Le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) a rappelé vendredi le rôle crucial des communautés locales de l'Afrique centrale dans la protection de mammifères emblématiques face aux menaces des groupes armés.
Citant un rapport publié le mois dernier par l'ONG Traffic, qui met en garde contre les répercussions des activités des groupes armés sur la faune sauvage en Afrique centrale, le PNUE s'est fait l'écho de la situation sinistre des mammifères dans la région.
Il y a trente ans à peine, des milliers d'éléphants se déplaçaient dans les zones de conservation de la faune sauvage d'Afrique centrale, souligne le rapport. Aujourd'hui, leur population a été décimée. Dans des endroits comme le parc national de la Garamba, en République démocratique du Congo (RDC), on estime qu'entre 1.100 et 1.400 éléphants demeurent, contre 20.000 dans les années 1980.
Le chasse-mouche, généralement fabriqué à partir de la queue de girafe, est un symbole d'autorité dans de nombreuses sociétés africaines. La queue de la girafe du Kordofan en particulier est très prisée pour la fabrication de chasse-mouches, et a par conséquent placé cette espèce dans le collimateur des braconniers et d'autres groupes armés. Désormais, 40 girafes seulement vivent encore dans le parc de la Garamba.
Dans l'est de la RDC, la population de chimpanzés a diminué de 80 à 98%, principalement en raison du braconnage pour la viande de brousse. Ceci est attribué à la demande de protéines « qui est particulièrement intense autour des camps d'exploitation minière artisanale et d'exploitation forestière, où la viande de brousse est généralement la principale source de protéines », souligne le rapport de l'ONG.
Le double effet d'une alimentation insuffisante, associée à la pollution due à l'exploitation minière, ne fera qu'exacerber la menace sur la biodiversité de la région, entraînant une suite d'événements qui pourrait compromettre les moyens de subsistance futurs de nombreuses communautés locales.
« L'importance de l'implication des communautés locales dans la lutte contre le braconnage, et du renforcement de leurs moyens de subsistance alternatifs, a maintenant été largement reconnue par divers forums nationaux, régionaux et mondiaux », a déclaré Bianca Notarbartolo, experte sur le commerce illégal d'espèces sauvages au PNUE. « Mais de tels engagements doivent encore être accompagnés d'une mise en œuvre efficace et suffisante ».
« Le renforcement du rôle des communautés locales dans la gestion de la faune devrait être au centre de toute stratégie visant à lutter contre le commerce illégal d'espèces sauvages et pour assurer la sécurité de la faune et la biodiversité pour l'avenir », a souligné l'experte du PNUE.
La conservation est devenue une entreprise dangereuse
Le rapport de l'ONG Traffic cité par le PNUE se concentre sur trois zones de conservation en République centrafricaine (RCA) et en RDC, mais les braconniers sont également actifs dans le parc national de Lantoto au Soudan du Sud, qui se trouve à côté de Garamba, de l'autre côté de la frontière.
Parmi les groupes armés non étatiques opérant dans la région figurent les milices janjaouid du Soudan, l'Armée de résistance du Seigneur de l'Ouganda, les combattants anti-Balaka et Séléka rivaux de la République centrafricaine, ainsi que l'opposition à l'Armée de libération du peuple soudanais et des braconniers.
La conservation est devenue une entreprise dangereuse. En octobre 2016, à la suite d'un appel des gestionnaires des parcs de la région, l'Union européenne a organisé un atelier pour discuter de la meilleure façon de soutenir la conservation, d'assurer la sécurité et de contribuer à la reconstruction de l'économie locale fragile.
Cependant, le rapport cité par le PNUE souligne que cette situation alarmante n'est pas insurmontable.
« Heureusement, il existe des agences de conservation dévouées et compétentes sur le terrain, et ces organisations doivent être pleinement soutenues (financièrement, logistiquement et politiquement) afin qu'elles puissent continuer à défendre la faune et l'écosystème [régional] contre les énormes pressions qui s'exercent actuellement sur elles », indique l'ONG Traffic.
Le rapport recommande également la promotion de campagnes d'information destinées à mettre en lumière les espèces en voie de disparition et autres espèces protégées, la législation, l'application de la loi et les incidents de corruption. Il préconise également une enquête détaillée sur le trafic d'espèces sauvages dans le sud-est de la RCA et le soutien aux moyens de subsistance communautaires alternatifs ainsi qu'une coopération transfrontalière entre les États affectés.
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