Alors que de nouveaux mécanismes financiers de préservation de la biodiversité voient le jour, l’Union européenne a mandaté le Cirad pour mener un travail d’expertise sur ces instruments innovants au Mexique et en Europe. Résultat : trois rapports qui défrichent le terrain pour approfondir leur étude en vue de renforcer leur mise en œuvre bilatéralement.
Investir dans la pêcherie responsable, financer la pollinisation des cultures, l’épuration naturelle de l’eau ou la prévention de l’érosion... Rémunérer la conservation de la biodiversité pour les services que l’humanité en retire est un concept en pleine expansion. Encore disparates et peu étudiés, ces mécanismes de financement offrent néanmoins un fort potentiel pour préserver les écosystèmes et les services qui leur sont associés.
Une économie du capital naturel
Intéressée par ce phénomène, l’Union européenne (UE) a mandaté le Cirad pour mener un travail d’expertise sur ces nouveaux outils de financement du capital naturel. L’objectif était d’identifier les mécanismes innovants puis de décrypter leur mise œuvre pour mieux l’appuyer. Conduits pendant un an avec l’Université Iberoamericana (Mexique) et l’Institute for European Environmental Policy, ces travaux ont abouti à la publication de trois rapports : l’exploration de ces outils au Mexique, dans les pays de l’Union européenne puis un résumé comparatif des expériences dans les deux régions (voir encadré).
Au préalable, les experts ont défini et stabilisé une typologie des différents objets de financement de la biodiversité. Ils ont distingué les mécanismes financiers, comme les investissements à impact ou la fiscalité écologique, des instruments économiques tels que les paiements pour service environnementaux (PSE) ou la certification. Les activités économiques compatibles avec une préservation de la biodiversité ont ensuite été identifiées. Certaines sont parfois très mâtures comme les actions en faveur d’une meilleure gestion des ressources en eau ou les coopératives de pêche responsables, d’autres sont embryonnaires comme la rémunération de la pollinisation des cultures.
Le Cirad à la charnière des acteurs
Grâce à son approche multisites et multipartenaires, le Cirad a joué un rôle de charnière entre les différents acteurs auditionnés, issus du secteur privé, public, académique et politique. Driss Ezzine de Blas, socioéconomiste au Cirad et coordinateur du projet, souligne que « c’est en quelque sorte un projet radar pour l’UE, un préalable pour définir des projets de recherche et de développement plus spécifiques. Par exemple, on sait maintenant que de petits financements suffiraient pour tester la rentabilité d’investissements dans des activités comme une coopérative de pêche responsable, une prise de risque que le secteur privé n’est, aujourd’hui, pas encore prêt à assumer. »
Pousser les investissements à impact
Sur fond de crise économique persistante, les premiers secteurs sacrifiés sont généralement l’environnement et la biodiversité. Mais aujourd’hui, les banques sont très intéressées par les investissements rentables à impact social et/ou écologique (impact investing). Il semble opportun de pousser le secteur privé et financier vers une internalisation plus forte des investissements dans la protection de la biodiversité et du capital naturel. Il s’agit donc de chercher une rentabilité, mais celle-ci doit-elle être classiquement économique ? Une chose est sûre, ces mécanismes émergents soulèvent de nombreuses questions, ouvrant un vaste chantier de recherche !
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