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Quel système de prévention et de gestion des crises au Sahel et en Afrique de l'ouest


Quel système de prévention et de gestion des crises
alimentaires au Sahel et en Afrique de l’Ouest ?


I.INTRODUCTION

Comment et pourquoi les pays sahéliens, donc le CILSS se sont résolus à mettre en place un dispositif de prévention et de gestion des crises alimentaires ? La réponse à cette question, il faut la rechercher dans la rupture constatée au niveau du Sahel à partir de 1973.

Avant 1973

Le sahel a connu des séries de famines plus ou moins aigues durant les périodes précoloniale et coloniale. Les réponses à ces crises étaient planifiées en fonction de nombreux facteurs endogènes et exogènes:

•les populations (ménages et communautés rurales) ont développé des stratégies propres qui variaient en fonction de l’intensité et de la durée des crises. Ces stratégies endogènes étaient surtout basées sur l’entraide et la solidarité

•les institutions de prévoyance coloniales étaient surtout basées sur:
Les mesures de prévoyance par la constitution de greniers familiaux et de greniers cantonaux,
Les mesures visant à lutter contre les ennemis des cultures (lutte antiacridienne,….)
Les secours immédiats aux victimes des famines,
Et certaines mesures visant à accroître la production agricole (fermes pilotes, vulgarisation agricole, etc.…)

A partir de 1973

1973, 1984, deux dates qui marquent durablement les populations sahéliennes ! Car au delà du drame qu’elles symbolisent, ces années ont entraîné de multiples ruptures:
Rupture écologique
Rupture socio-économique
Rupture dans les politiques publiques

Ces ruptures vont se combiner pour créer les conditions d’une insécurité alimentaire persistante. Ces grandes famines de 1973 et 1984 ont en effet fortement marqué la région et la communauté internationale:

Elles ont conduit à assimiler les difficultés alimentaires à des crises brutales de grande ampleur,
Elles ont installé le Sahel dans une situation de vulnérabilité structurelle se traduisant par la montée en puissance de nouvelles formes d’insécurité alimentaire plus pernicieuses et plus chroniques,
Au delà de ces crises conjoncturelles, le Sahel est devenu une des régions du monde les plus frappées par la faim et la malnutrition liées aux aléas de production, à la pauvreté et au disfonctionnement des marchés ;

Mieux vaut prévenir que guérir !

C’est pour parer à cette situation d’insécurité alimentaire que depuis près de 22 ans les Pays Sahéliens se sont mobilisés avec les organisations internationales, les partenaires au développement et les O.N.G, pour améliorer les capacités du Sahel à prévenir les crises alimentaires
Ces efforts ont permis :
•d’améliorer la qualité de l’information ;
•de promouvoir l’alerte précoce ;
•d’instaurer des espaces nationaux et régionaux de concertations qui ont permis
de confronter les diagnostics ;
•d’intervenir auprès des populations avant le déclenchement effectif des crises
alimentaires.


II. LE DISPOSITIF RÉGIONAL DE VEILLE SUR LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
AU SAHEL

Le dispositif de suivi de la sécurité alimentaire mise en place par le CILSS repose sur deux piliers essentiels :

La collecte d’informations biophysiques et socio-économiques sur le terrain et dans l’espace satellitaire pour la prévision et l’alerte précoce,
Les Concertations régionales pour partager les informations et amener à des prises de décisions concernant la situation de sécurité alimentaire tant au niveau national, régional et international.


2.1. La collecte d’informations biophysiques et socio-économiques

2.1.1.Le suivi de la campagne agricole: la prévision et l’appui- conseil

Ce suivi concerne :

L’évolution au cours de la campagne de la situation des cultures (mise en place, phénologie, conditions d’alimentation hydrique, état phytosanitaire) et des potentiels de production, de la situation météorologie (pluviométrie, vents, fluctuations du FIT)
Les informations hydrologiques (débits des cours d’eau et remplissage des lacs et retenues d’eau, barrages)
L’état des pâturages,
La situation acridienne
 Les Images satellitaires
Produits : cartes d’évolution de la biomasse active ;
données fournies par la télédétection ;
Images indice de végétation.

