L’analyse de l’efficacité du droit environnemental rapportée à l’étude de cas de la prolifération des algues bleues-vertes sur les rives des lacs au Québec depuis la première décennie du XXIe siècle.
Le droit de l’environnement a pris un virage mondial avec la conférence de Stockholm en 1972, même si les attentes des environnementalistes n’ont pas vraiment été entendues. Bien qu’il y ait une volonté de faire appliquer le droit environnemental international de manière coopérative entre tous les États, ces derniers ne semblent pas tous prêts à engager de telles négociations (1).
Dans ce contexte, une réaction de la part du Parlement européen s’est faite sentir avec l’instauration de normes écologiques, par exemple pour l’utilisation de pesticides. Tel ne semble pas être le cas du Québec au regard de sa législation environnementale qui semble hésitante en la matière. Si en tant que juristes nous défendons l’application de la loi et son concept comme gage d’organisation sociale, comment justifier l’absence ou la non effectivité de certaines politiques environnementales ?
Cette question, replacée sous l’égide du droit environnemental, trouve par exemple une application dans le problème de la surprolifération des algues bleues-vertes sur les rives des lacs québécois comme le lac Beauchamp à Gatineau. En effet, alors que ces algues peuvent causer des problèmes de santé tels que la gastro-entérite ou des irritations cutanées, le droit et les gouvernements qui ont pour mission la protection du bien-être de la population semblent un peu trop absents sur le sujet.
Les algues bleues-vertes comme bio indicateurs de pollution
Il n’est pas question ici de remettre en cause la présence des algues dans la mer ou les lacs. Bien au contraire, elles sont une grande source d’oxygène pour notre planète. C’est leur surprolifération sur nos rivages, en France ou encore au Québec, qui semble problématique car cela ne survient que lorsque la pollution de leur environnement augmente, comme fonctionnerait un bio indicateur. C’est pourquoi le phénomène doit être considéré avec beaucoup d’attention : elles matérialisent et rendent visible la pollution assez difficile à percevoir du premier regard.
Une réponse juridique nécessaire au problème des algues vertes mais encore timide au québec
Le problème des algues vertes, marées vertes ou «zones mortes» est un phénomène visible dans d’autres régions comme au Golfe du Mexique ou en Californie (2). Le Canada et la Bretagne ne sont d’ailleurs pas en reste.
Pour endiguer cette surprolifération d’algues vertes en France, l’Union Européenne a mis sur pied plusieurs politiques environnementales dans le cadre de la politique agricole commune, notamment par l’instauration de normes de rejets de nitrates et des contrôles des eaux territoriales et sous-terraines. De telles politiques sont soutenues mondialement comme lors de la conférence de Rio 20 qui s’est déroulée à Rio de Janeiro du 20 au 22 juin 2012 et souhaite donner un rayonnement mondial à leur mission à travers la réunion de plusieurs États.
Ainsi, en Ontario, de nombreuses lois ont été mises en place comme celles qui imposent des normes de rejet de nitrates, normes qui ont alors fait leurs preuves (3), ou la Loi de 2002 sur la salubrité de l’eau potable modifiée par le Règlement ontarien 327/08. Toutefois, dans la province du Québec il semble que les lois dites environnementales n’aient pas le même impact socio-environnemental car elles n’interviennent pas sur les vraies causes de la prolifération des algues.
La pollution environnementale ou l’un des enjeux majeurs des industries actuelles
Selon le Ministère de l’environnement du Québec, les nitrates et les phosphores dans l’eau sembleraient à l’origine de la prolifération des algues bleues-vertes (4). Pour le Parti Vert du Québec, l’usage de phosphores dans les détergents du quotidien serait en cause, ou encore l’emploi de certains herbicides alors tolérés par ces algues (3).
Or, derrière ces produits se trouvent parfois de grandes industries dont le chiffre d’affaires dépend de la vente de ces mêmes pesticides. Prenons l’exemple de Monsanto, qui est l’une des plus grandes entreprises de production d’organismes génétiquement modifiés. Les graines que l’entreprise utilise sont produites pour résister à l’usage de pesticides et d’herbicides. On comprend dès lors le risque que représente pour elle une trop grande réglementation de l’utilisation de ces pesticides. Paradoxalement, il faut reconnaître que ces grandes firmes répondent à une demande mondiale croissante de production alimentaire.
Ainsi, la prolifération des algues bleues-vertes des lacs québécois peut être considérée comme un reflet de l’absence d’efficacité du droit environnemental au Québec. Elles représentent également une alerte lancée face à nos excès, que nous imposons aux écosystèmes.
RÉFÉRENCES :
(1) Lago, A., 2009. Stockholm, Rio, Johannesburg: Brazil and the three United Nations Conferences on the environment. Brasília: Fundação Alexandre de Gusmão.
(2) Tirado, R., 2008. Zones mortes : Comment les engrais agricoles tuent nos rivières, lacs et océans [en ligne]. Greenpeace. www.greenpeace.org/canada/fr/actualites/zone-mortes-lancement/ [consulté en novembre 2014].
(3) Francoeur, L.-G., 2008. Algues bleues – Québec doit s’attaquer aux causes du problème, dit le chef des verts. Le Devoir, 6 juillet.
(4) Gouvernement du Québec, 2002. Algues bleu-vert [en ligne]. Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre le changement climatique. www.mddelcc.gouv.qc.ca/eau/flrivlac/algues.htm [consulté en novembre 2014].
Source: L'Interdisciplinaire, journal étudiant de l'Institut EDS
[Journallinterdisciplinaire]
Journal L'intErDiSciplinaire vol. 5 no 2 (707 hits)