Pour sa quatrième journée de travaux, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), s’est penché sur « l’aspect sombre » de la réalisation des objectifs de développement durable, au cours des trois tables rondes de la journée, en présence des grands groupes et autres parties prenantes.
Les États essaient de montrer les aspects positifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en occultant « l’aspect sombre », a fustigé Mme Luisa Emilia Reyes Zúñiga, du grand groupe des femmes, modératrice de cette table ronde intitulée « Transformation vers des sociétés viables et résilientes - perspectives de la société ».
« Les grands groupes ne sont pas vos ennemis; ils sont de votre côté », a-t-elle lancé en dénonçant les tentatives de brider leur parole. Même son de cloche du côté de l’un des panélistes, M. Vitalice Meja, de « Reality of Aid Network Africa », qui a ironisé sur le fait que dès que les États alignent leur plan de développement national sur le Programme 2030, c’est que « tout va bien dans le meilleur des mondes possibles ».
« Mais non, ce n’est pas le cas », a-t-il dit en demandant que la société civile soit mieux associée à la réalisation dudit Programme, « comme il se doit ». Une franchise partagée par Mme Jolly Amatya, du grand groupe des enfants et des jeunes, qui a affirmé que « le caractère volontaire de la mise en œuvre des objectifs de développement durable ne doit pas servir d’excuse pour ralentir les progrès ».
Comme de nombreux orateurs, elle a réclamé un changement de paradigme économique, loin de l’actuel où « seule la croissance est recherchée sans prise en compte des conséquences négatives sur les plans économique et environnemental ». Le grand groupe des autorités locales, par la voix de M. Berry Vrbanovic, maire de la ville canadienne de Kitchener, a également exprimé ses doléances en réclamant que les collectivités locales soient associées davantage à l’élaboration des plans nationaux. « Nous ne voulons plus être une note de bas de page. »
Les participants aux deux tables rondes de la matinée ont affiché leur scepticisme face à la réalisation des objectifs de développement durable. « Nous voulons les réaliser mais nous sommes en panne. L’élan est retombé », a déclaré la déléguée du grand groupe des organisations non gouvernementales. Même constat pour la représentante de la France qui a indiqué que « peu de parties prenantes se sont appropriées ces objectifs ». « Ils ne sont pourtant pas une nouvelle obligation mais une nouvelle grille de lecture », a-t-elle dit.
Le pessimisme prévalait aussi du côté de la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Mme Vera Songwe, qui a indiqué que les inégalités n’ont pas diminué en dépit de la croissance des économies en Afrique. « En d’autres termes, nous continuons de créer des pauvres et des inégalités », a dit celle qui était l’une des panélistes de la première table ronde de la journée intitulée « Mise en œuvre des objectifs de développement durable: enseignements tirés dans les différentes régions ».
« De même que dans d’autres régions, les progrès ne sont pas suffisants pour les pays d’Asie et du Pacifique », a renchéri le Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), M. Kaveh Zahedi. « Un seul objectif est sur la bonne voie d’être atteint en 2030, à savoir l’accès universel à l’éducation. Beaucoup reste à faire en qui concerne l’intégration sociale et l’emploi décent », a-t-il déploré.
La dernière table ronde de la journée consacrée à l’examen de l’objectif 12 sur la consommation et production responsables a, elle, vu M. Shaswat Sapkota, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES) faire montre d’un optimisme prudent. Il s’est ainsi félicité du fait que 93% des 250 plus grandes compagnies du monde font désormais des rapports sur la durabilité, ainsi que les trois quarts des 100 plus grandes entreprises de 49 pays.
« De même, en 2018, 108 pays avaient développé des politiques nationales de production et consommation durables, y compris de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et d’Amérique latine », s’est enorgueilli M. Sapkota. Enfin, cette journée a été marquée par les appels lancés par les représentants des peuples autochtones pour le respect de leurs droits, en particulier fonciers.
« Comment peut-on faire du développement alors que nos terres sont militarisées? Comment faire, alors que les multinationales sont plus écoutées que les populations autochtones? » a demandé Mme Alma Sinumlag, Chargée de programme du « Cordillera Women Education and Action Research Center » (Asia-Pacific Civil Society Mechanism).
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