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Pesticides et maladies neurodégénératives


Les maladies neurodégénératives sont des pathologies du système nerveux qui affectent progressivement le fonctionnement du cerveau. Leur processus d'évolution provoque la détérioration des neurones, voire leur mort cellulaire. Il entraîne alors des troubles pouvant toucher plus particulièrement la mémoire et le fonctionnement cognitif dans le cas de la maladie d'Alzheimer, mais aussi la motricité dans la maladie de Parkinson ou la sclérose latérale amyotrophique, le langage...

Les causes exactes du déclenchement des maladies neurodégénératives restent inconnues et semblent être plurifactorielles. Certains métaux lourds comme le mercure et le plomb pourraient avoir une action toxique sur les cellules nerveuses mais on s'interroge également sur l'influence de facteurs environnementaux.

Dans le cas de la maladie de Parkinson par exemple, le Dr Wassilios Meissner, neurologue au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Bordeaux, expliquait sur Parkinson Infos que l'étiologie reste actuellement indéterminée, mais que les pesticides peuvent constituer des facteurs de risque.

Les pesticides sont des substances chimiques répandues à grande échelle, essentiellement dans les cultures agricoles, pour agir contre les organismes nuisibles. On les retrouve également pour un usage non agricole en tant que désinfectant ou encore dans le traitement du bois. Ils sont généralement regroupés en trois grandes classes : les herbicides ou désherbants, les fongicides et les insecticides ou produits anti-parasitaires. L'inconvénient majeur de ces substances réside dans le fait qu'ils n'agissent pas seulement sur leur cible première mais qu'ils peuvent aussi avoir un effet toxique sur l'homme.

Depuis quelques années, les études se multiplient pour évaluer de manière plus précise l'impact de leur utilisation sur la santé et voir s'ils peuvent effectivement constituer un facteur déclenchant dans les maladies neurodégénératives. Une étude française récente montre que chez des agriculteurs hommes utilisant des pesticides, le risque de développer la maladie de Parkinson est multiplié par 5,6. Une autre recherche plus spécifique conclut que l'exposition de professionnels aux pesticides Manèbe et/ou Paraquat dans les 500m de la zone d'utilisation, augmente en moyenne de 75% le risque de développer la maladie de Parkinson chez les personnes exposées, surtout chez les jeunes.

Par ailleurs, on sait aujourd'hui que deux familles de pesticides de type organochloré, le lindane et le DDT, utilisées en milieu agricole, sont reconnues pour attaquer les mêmes cellules nerveuses du cerveau que celles détruites dans la maladie de Parkinson. Leur utilisation a été massive entre les années 1950 et 1990 et leur effet persiste, car ils sont capables d'agir de manière accrue dans l'environnement encore de nombreuses années après leur utilisation.

D'autres recherches ont mis en évidence que l'exposition aux pesticides augmenterait le risque de développer la maladie d'Alzheimer. Aussi, les sujets directement exposés aux pesticides ont 2,4 fois plus de risques de développer la maladie d'Alzheimer plutôt que les personnes non exposées.     

Comme l'exprime le Dr Gilles Berrut, gériatre au Centre Hospitalier Universitaire de Nantes (alzheimer-infos.eu), même s'il existe des prédispositions génétiques dans la maladie d'Alzheimer, leur expression pourra être favorisée par des conditions environnementales. Il existe par ailleurs une forte probabilité que les pesticides puissent intervenir dans le déclenchement de la sclérose latérale amyotrophique mais il n'y a pas de preuves certaines.

Facteurs et modes de contamination

Il existe trois types de voies d'exposition de l'homme aux pesticides : orale (alimentation), respiratoire (air) et cutanée. Selon les chiffres de l'OMS observés en population générale, la contamination des aliments est la voie d'exposition qui prédomine à 90% contre 10% pour l'eau. La voie cutanée n'est pas observée. En revanche chez les professionnels, la contamination se fait majoritairement par voie cutanée. Cela est contraire à nos préjugés et nécessite une amélioration de la cible en matière de prévention pour ne plus favoriser une protection prioritaire au niveau respiratoire.

Complexité de la prévention

Malgré toutes ces recherches, mettre en place des protocoles à titre préventif et les respecter reste un processus complexe. Les principes généraux de précaution préconisent un certain nombre de recommandations comme le remplacement des produits toxiques par des produits qui ne le sont pas ou moins, et le port d'une combinaison.

Mais contrairement à ce que l'on pourrait croire, cela ne suffit pas à exclure la contamination. En effet, lors du traitement, le maintien prolongé de certaines substances sur la combinaison annule son effet protecteur. Aussi, après le traitement, lors du nettoyage, la pression des jets pourrait favoriser une migration des produits accumulés vers l'intérieur. De la même manière, il pourrait y avoir une précontamination en cas de mauvais entretien des équipements. De plus, peu d'indications sont aujourd'hui données aux utilisateurs sur les équipements préconisés en fonction des pesticides qu'ils manipulent. En conséquences, ils couvriraient un spectre trop large et non exhaustif.

Enfin, le professionnel qui se sent protégé a tendance à prendre moins de précautions. Le fait qu'il ne sente rien sur la peau lors de la contamination le fait sous estimer la contamination cutanée. Sans oublier que le port d'un équipement reste pénible... Le professionnel sera alors plus enclin à limiter son utilisation en fonction du degré d'inconfort. Cela nous interroge donc sérieusement sur une réévaluation du mode de protection et nous montre combien le problème de la prévention reste d'actualité et la prudence, de rigueur. 
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