L'égalité entre hommes et femmes est un objectif de développement fondamental en soi, mais elle est aussi un atout pour l'économie. Comme le souligne un nouveau rapport phare de la Banque mondiale, les pays qui améliorent les opportunités et la situation des femmes et des filles peuvent accroître leur productivité, améliorer les conditions de vie de leurs enfants, rendre leurs institutions plus représentatives et renforcer les perspectives de développement pour tous.
Selon le Rapport sur le développement dans le monde 2012 : Égalité des genres et développement, la situation des femmes et des filles vivant en milieu pauvre dans beaucoup de pays d'Afrique subsaharienne se caractérise encore par de sérieux handicaps. Un aspect particulièrement préoccupant est le surcroît de mortalité des femmes, pour lequel les auteurs du rapport emploient l'expression " déficit de femmes ".
D'après ce rapport, le déficit de femmes en Afrique subsaharienne s'est établi en 2008 à 1,18 million, contre 639 000 en 1990. Pour faire face au problème posé par le surcroît de mortalité féminine peu après la naissance ou durant la petite enfance, les auteurs préconisent un effort d'investissement accru dans des services adéquats d'alimentation en eau, d'assainissement et d'enlèvement des déchets. L'abaissement de la mortalité maternelle nécessitera pour sa part des améliorations d'ordre systémique au niveau des institutions qui fournissent des soins et des services médicaux aux femmes enceintes. L'effort de prévention et de traitement du VIH/SIDA est également un impératif, car l'état sanitaire des femmes laisse particulièrement à désirer dans les pays les plus durement touchés par l'épidémie et, dans ces pays, la prévalence du VIH/SIDA est plus forte pour les femmes que pour les hommes.
Mais le rapport fait état d'importants progrès pour la réduction des inégalités entre hommes et femmes à l'échelle mondiale, en particulier dans le domaine de l'éducation. Dans l'ensemble de l'Afrique subsaharienne, les taux d'inscription dans l'enseignement primaire se situaient en 2008 à 91 filles pour 100 garçons (contre 85 en 1999). Malgré cela, beaucoup de pays de la région affichent des progrès limités en ce qui concerne les taux de scolarisation des filles dans le primaire et le secondaire. En Érythrée, par exemple, le taux net de scolarisation primaire pour les filles, qui se situait à un très faible niveau de 16 % en 1990, n'est passé qu'à 36 % en 2008. Au Tchad et en République centrafricaine, il y a moins de 70 filles pour 100 garçons dans les écoles primaires. Et au Mali, le taux de scolarisation des filles âgées de 5 à 19 ans est comparable à ce qu'il était aux États-Unis aux alentours de 1820.
" Nous devons changer les règles des inégalités ", a déclaré à ce sujet le président du Groupe de la Banque mondiale, Robert B. Zoellick. " Au cours des cinq dernières années, le Groupe de la Banque mondiale a contribué un montant de 65 milliards de dollars pour promouvoir l'éducation des filles, la santé des femmes et l'accès de ces dernières au crédit, à la terre, aux services agricoles, à l'emploi et aux infrastructures. Ces efforts sont certes importants, mais ils ne sont pas à la hauteur des besoins et n'occupent pas une place suffisamment centrale dans notre programme d'action. À l'avenir, le Groupe de la Banque mondiale intégrera systématiquement les questions d'égalité des genres dans ses activités, et trouvera de nouveaux moyens de promouvoir les actions en ce domaine pour permettre à la moitié de la population de la planète de réaliser pleinement son potentiel. "
Le rapport fournit des exemples des progrès que pourraient réaliser les pays en s'attaquant aux disparités entre hommes et femmes :
· Assurer aux agricultrices le même accès et le même traitement qu'aux agriculteurs permettrait d'accroître le rendement du maïs de 11 à 16 % au Malawi et de 17 % au Ghana.
· Renforcer l'accès des femmes aux facteurs de production agricoles au Burkina Faso aurait pour effet d'accroître la production agricole totale des ménages d'environ 6 %, sans aucun apport de ressources supplémentaires -- uniquement en réaffectant des ressources (engrais et main-d'oeuvre) de la population masculine à la population féminine.
· Selon les estimations de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), donner aux agricultrices et aux agriculteurs le même accès aux ressources productives pourrait entraîner un accroissement de la production agricole de l'ordre de 2,5 à 4 % dans les pays en développement.
· L'élimination des obstacles à l'emploi de femmes dans certaines professions ou dans certains secteurs aurait des effets positifs similaires, en réduisant l'écart de productivité entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins d'un tiers, voire même de moitié, et en accroissant la production individuelle de 3 à 25 % dans un large éventail de pays.
" Empêcher les femmes et les filles d'acquérir les compétences et d'obtenir les revenus nécessaires pour réussir dans une économie mondialisée est moralement injustifiable et préjudiciable sur le plan économique ", a fait valoir Justin Yifu Lin, économiste en chef et premier vice-président de la Banque mondiale pour l'Économie du développement. " Il est essentiel d'assurer un partage égal des fruits de la croissance et de la mondialisation entre les hommes et les femmes pour pouvoir atteindre les grands objectifs de développement. "
Les disparités qui persistent concernent la faiblesse relative des taux de scolarisation des filles défavorisées ; les disparités au niveau de l'accès aux opportunités économiques et des revenus, que ce soit sur le marché du travail, dans l'agriculture ou dans l'entreprise ; et les différences marquées entre l'influence qu'ont les hommes et les femmes au sein du ménage et dans la société.
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