Lettre d’opinion de Philippe Giroul [Trois-Rivières, le 28 avril 2018]
Il est du devoir de chacun de participer à la protection de l’environnement. C’est un principe moral et éthique légué par nos parents que nous devons transmettre à nos enfants, car l’environnement sain est un bien commun vital et irremplaçable. Dans cette logique, à l’image des droits de l’homme, la communauté internationale a reconnu et classifié comme crime environnemental toute infraction majeure à la législation sur l’environnement.
Fin 2016, la Cour Pénale Internationale a élargi son champ d’action à la destruction appréhendée de l’environnement qui pourra être classée comme crime environnemental. C’est la fin de l’impunité pour les dirigeants d’entreprises, politiciens et responsables d’autorité complices de pollution qui pourront se trouver assignés en justice à La Haye aux côtés des criminels de guerre.
Contrairement à la France – qui est aussi très mal prise avec d’énormes quantités de déchets nucléaires [i] – , le gouvernement fédéral ne pourrait pas ajouter à son code pénal un décret sur les déchets nucléaires autoproduits canadiens afin d’être soumis, en tant que crime contre l’environnement, à la Cour Pénale Internationale de La Haye. En effet, le gouvernement canadien coupable d’écocide ne peut pas prendre l’initiative de donner à une agence internationale le droit de le poursuivre en justice.
En France, le concept de crime terroriste écologique introduit dans le code pénal à l’article 421-2 est défini notamment par l’introduction sur le sol ou dans le sous-sol des substances de nature à mettre en péril le santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel. Le décret n° 2004-612 du 24 juin 2014 a créé l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique. C’est un service de police judiciaire qui a compétence nationale.
Ici au Canada, l’intégrité d’une partie du territoire national est menacée par une pollution radioactive appréhendée qui proviendrait d’une colossale décharge planifiée par les Laboratoires nucléaires canadiens (LNC) à Chalk River, pour y stocker plus d’un million de tonnes de déchets radioactifs… sur une hauteur de plusieurs étages sans aucune protection garantie au drainage.
Nous craignons que la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), généreuse pourvoyeuse de permis à polluer donne son aval pour ce projet. Surtout qu’elle vient d’accorder un permis de 10 ans aux LNC pour qu’ils poursuivent leurs activités nucléaires de revitalisation des laboratoires de Chalk River. Cela commencerait par l’ « Installation de gestion des déchets près de la surface » (IGDPS), pour pouvoir par la suite développer des nouveaux réacteurs modulaires qu’ils voudront éparpiller un peu partout et dont on ne sait rien sur la gestion de leurs déchets. Curieusement, ils ne semblent pas se préoccuper de la gestion sécuritaire des déchets de moyennes et grandes radioactivités.
L’émission Découverte [ii] de Radio-Canada du 25 mars 2018 dernier démontre clairement le drame de l’héritage radioactif que les gouvernements canadiens successifs nous ont légué.
Aujourd’hui, le gouvernement canadien et ses filiales complices, Énergie atomique Canada limitée (EACL), les Laboratoires nucléaires canadiens (LNC) et la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) doivent assumer moralement et judiciairement leurs actes. Il faut redouter un désastre écologique majeur dû aux déchets nucléaires autoproduits canadiens qui seront entreposés dans leur futur tumulus radioactif à Chalk River [iii](IGDPS), ainsi que par le confinement sous béton in situ du défunt réacteur NPD de Rolphton.
Le principe de précaution [iv] doit primer sur toute considération économique, ce que les gouvernements successifs ont balayé du revers de la main depuis 80 ans dans le cas du nucléaire.
Le rapport 1 – Inspection des centrales nucléaires – CCSN de la commissaire à l’environnement et au développement durable déposé au Bureau du vérificateur général [v] à l’automne 2016 a fait des constatations alarmantes sur la crédibilité de la CCSN qui sont résumées dans le survol de l’audit [vi].
La CCSN, qui se prétend être un organisme de réglementation de confiance reconnu par le public mais qui collabore avec l’industrie nucléaire pour son développement devrait être mise au ban…
Le gouvernement canadien aura-t-il la volonté et le courage de remplacer cette créature fédérale par un Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique. Celui-ci devra être démocratique, indépendant, éthique, transparent et éco-responsable afin de faire respecter par nos gouvernants le droit à un environnement sécuritaire et à une bonne santé pour tous les citoyens ?
À lire aussi:
Projet de dépotoir nucléaire à Chalk River – Réponse au député fédéral de Pontiac M. William Amos
[i] https://videos2.next-up.org/AREVA_Decharge_Solerieux.html
[ii] https://www.youtube.com/watch?v=l31hrbRBUrA
[iii] http://www.cnl.ca/fr/home/gerance-environnementale/nsdf/default.aspx
[iv] https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_de_précaution
[v] http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/Francais/parl_cesd_201610_01_f_41671.html
[vi] http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/Francais/att__f_41721.html
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17/10/24 à 09h35 GMT