La diffusion d’information aux utilisateurs finaux se fait : par décade, par mois, par saison et par bulletins spéciaux. Cette diffusion se fait à l’aide de messages à la radio et à la télévision, et par Internet (site WEB). Toutes ces informations permettent au CILSS d’apporter une assistance et un appui-conseil aux producteurs, notamment à travers:

•un appui-conseil dans la pratique de bonnes dates de semis et une bonne gestion des cultures ;
• la fourniture d’informations sur la localisation des bons pâturages.


2.1.2.L’enquête agricole

Elle est la base de l’établissement des bilans céréaliers et alimentaires prévisionnels et ex-post et permet :

-L’établissement de la situation agricole et alimentaire,
-La fourniture des données pour la comptabilité nationale,
- La définition et l’évaluation des politiques agricoles (prévision des récoltes et estimation des stocks paysans résiduels).

2.1.3.Les missions conjointes (Gouvernements/CILSS/FAO) d’évaluations des récoltes

Elles sont organisées chaque année en Octobre – Novembre en vue de parcourir les différents Pays pour évaluer l’état physique des récoltes et échanger avec les acteurs sur le terrain sur la situation réelle et objective de la campagne agricole courante;


2.1.4.Les évaluations rapides ponctuelles CILSS/FEWSNET

Elles sont réalisées mensuellement durant la campagne agricole en vue de suivre l’évolution de certains paramètres tels que la pluviométrie, la situation des prédateurs des cultures, l’état végétatif des cultures, etc.

2.1.5.Le suivi des marchés

Il se fait à travers les systèmes d’informations des marchés (SIM) et ont pour but de collecter des données régulièrement sur :
Le nombre et types de produits commercialisés
Le relevé des prix (production, consommation)
Le suivi des quantités vendues sur les marchés internes et les exportations
Les facteurs influençant les comportements des commerçants, etc.

Les dispositifs de diffusion sont : les médias (radio) et les bulletins d’analyse (mensuel, semestriel, annuel).

2.2. Les concertations au niveau national et régional : « se concerter pour mieux
informer et agir ensemble »

Chaque année le Sahel et la Sous région sont sous haute surveillance afin de livrer à temps l’information sur la situation agricole, alimentaire et nutritionnelle, localiser les zones à risques et groupes vulnérables. En effet au cours de l’année plusieurs concertations sont organisées tant à l’échelle nationale que régionale pour permettre :
le suivi de la situation alimentaire, agricole nutritionnelle)
la prévision chiffrée de la production céréalière
l’évaluation du niveau de réponse des donateurs
l’identification des zones à risque alimentaire
l’identification des populations vulnérables
l’estimation des besoins
la mise en place d’outils d’intervention


2.2.1. La concertation de septembre :

•Etablissement du bilan à mi-parcours de l’hivernage (évaluation qualitative des récoltes) ;
•Identification préliminaire des zones à risque et perspectives alimentaires ;
•Permet aux acteurs (décideurs politiques, donateurs, opérateurs économiques, …) d’engager à temps, les processus de programmation d’aide et de soutien aux populations vulnérables en cas de crise.

2.2.2. La concertation de novembre :

•Validation des résultats préliminaires des enquêtes permanentes agricoles dans les pays ;
•Etablissement des bilans céréaliers au niveau national et régional et dégager les perspectives alimentaires pour la prochaine année de consommation.

2.2.3. La réunion annuelle du réseau de prévention des Crises Alimentaires en Décembre :

•Rencontre des acteurs de la sécurité alimentaire au Sahel et les donateurs,
•Examen du bilan global de la situation agricole et alimentaire au Sahel,
•Permet de fournir aux décideurs la synthèse des informations pertinentes pour une meilleure prise de décision.

« A propos du Réseau de Prévention des Crises Alimentaires (RPCA) »:

L’ensemble des efforts menés en matière de prévention et de gestion des crises alimentaires ont été cristallisés au sein de ce réseau :

C’est un forum qui associe les acteurs sahéliens et internationaux,
Il a impulsé des recherches et des réflexions et piloté des évaluations, etc.
Il fut le promoteur de la charte de l’aide alimentaire qui a doté les Pays Sahéliens et les donateurs de principes communs, permettant de limiter les risques d’une mauvaise utilisation de l’aide.

