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Eco-conception : des appareils domestiques moins gourmands


En votant le rapport de Mme Frédérique RIES (ADLE, BE) ce 13 avril, le Parlement européen a ouvert la voie à l'entrée en vigueur rapide d'une nouvelle directive-cadre sur l'éco-conception, c'est-à-dire la conception écologique des produits consommateurs d'énergie. De quoi s'agit-il? Cette directive-cadre vise tous les produits qui consomment de l'énergie pour fonctionner. Seuls les véhicules à moteur, comme les voitures, déjà régis par d'autres dispositions, ne sont pas visés. Le texte voté aujourd'hui couvre tout le reste des appareils domestiques ou bureautiques que les Européens utilisent chaque jour, du lave-vaisselle à l'aspirateur, en passant par l'ordinateur ou la simple ampoule électrique. Apparemment anodins, ces appareils engloutissent environ 30% de l'énergie primaire consommée dans nos pays et comptent pour 40% dans les rejets de CO2 dans l'atmosphère. Or, c'est au stade de la fabrication elle-même que ces produits sont conçus pour consommer plus ou moins d'énergie. Et c'est cela qui devrait changer.

Après le vote intervenu en commission de l'Environnement à la mi-mars, une négociation s'est engagée entre le rapporteur et les "shadow" rapporteurs du Parlement européen, d'une part, et la Commission et le Conseil d'autre part. Ce trilogue informel a pu déboucher sur un compromis approuvé par les Représentants permanents des Etats membres au Conseil, il y a quelques jours. L'approbation de ce résultat par la plénière épargne ainsi le recours à la procédure de conciliation et permet à la Commission européenne de préparer dès à présent les mesures d'exécution concrètes. "Avec cette directive-cadre, a déclaré le rapporteur dans le débat qui a précédé le vote, l'Union se dote d'un nouvel outil, source d'innovation et de protection de l'environnement. Près de 80 % des nuisances environnementales découlent de la phase de conception. Il est donc important de pouvoir agir à la source."

Dans sa proposition initiale, la Commission européenne n'annonçait pas de mesures spécifiques précises. A court terme, les députés ont obtenu que des mesures d'exécution commencent à être élaborées dans les deux ans qui viennent dans huit domaines prioritaires, ceux qui présentent le plus fort potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce sont, dans l'ordre:
-les équipements de chauffage et de production d'eau chaude;
- les systèmes à moteur électrique;
- l'éclairage dans les secteurs résidentiel et tertiaire;
- les appareils domestiques;
- l'équipement de bureau dans les secteurs résidentiel et tertiaire;
-'électronique grand public;
- les systèmes de chauffage, ventilation et climatisation,
- et, pour certains produits, une mesure d'exécution supplémentaire réduisant les pertes en régime de veille.

Tous ensemble, ces axes prioritaires permettraient d'éviter le rejet dans l'atmosphère de près de 200 millions de tonnes de CO2, soit la pollution générée, toutes sources confondues, par un pays de la taille des Pays-Bas, soit encore la moitié de l'objectif à atteindre par l'UE dans le cadre du protocole de Kyoto. Au-delà de ces huit axes prioritaires, le Parlement a obtenu que chaque groupe de produit soit couvert par une mesure d'exécution, sauf si des accords d'auto-régulation entre fabricants interviennent et rendent inutiles de telles mesures. Mais de tels accords seront soumis à des critères très précis, soigneusement édictés dans le texte voté par les députés.

Les fabricants ou les importateurs devront se conformer à diverses exigences de conformité. Quant aux objectifs en termes de consommation d'énergie, ils seront fixés en tenant compte des meilleures performances des produits existants sur le marché international. Côté aides, les Etats membres sont invités à encourager les petites et moyennes entreprises à s'adapter à la législation à venir. A cette fin, les réseaux et structures de soutien aux PME devraient être renforcées.

Restent les consommateurs qui, eux aussi, ont un rôle à jouer. Les mesures d'exécution spécifiques devront déterminer quelles informations le fabricant devra communiquer au consommateur sur le profil écologique du produit et sur les avantages de l'éco-conception. Et last but not least, ils auront aussi à informer le consommateur sur le rôle qu'il peut lui-même jouer par l'utilisation durable du produit qu'il achète.

Si le rapporteur s'est félicité de l'équilibre du texte négocié avec le Conseil, de la priorité donnée à l'efficacité énergétique et de la clarification des responsabilités des acteurs - fabricants, importateurs, Commission -, les points de vue d'autres orateurs étaient plus mitigés. "Mon groupe n'est pas très heureux mais c'est le meilleur résultat que nous pouvions obtenir", a déclaré Mme Karin SCHEELE (PSE, AT). A l'inverse, M. Peter LIESE (PPE-DE, DE) estimait que le Parlement européen a obtenu "un excellent résultat", soulignant que l'accord conclu se traduirait par moins de bureaucratie pour les PME. Un avis diamétralement opposé à celui de M. Holger KRAHMER (ADLE, DE) qui y voit, lui, un "monstre bureaucratique". Alors que M. Claude TURMES (Verts/ALE, LU) déplorait que la Commission européenne ne dispose que de deux administrateurs à peine pour s'attaquer à ce vaste programme, le commissaire en charge du dossier, M. Andries PIEBALGS, a assuré que son institution "assignera les ressources nécessaires pour arriver aux objectifs".
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