Le charbon est la deuxième source d’énergie primaire (30 %) après le pétrole (33 %) et devant le gaz naturel (23 %). Grâce à ses coûts d’exploitation stables et compétitifs ainsi qu’à des réserves estimées à plus de 110 ans de consommation, il est considéré comme une énergie avantageuse et assure près de 41 % de la production mondiale d’électricité. Or le charbon constitue une menace majeure pour notre climat et un risque direct pour la santé des centaines de millions de personnes évoluant dans les pays où il est privilégié. Les Chinois en savent quelque chose.
En Chine, 2 630 personnes sont mortes en 2008 dans les nombreux accidents répertoriés dans les mines de charbon du pays. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), sur les 6 millions de mineurs chinois, 600 000 étaient atteints d’affections pulmonaires en 2010. Sachant qu’environ 80 % des mineurs actifs en Chine sont des travailleurs migrants (au sein de leur propre pays) en situation irrégulière, donc non pris en compte dans les statistiques, le bilan pourrait être beaucoup plus lourd.
Exposés à des émissions de gaz en milieu confiné ainsi qu’à de nombreux accidents potentiels (éboulements, inondations, incendies, explosions, libération de méthane…) les mineurs ne sont pourtant pas les seules victimes. L’extraction du charbon peut entraîner l’érosion des sols et la pollution des nappes phréatiques. Elle provoque également l’émission de gaz dans l’atmosphère, notamment du mercure (un métal dangereux pour les personnes, les poissons et la faune), du soufre et de l’oxyde de souffre (responsables des pluies acides), et des gaz à effet de serre tels que le méthane, le CO2 et les oxydes d’azote.
D’après l’ONG WWF, les efforts entrepris par l’UE dans la lutte contre le réchauffement climatique pourraient être minés par les émissions de C02 provenant des centrales thermiques au charbon. Le recours à ce combustible plutôt qu’au gaz a conduit à une augmentation des émissions de CO2 en 2013 par rapport à 2012 de 0,2 % avec un total de 29,1 millions de tonnes. Ainsi, la contribution du charbon aux émissions des gaz à effet de serre et par conséquent aux changements climatiques pourrait en faire notre ennemi public n° 1. De quoi corroborer les scénarios les plus sombres des scientifiques, qui pronostiquent des hausses de 5 à 6 degrés de la température planétaire dans les décennies à venir, avec des conséquences irréversibles sur l’environnement ? Peut-être, si rien n’est fait pour enrayer la consommation mondiale de charbon.
Mais comment lutter efficacement contre cette menace ? C’est évidemment le problème auquel doivent s’attaquer les 140 pays réunis à Paris pour la grande conférence climatique. Une proposition devra être particulièrement étudiée. Elle présente l’avantage non négligeable de mettre d’accord François Hollande, Christine Lagarde et de nombreux dirigeants internationaux. Il s’agit de la mise en place d’un prix du carbone. En faisant payer les émissions de gaz à effet de serre, l’objectif serait de pousser les entreprises à investir dans des technologies plus vertes afin que la part du charbon dans le mix énergétique diminue au profit d’énergies moins polluantes comme l’éolien et le gaz naturel.
L’instauration d’une taxe carbone motiverait des évolutions technologiques majeures, notamment dans les pays émergeants qui restent, malgré leurs efforts, largement dépendants du charbon. Le cas de l’aluminium est particulièrement éclairant à ce propos. Il s’agit du métal le plus consommé dans le monde après le fer, mais aussi du plus énergétivore : une tonne d’aluminium consomme en moyenne 14 000 kilowattheures (kWh). Si dans certains pays, notamment la France, la Suisse, la Norvège, le Canada et la Russie, la majeure partie de l’électricité nécessaire à la production d’aluminium primaire est générée par des moyens hydrauliques, en Chine, premier exportateur mondial du métal, 90 % de l’électricité utilisée dans le cadre de la production primaire d’aluminium provient du charbon. Pour de nombreux experts, attribuer un prix au carbone changerait complètement la donne. Le prix de revient s’en trouverait fortement augmenté pour la Chine, qui serait ainsi encouragée à réorienter la production d’aluminium en privilégiant des énergies moins polluantes. CQFD.