Le nombre des orages de moussons a triplé en trente ans dans la région sahélienne. Un bouleversement météorologique lié au réchauffement du climat.
« Pour la première fois, un lien potentiel entre l’intensification des événements extrêmes au Sahel et le réchauffement climatique, dû à l’augmentation des gaz à effet de serre, a été identifié », souligne le climatologue Serge Janicot. En trente ans, le nombre des orages de mousson a triplé dans cette zone géographique s’étirant du Sénégal à l’Erythrée. En parallèle, le désert saharien, au Nord, se réchauffe davantage ces dernières décennies que les autres régions africaines. Il est l’acteur clé de la multiplication de ces orages. « L’élévation des températures au nord de la région sahélienne génère un gradient thermique de plus en plus important, poursuit Serge Janicot. Cette différence de température provoque une augmentation du vent en altitude favorable au développement vertical des nuages et générant des précipitations plus conséquentes. » Ces lignes de grains dont le sommet peut atteindre des températures de – 75 °C produisent des précipitations très intenses en quelques heures, parfois quelques minutes.
« Le triplement des événements exceptionnels, constaté par des relevés pluviométriques, a été confirmé par les données satellites de ces 35 dernières années, précise l’hydrologue Théo Vischel. Cette étude apporte des informations qui étaient lacunaires sur l’Afrique de l’Ouest. Elles sont essentielles dans un espace géographique où les populations sont sensibles au climat car dépendantes d’une agriculture non irriguée ». De fait, les dommages liés aux inondations ont été multipliés par cinq dans la région entre les années 1970-1989 et 1990-2009. Ces risques hydrologiques s’accentuent avec l’intensification des lignes de grains : les pluies très fortes et irrégulières endommagent les cultures et ruissellent sur le sol bien plus qu’elles ne s’infiltrent. Ces effets s’aggraveront avec la poursuite de l’élévation des températures au Sahara.
« Un effort doit être porté sur la représentation des lignes de grain dans les modèles climatiques plus globaux, estime Serge Janicot. Cette problématique s’inscrit dans le projet international AMMA 2050 qui reprend certains des objectifs du programme AMMA auquel l’IRD a participé dans les années 2000. Il a pour ambition de renforcer les connaissances sur l’impact de l’évolution du climat sur les sociétés d’Afrique de l’Ouest d’ici 2050. » Améliorer la modélisation des orages est un enjeu essentiel à long terme. Elle aidera à mieux définir des stratégies d’adaptation adéquates au Sahel. A court-terme, les scientifiques souhaiteraient prévoir ces événements exceptionnels en amont. Un système d’alerte permettrait d’éviter des conséquences désastreuses pour les populations.
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