La FAO vient de publier la dernière édition du rapport annuel des Nations Unies sur l'État de l'insécurité alimentaire dans le monde 2015 (SOFI).
L’une des principales informations de ce rapport 2015 est que « dans les régions en développement, la prévalence de la sous-alimentation – qui mesure la proportion de personnes privées de la nourriture indispensable pour mener une vie saine et active – est tombée à 12,9 pour cent de la population, par rapport aux 23,3 pour cent enregistrés il y a un quart de siècle ».
Le rapport s’intéresse également au lien entre commerce international et sécurité alimentaire. « À l’égard de la sécurité alimentaire, le commerce n’est en soi ni une menace ni une panacée, mais il peut poser des problèmes, voire des risques, qui doivent être pris en considération par les décideurs politiques. Afin de prendre en compte leurs besoins en matière de sécurité alimentaire et de développement de façon cohérente et systématique, les pays doivent considérer l’éventail complet des instruments de politique générale à leur disposition et combiner avec souplesse celles qui leur permettront d’atteindre leurs objectifs.Parmi les instruments de politique commerciale, les restrictions à l’exportation et la levée des droits à l’importation s’avèrent être les plus couramment utilisés pour résoudre les problèmes d’insécurité alimentaire pendant les périodes de hausse et d’instabilité des prix. »
Le rapport précise que les liens directs de cause à effet entre commerce international et sécurité alimentaire sont très difficiles à évaluer, et dresse un éventail des effets possibles de la libéralisation des échanges sur les différentes dimensions de la sécurité alimentaire: ces effets peuvent être tout aussi positifs que négatifs, varier entre les pays et dans le temps, etc.
Parmi les autres messages clés de ce rapport 2015, «la croissance économique joue un rôle déterminant dans la lutte contre la sous-alimentation, mais elle doit être sans exclusion et offrir la possibilité d’améliorer les moyens d’existence des populations pauvres. Pour progresser dans ce domaine, il est essentiel d’améliorer la productivité et d’accroître les revenus des petites exploitations familiales ». De plus, « les systèmes de protection sociale ont été décisifs dans un certain nombre de pays en développement, où ils ont favorisé la concrétisation des cibles de l’OMD 1 concernant la faim et la pauvreté ».
Enfin, en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, le rapport relève l’apport de l’agriculture familiale et de la petite agriculture. « Plus de 90 pour cent des 570 millions d’exploitations agricoles à travers le monde sont gérées par un individu ou une famille et la main-d’œuvre y est principalement familiale. La durabilité et la sécurité alimentaire future de ces exploitations risquent d’être compromises par une utilisation intensive des ressources. Pour assurer la sécurité alimentaire, il faut des politiques publiques qui reconnaissent la diversité et la complexité des défis auxquels sont confrontées les exploitations familiales, et ce tout au long de la chaîne de valeur. »
Ces défis et opportunités mis en exergue par la FAO se reflètent dans l'objectif de développement durable (ODD) numéro 2, dont l’adoption est prévue à la 69e Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2015 : "éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable". Les cibles associées à cet objectif visent notamment, d’ici 2030, à multiplier par 2 la production agricole et les revenus des petits producteurs, assurer la viabilité des systèmes de production alimentaire, ou encore corriger et prévenir les restrictions et distorsions commerciales sur les marchés agricoles mondiaux, y compris par l’élimination de toute forme de subventions aux exportations agricoles.
Dans ce contexte, et sachant que le principe du développement durable est énoncé au paragraphe 1 de l'Accord de Marrakech, les États et gouvernements devront s’assurer de la compatibilité et de la cohérence des mesures commerciales avec l’atteinte des ODD. Quels seront, par exemple, les impacts des accords commerciaux (APE, paquet de Bali, etc.), sur l’objectif #2 ? Doit-on anticiper une obligation des étiquetages environnementaux des produits agricoles, ou l’augmentation de barrières non-tarifaires au commerce justifiées par le resserrement des normes environnementales, appliquées à l’ensemble du cycle de vie d’un produit ? Le cas échéant, quelles sont les opportunités pour les petits producteurs ? Quels seront les besoins de renforcement de capacités, d’investissements en infrastructures, et de législation, pour favoriser l’atteinte des ODD, rendre l’agriculture plus résiliente aux changements climatiques, et bénéficier pleinement des accords internationaux sur le commerce?
Voilà autant de questions que devront se poser les États, dans le cadre de l’adoption des ODD, de la CdP21 de Paris, et de la 10e Conférence ministérielle de l’OMC, du 15 au 18 décembre 2015. La mise en place d'un mécanisme de suivi-évaluation des Accords de partenariat économiques (APE) entre l'Union européenne et les pays ACP, qui serait basé spécifiquement sur les objectifs de développement durable, offrirait sans doute l'occasion de quantifier avec une plus grande précision les impacts des APE sur la sécurité alimentaire et le développement durable dans son ensemble, et renégocier certains aspects de l'accord, au besoin.
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