Dans quelques semaines, les autorités gouvernementales du Québec rendront publique l'étude d'impact sur l'environnement (EIE) déposée il y a quelques jours par la corporation minière Osisko pour son projet Canadian Malartic (Abitibi-Témiscamingue). Cette diffusion publique permettra à plusieurs associations de déclencher la procédure conduisant à la mise en action du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE). Les citoyens, les mouvements sociaux et les associations environnementales auront la possibilité de s'exprimer sur un projet minier.
Sur une vingtaine de projets d'exploitation minière menés depuis 1994, les registres publics nous informent que seulement 4 d'entre eux seraient passés par une EIE publique. Seulement 2 projets miniers ont connu une audience publique du BAPE en 30 ans (Oka et lac Bloom).
Le projet d'exploitation d'une mine à ciel ouvert que désire développer Osisko est tel qu'il est parvenu à franchir le seuil de 7000 tonnes de minerai extraites par jour, au-dessus duquel les entreprises n'ont d'autres choix que de rendre publique leur EIE.
Il faut rappeler que le projet Osisko à Malartic propose d'extraire l'un des plus grands gisements aurifères à faible teneur de toute l'histoire du Canada. Inséré en plein milieu urbain, le projet devra déplacer pas moins de 200 habitations et 5 institutions publiques pour laisser la place à un grand trou dont sortira à lui seul au moins 3 à 5 fois plus de résidus miniers que l'ensemble des 9 mines exploitées en Abitibi-Témiscamingue à l'heure actuelle.
"Mais, pour un Osisko, combien de projets hors de portée des citoyens ? La situation actuelle, qui maintient les projets d'exploitation à l'écart du débat public date d'un autre âge" souligne Christian Simard (Nature Québec). À cause d'un seuil arbitraire fixé par la loi à 7000 tonnes de minerai extraites par jour, trop rares sont les mines soumises à une étude d'impact sur l'environnement et à des consultations publiques.
Henri Jacob de l'ABAT se demande : "D'où vient ce seuil ? Sur quels critères environnementaux s'appuie-t-il ? Est-ce que les impacts d'une mine sont seulement une question de quantité de minerai extrait ? Qu'en est-il de la toxicité potentielle des résidus, de l'eau utilisée, de la capacité de support des écosystèmes, etc. ?". Michel Dubé (RQGE) renchérit : "Le seuil actuel de 7 000 tonnes par jour est trop élevé. C'est un obstacle sérieux à la participation du public. Il faut que ça change. Peut-être qu'on devrait s'inspirer de la législation applicable au nord du Québec où toute mine est obligatoirement soumises à une EIE et donc susceptible de rendre de comptes devant le BAPE".
La diffusion publique d'une étude d'impact est capitale pour une gestion citoyenne et responsable du territoire québécois. Sans étude d'impact, il est pratiquement impossible pour les citoyens de poser un jugement éclairé, de proposer des améliorations et des alternatives s'il y a lieu. Selon Marie-Ève Marchand (SNAP) : "L'obligation de conduire une EIE et des consultations publiques indépendantes contribue à rééquilibrer les pouvoirs entre communautés et entreprises. Concrètement, ça ouvre la voie à un changement d'attitude de la part de l'industrie et, en bout de ligne, à une amélioration des performances sociales et environnementales de l'industrie. L'exception doit devenir la règle".
La coalition Pour que le Québec ait meilleure mine ! ne demande pas seulement la généralisation des EIE. Comme l'explique Jacques Saucier (Comité vigilance Malartic), l'un de ses membres, il faut aller bien plus loin " Même avec une étude d'impact déposée et un BAPE qui s'en vient, les citoyens sont laissés à eux seuls. Pas d'avocat, pas d'expertise externe, pas d'aide financière. Comment voulez-vous assurer une vraie participation dans ces conditions ! ". Il continue : " Nous ne sommes pas dupes. Les choses changent à Malartic. La compagnie peut dire dans tous les journaux du Québec qu'elle est exemplaire, mais nous, la population locale, on ne va pas se laisser endormir par de beaux discours. On commence à entrevoir les conséquences du projet, et ça fait peur. Alors, on veut faire entendre notre voix, on veut participer et on veut de l'aide pour le faire !". De plus, les membres de la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine ! soulignent que des EIE et des consultations publiques effectuées une seule fois en début de projet ne sont pas suffisantes : une collaboration concrète et en continu entre communautés, gouvernements et entreprises est nécessaire pour parler véritablement de "développement durable" du secteur minier au Québec.
La Coalition entend participer activement au BAPE pour veiller à la juste prise en compte des impacts sociaux et environnementaux du projet Osisko. Les membres de la Coalition porteront une attention particulière aux scénarios analysés pour la restauration de la fosse à ciel ouvert, de même qu'aux mesures proposées pour minimiser les impacts et assurer des retombées positives à long terme pour la communauté et les citoyens affectés.
Source: Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine !