La COP21 a été un vrai succès diplomatique, mais n’a pas pour autant sauvé la planète des changements climatiques. Si l’Accord de Paris pose l’objectif ambitieux de contenir « l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels », les engagements des États, mis bout à bout, amènent plutôt la planète vers 3 °C à la fin du siècle – et ce alors que les émissions mondiales de gaz à effet de serre repartent à la hausse. La COP24, en décembre 2018, était censée donner l’occasion aux États de relever le niveau d’ambition de leurs contributions, mais sans aucun succès. Face à cette inertie, quatre ONG françaises (Fondation pour la nature et l’homme, Greenpeace France, Notre affaire à tous et Oxfam France) ont décidé de mettre en cause directement l’État français pour son action insuffisante contre le réchauffement climatique.
Lancée le 18 décembre, la pétition #laffairedusiecle soutenant une action en justice pour insuffisante action climatique a recueilli 1 million de signatures en 48 heures, et vient de dépasser les 2 millions. Le recours contre l’État devant le tribunal administratif n’a pas encore été formé, mais une demande d’indemnités – préalable indispensable à toute demande de dommages-intérêts devant la justice – a d’ores et déjà été adressée à plusieurs membres du gouvernement.
Plusieurs gouvernements condamnésSi l’affaire fait beaucoup de bruit du fait de l’écho médiatique donné à la pétition, cette action en justice ne sera toutefois pas une première : partout sur la planète, les procès intentés par la société civile contre les États se multiplient depuis cinq ans, leur reprochant leur inaction ou l’insuffisante ambition de leur politique climatique – plus rarement, pour demander réparation pour les préjudices subis. On comptabilise désormais plusieurs centaines d’actions en justice, qui touchent déjà 29 pays.
Aux Pays-Bas, la justice qui avait été saisie par l’ONG Urgenda et 800 citoyens a condamné en 2015 le gouvernement néerlandais à revoir ses engagements sur les émissions de gaz à effet de serre – une première en Europe, et un jugement confirmé en appel en octobre dernier. En Colombie, un groupe de jeunes a fait reconnaître par la Cour suprême la nécessité d’agir contre la déforestation pour la protection du climat. Au Pakistan, en 2015, un agriculteur a demandé avec succès aux juges de contraindre l’État de ce pays particulièrement affecté par le réchauffement climatique (inondations, sécheresses…) à adopter une législation climatique protégeant son exploitation et garantissant son droit à l’alimentation et son accès à l’eau…