Mali: grand bond dans les exportations de mangues
Mali: grand bond dans les exportations de mangues
Le Gouvernement du Mali avec l’appui du PNUD a mis en place un projet d’ amélioration de la qualité des mangues. Le but : permettre aux acteurs de la filière d’ accéder aux marchés européens.
Selon les spécialistes des marchés agricoles, le Mali peut produire jusqu’à 200.000 tonnes de mangues par an. Il est facile de se rendre compte de ce potentiel en parcourant les principales artères de la capitale ou en sillonnant les marchés des grandes villes: des tas de mangues, toutes variétés confondues, sont disposées devant des vendeuses préoccupées par leur gain quotidien.
Cette période d’abondance s’étend habituellement de mars à juin chaque année. En dehors de la consommation sur place, une bonne partie de la production de mangues est mal exploitée bien qu’il existe un marché d’exportation porteur (Union Européenne, sous région…). Les raisons dévoilées de cette sous exploitation sont, entre autres, l’infestation des mangues par les organismes nuisibles (fourmi rouge, mouche des fruits, cochenille farineuse…), la faible capacité des acteurs à présenter des produits conformes aux exigences commerciales et réglementaires des marchés internationaux. Il est habituel de voir les mangues laissées au processus de pourrissement naturel quand elles ne sont pas données aux «bêtes».
Outre le fait que les producteurs de mangues au Mali sont des « petits producteurs », il se trouve que dans le circuit de commercialisation, les femmes jouent un rôle important. Elles assurent, sans précaution particulière, l’enlèvement des fruits des vergers et leur acheminement vers les multiples points de vente ou les stations de conditionnement. Il importe dans ces conditions, et dans le souci de tirer un profit certain, d’apporter un encadrement conséquent aux activités liées à la filière mangue en vue d’augmenter le revenu des acteurs.
C’est ce qui a motivé le choix du projet « Appui à l’amélioration de la qualité de la mangue à l’exportation » par le Ministère de l’Industrie et du Commerce dans le cadre du programme Cadre intégré. Le programme Cadre intégré figure en bonne place dans le Cadre Stratégique pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté au Mali (CSCRP), document unique de référence des politiques et stratégies de développement du pays. Celui-ci décrit et harmonise les politiques et programmes que le pays entend mettre en oeuvre sur le plan macroéconomique, structurel, sectoriel et social afin de promouvoir la croissance et de réduire la pauvreté, au cours de la période 2007-2011.
Les activités majeures du projet sont le traitement phytosanitaire de 2.000 hectares passées à 4.000 hectares de vergers à fort potentiel de variétés de mangues exportables, la sensibilisation des producteurs et exportateurs sur les bonnes pratiques agricoles, la mise en place d’un fonds visant à faciliter l’accès des exportateurs au crédit, l’accompagnement à la certification EUREPGAP des exportateurs.
C’est ainsi qu’en 2006, plus de 2000 hectares de vergers ont été traités, selon les normes admises, à Bamako, Bougouni, Yanfolila et Sikasso, lieux de grande production de mangues. Ce qui lève une des contraintes majeures à l’exportation, à savoir la qualité finale des fruits, eu égard aux exigences commerciales, réglementaires et sanitaires des consommateurs européens. Ces mangues bénéficieront à travers le projet de la certification EUREPGAP , un référentiel de qualité et de l’application concrète de la traçabilité, une exigence de l’Union Européenne. De plus, les acteurs de la filière bénéficient de l’accompagnement du projet, en synergie avec le Programme Africain relatif aux Stocks de Pesticides obsolètes (PASP), d’une campagne de sensibilisation et de dissémination de l’information en matière de sécurité sur l’utilisation et le stockage des produits phytosanitaires. Le PASP est une initiative internationale et inter-agences qui a comme fonction majeure le nettoyage et la destruction des pesticides périmés.
Un traitement qui porte fruit
Le projet a permis d’augmenter d’une année à l’autre les exportations de mangues de près de 51 % : 2927 tonnes en 2005 à 4521 tonnes en 2006, ce qui représente une manne de 6 milliards de F CFA (environ 12.360.736 $ US) pour l’économie nationale. Les revenus des producteurs ont en même temps augmenté: les mangues issues des vergers traités ont obtenu une prime moyenne de 25.000 à 35.000 F CFA par tonne, par rapport aux vergers non traités. Le prix d’achat moyen au producteur ces dernières années se situe entre 65.000 et 100.000 F CFA la tonne. Ce qui, à l’échelle du Mali est fort appréciable. Cette disponibilité de ressources financières entre les mains des producteurs permet de justifier la pertinence du projet dans le cadre de la réduction de la pauvreté.
« Aujourd’hui il existe un engouement total autour du projet », déclare Mohamed Sidibé, Coordonnateur du projet. Pour lui l’expérience malienne mérite d’être étendue à la sous-région dans la mesure où la mouche des fruits y est endémique. M. Sidibé estime que la systématisation du traitement phytosanitaire est le seul moyen de garantir la qualité des mangues Maliennes, face à des concurrents sous-régionaux (Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée et Sénégal) et latino-américains. L’idéal serait de mettre en oeuvre un programme sous régional qui couvrira tous ces pays, la mouche ne connaissant pas de frontière.
Le traitement se fait avec l’assistance de l’Office de la protection des végétaux du Mali, ce qui favorise le choix des produits tolérés et leur utilisation selon les règles admises. Celui de juin devrait permettre de prolonger la saison des mangues jusqu’à la fin du mois de juillet, allongeant ainsi la disponibilité de mangues saines sur le marché, contrairement aux concurrents ivoiriens qui ont dû arrêter prématurément les exportations à cause des mouches de fruits.
Pour Issa Bagayoko, Directeur d’IB Négoce, une société malienne spécialisée dans la production et l’exportation de fruits et légumes, « il est important de profession-
naliser les acteurs de la filière mangue en les mettant au même niveau d’information et en les formant ». IB Négoce encadre 450 petits producteurs de Kati et Sélingué, dont 70 certifiés EUREPGAP et collabore avec une vingtaine de femmes « pisteurs », intermédiaires.
La dynamique d’exportation des mangues maintenant amorcée doit être maintenue par un appui à la participation des exportateurs aux manifestations commerciales internationales, la recherche de débouchés et le développement de nouveaux créneaux comme le séchage des mangues avec une forte implication des femmes rurales.
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