2.2.4. La concertation de mars :

•Etablissement du bilan actualisé de la campagne agricole, avec les chiffres de production définitifs ;
•Mise à jour des zones à risque et identification des populations vulnérables ;
•Point sur les interventions et les actions d’atténuation des Etats et des donateurs.


2.2.5. La concertation de juin :

•Cadre de concertation des membres du dispositif régional de veille (CILSS, FAO/SMIAR, FEWS NET, PAM/ODD) et partenaires (UE, MIFRAC, ACDI, USAID, ONG) pour le suivi des recommandations émises en mars ;

•Réactualisation des zones à risque à l’entrée de la période de soudure
•Préparation du démarrage de la campagne agricole au Sahel,
•Point sur le fonctionnement des dispositifs nationaux et régional de suivi de la sécurité alimentaire.


III.PERSPECTIVES: Quel système de prévention et de gestion des crises
alimentaires à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ?


3.1. Une extension du dispositif régional de veille du sahel aux autres pays de
l’Afrique de l’ouest non membres du CILSS

Les principales raisons qui motivent cette extension sont :

Sur le plan institutionnel:

Tous font frontières avec le Sahel et sont membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO);

Sur le plan sécurité alimentaire et marchés:

Impossible d’assurer la sécurité alimentaire des pays sahéliens sans prendre en compte leurs relations commerciales avec les pays des forêts : dimension régionale de la SA,

Existence d’une complémentarité en matière de potentiels et de diversité de production: les Pays du Sahel sont pour la plupart des zones d’élevage et de production céréalière par excellence et les pays côtiers produisent des tubercules et autres produits forestiers.

Dépasser la prévision des crises et aller vers la vraie prévention, c’est-à-dire empêcher la survenue des crises alimentaires en s’intéressant de plus en plus aux aspects structurels de la SA :
•niveau des investissements réalisés dans l’Agriculture,
•Indicateurs d’amélioration de la productivité agricole,
•La diversification des revenus,
•Le fonctionnement du marché agricole
•La promotion des activités non – agricoles etc.


3.2.QU’EST-CE QUI A ETE DEJA FAIT EN MATIERE D’EXTENSION DU
DISPOSITIF ?

•Certains de ces pays sont déjà associés au processus de concertations au sein du dispositif régional, il s’agit notamment: du Bénin, Togo, Côte-d’ivoire, Nigeria, Guinée Conakry,
•Appuis techniques et méthodologiques au Bénin et Togo ainsi que le renforcement de leurs capacités matérielles (équipements informatiques fournis, formation sur les méthodologies)

3.3. LES PROCHAINES ETAPES DE CETTE EXTENSION


3.3.1.SUR LE PLAN MÉTHODOLOGIQUE:

Le CILSS doit donc poursuivre ces efforts en améliorant davantage les méthodologies de collecte et de traitement des données :
Fournir un effort particulier sur les méthodologies de collecte de données sur (i) la production des tubercules, bananes, et autres spéculations produites dans les pays non membres du CILSS mais qui circulent dans le marché régional, (ii) sur la dynamique et le fonctionnement des marchés agricoles,
Aller du bilan céréalier au bilan alimentaire,
Renforcer les capacités d’analyse au niveau national et régional pour appuyer la prise de décision des autorités politiques régionales et nationales.

3.3.2.SUR LE PLAN INSTITUTIONNEL:

Au niveau national:

Elargir le dispositif de veille national aux organisations paysannes, ONG, opérateurs économiques, etc.

Au niveau régional:

Renforcer la collaboration technique inter-OIG (notamment CEDEAO, CILSS, UEMOA..);
Renforcer la participation de la société civile et des organisations socioprofessionnelles (organisations paysannes, opérateurs économiques, etc….) à l’animation du dispositif régional;
Prendre les mesures institutionnelles et techniques permettant au CILSS d’étendre son expertise à l’ensemble des Pays de la sous région.
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