Avec seulement 20 % de la population du continent qui dispose d'un accès à l'électricité (1), le plus grand défi à relever en Afrique est l'électrification et l'accessibilité des populations au réseau électrique.
En entrevue avec GaïaPresse, Donald Kaberuka, le président de la Banque africaine de développement, estime que le continent africain doit répondre à une demande croissante en énergie tout en assurant un développement économique durable. À titre de comparaison, il rappelle qu’un Africain moyen consommera environ 120 kw/h d'électricité par année contre plus de 14 000 kw/h pour un habitant d'Amérique du Nord (2). C’est en fait le continent le moins développé en terme de production et de distribution électrique.
Ce manque d'accès aux ressources électriques cause de nombreux problèmes, tant au niveau de l'éducation que de la santé ou des opportunités de développement économique. Comme l'a rappelé Ban Ki-Moon lors de l'inauguration du Congrès mondial de l'énergie dimanche, aucun des Objectifs du millénaire ne pourra en effet être atteint sans une augmentation significative de l'offre électrique dans les pays en développement.
Outre le manque d'infrastructures de production, l'Afrique souffre également d'un réseau de distribution obsolète et extrêmement limité. Selon la Banque africaine de développement, seules 2 % des populations vivant en zone rurale disposent d'un accès à l'électricité. Le second enjeu énergétique pour l'Afrique du 21ème siècle est donc la création d'un réseau électrique transnational unifié pour permettre un meilleur partage et une distribution plus large des ressources électriques. En Afrique, certaines régions sont riches en ressources naturelles, qu'elles soient hydrologiques, minérales, ou même solaires permettant ainsi la production d'énergie à un coût relativement bas. Par contre, la distribution de cette énergie à l'échelle du continent est quasi nulle.
Investissements étrangers et partage équitable des revenus
Des investissements massifs sont nécessaires et ceux-ci ne peuvent être financés uniquement par les pouvoirs publics. C'est le troisième enjeu à considérer, celui de l'accroissement des investissements privés sur le continent africain. Dans ce domaine, l'Afrique souffre d'un manque de crédibilité sur la scène économique internationale, ce qui rend l'accès aux capitaux étrangers bien souvent trop cher.
Le coût du risque, notamment économique et politique, étant directement intégré aux coûts des capitaux investis, les investisseurs étrangers ne parviennent que trop rarement à dégager un rendement suffisamment attrayant. De leur côté, les pouvoirs publics n'ont bien souvent pas les moyens humains, financiers, ou structurels nécessaires pour se lancer seuls dans le financement et la réalisation de grands projets d'infrastructure électrique.
Pour palier à cette réalité, des institutions comme la Banque africaine de développement jouent un rôle d'assureur-crédit auprès des partenaires étrangers pour faciliter l'évaluation et la limitation du « risque africain » (3). Trop souvent, les efforts déployés pour ramener la confiance des investisseurs étrangers sont réduits à néant par une instabilité politique chronique ou les différents conflits qui ravagent périodiquement certaines régions du continent.
Tenir compte des changements climatiques
Les enjeux reliés aux changements climatiques sont le quatrième défi auquel doit répondre le continent africain en élaborant une politique cohérente d'électrification. Avec environ 800 millions de personnes qui ont besoin d'énergie et une croissance économique annuelle moyenne qui tourne autour de 3 à 4 %, l'Afrique représente le plus grand marché potentiel pour les entreprises du secteur de l'énergie. « L'Afrique ne peut se permettre de négliger aucune source potentielle de production électrique », croitDonald Kaberuka.Si l'Afrique ne peut bouder aucune source d'énergie potentielle, que ce soit le pétrole, le charbon, l'hydroélectricité, ou même le nucléaire à l'instar de l'Afrique du Sud, les conséquences environnementales d'un développement non contrôlé et non coordonné pourraient s'avérer désastreuses.
C'est donc dans la réalisation d'une politique énergétique cohérente et unifiée que l'Afrique trouvera les solutions adéquates pour rattraper son retard en matière énergétique et arrivera à un équilibre entre un développement économique durable, une amélioration sensible de ses indicateurs de développement, et des impacts environnementaux limités.
Un texte signé Antoine Bourgoignie.
Mots clés : Banque africaine de développement, enjeux énergétiques, Afrique, électrification.
Sources :
(1) Union des Producteurs, Transporteurs et Distributeurs d'Energie Electrique d'Afrique - UPDEA
(2) Banque mondiale
(3) Donald Kaberuka, CME Montréal, 12 septembre 2010
[CME2010]
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