-Unis aux fins de promulgation. Ce processus peut traîner de longs mois.
Les défenseurs de ce projet de loi espèrent pouvoir le faire adopter à temps pour les négociations climatiques de l'ONU qui doivent avoir lieu à Cancun (Mexique) au début de décembre. Mais la plupart des observateurs doutent que le Congrès puisse observer un tel calendrier.
" J'espère avoir une loi cette année ", a pourtant affirmé Todd Stern, l'envoyé spécial du président Obama pour les changements climatiques, cette semaine à la presse. " Mais si nous ne l'obtenons pas cette année, nous maintiendrons la pression pour l'obtenir l'année prochaine. "
M. Stern a ajouté que quelle que soit l'issue, le gouvernement Obama allait militer en faveur d'un nouveau traité international sur le climat. " Que cette loi passe ou non avant Cancun, nous travaillerons sans relâche pour obtenir de bons résultats à cette conférence ", a-t-il dit.
Les promoteurs de la loi estiment qu'une législation nationale, plutôt qu'une collection d'ordonnances et de réglementations des divers États fédérés, représente ce dont les États-Unis ont besoin pour s'attaquer sérieusement aux émissions sur leur territoire et pour accroître la confiance de la communauté internationale sur ce dossier. Les détracteurs de la loi estiment que cette dernière n'aurait pour effet que de faire perdre des emplois et augmenter les prix de l'énergie aux États-Unis, affaiblissant d'autant plus leur économie.
Il appartient à présent à Harry Reid, le chef de la majorité au Sénat, de décider de placer ou non l'examen et le vote du projet de loi climatique à l'ordre du jour du Sénat cette année. Démocrate du Nevada, M. Reid a indiqué qu'après avoir consulté divers collègues, il serait en mesure de savoir au début de juin si ce projet de loi paraissait avoir un appui suffisant pour qu'on puisse engager le débat. Soixante voix seraient éventuellement nécessaires pour mettre fin à une manouvre dilatoire de la part des adversaires de la loi, le fameux " filibuster ", opération consistant à prolonger un débat indéfiniment en vue de bloquer ou de retarder un vote sur un texte de loi ou sur une nomination.
On apprend que M. Lindsey Graham, sénateur républicain de Caroline du Sud, après avoir collaboré avec les sénateurs Kerry et Lieberman à propos du projet de loi, vient d'annoncer qu'il ne l'appuierait plus. Cela rendra d'autant plus difficile l'obtention d'un nombre suffisant de voix républicaines favorables pour faire passer le projet de loi, puisque le Sénat compte actuellement 59 démocrates et indépendants de tendance démocrate. A cela il faut ajouter un second contretemps, la marée noire qui ne cesse de se déverser dans le golfe du Mexique, catastrophe écologique qui a provoqué une levée de boucliers contre les forages en mer qui sont l'un des éléments importants de la loi du Sénat.
En voici d'ailleurs les principaux éléments :
. la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 4,75 % par rapport à leur niveau de 2005 d'ici à 2013, de 17 % d'ici à 2020, de 42 % d'ici à 2030 et de 83 % d'ici à 2050. La Chambre avait présenté des chiffres du même ordre.
. la mise en place d'incitations économiques pour stimuler la construction de nouvelles centrales nucléaires, y compris une assurance contre les risques pour 12 centrales,
. l'imposition de plafonds d'émissions de gaz carbonique (CO2) à certains secteurs de l'économie. La Chambre visait à l'ensemble de l'économie.
. l'obtention obligatoire par les producteurs d'énergie électrique de " droits de pollution " échangeables, d'ici à 2013, d'abord gratuits puis dans le cadre d'enchères. D'autres usines se joindraient à ce marché en 2016.
. l'encouragement aux forages en mer, les États fédérés côtiers ayant cependant droit de veto sur tout projet de forage situé à moins de 120 kilomètres de leurs côtes. Le texte de la Chambre de contient pas une telle promotion des forages en mer.
. l'affectation de 2 milliards de dollars par an à la recherche et à la mise au point de moyens techniques de capter les émissions de carbone des usines fonctionnant au charbon. Le projet de la loi de la Chambre prévoyait 1,1 milliard de dollars.
Pendant ce temps, les divers États fédérés se sont attelés à l'élaboration de leurs propres lois en l'absence d'action rapide du Congrès fédéral. Le gouvernement Obama, lui aussi, poursuit une panoplie d'initiatives climatiques par la voie réglementaire depuis plus d'un an, en vue notamment d'élaborer des normes de consommation de carburant touchant les voitures particulières et les camionnettes.
Source : "America.Gov" Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat.
Site Internet : http://www.america.gov/fr/
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