Par Akinwumi Adesina, président du Groupe de la Banque africaine de développement
L’Afrique a besoin d’un nouveau pacte pour l’énergie, il en existe un désormais. Le New Deal mis en place dans les années 1930 par le président américain Roosevelt suite à la Grande Dépression était axé sur ces trois mots : « Secours, redressement et réforme ». Concernant le Nouveau Pacte pour l’énergie en Afrique, sous les projecteurs au Forum économique mondial de Davos cette semaine, l’accent est mis sur l’électricité, le potentiel et le partenariat.
« Électricité » parce que le Nouveau Pacte vise à doter le continent africain de l’électricité d’ici 2025. L’énergie est la pierre angulaire de toute société. Elle est le passeport vers la transformation économique et l’un des piliers des services d’éducation et de santé. Pourtant, en ce début de 2016, plus de 645 millions d’Africains (soit environ les deux tiers de la population du continent) n’ont pas accès à l’électricité.
Les Africains sont fatigués d’être dans le noir : les enfants souffrent, parce que 90 % des écoles primaires du continent n’ont pas l’électricité. Les femmes souffrent également : plus de 600 000 personnes, en majorité des femmes, meurent chaque année parce qu’elles font la cuisine avec de l’énergie sale, comme le bois ou la terre cuite. Les hôpitaux et leurs patients souffrent des dysfonctionnements des équipements qui s’y trouvent. Les petites et même les grandes entreprises souffrent : l’Afrique perd environ 4 % de son PIB annuel en raison du manque d’énergie. L’indisponibilité de l’énergie en Afrique est inacceptable, de même que son coût. Une femme vivant dans un village au nord du Nigeria dépense environ 60 à 80 fois plus par unité d’énergie qu’un habitant de New York ou de Londres.
« Potentiel » parce que l’Afrique a du mal à exploiter tout son potentiel économique et à transformer une croissance économique forte mais inégale en transformation économique bien ancrée et bénéficiant à tous. L’énergie est la clé de cette transformation. Avec un approvisionnement énergétique solide et sûr, nous pourrons libérer les compétences d’une population jeune et dynamique. Nous pourrons poursuivre le processus d’industrialisation de l’agriculture, et passer d’une diversification partielle à une industrialisation à grande échelle. Les matières premières qui nous fourniront de l’énergie sont encore inutilisées ou inexploitées. En plus de 300 gigawatts d’énergie potentielle provenant du charbon et de 400 gigawatts qu’il est possible de tirer du gaz, le continent attend de mettre la main sur 10 térawatts d’énergie solaire potentielle, 350 gigawatts d’hydroélectricité, 110 gigawatts d’énergie éolienne ainsi que sur 15 gigawatts d’énergie géothermique.
« Partenariat », parce qu’aucun pays, aucune organisation, ni aucune initiative ne peut y parvenir seul. Africa Progress Panel (APP) a déjà mené des études démontrant que l’Afrique peut produire sa propre électricité, si elle collabore avec ses partenaires. Plusieurs acteurs clés interviennent déjà dans ce domaine, comme l’Initiative africaine pour les énergies renouvelables soutenue par le G7, l’Initiative de l’ONU « Énergie durable pour tous » (SE4ALL) et le Programme américain « Énergie pour l’Afrique ». Le secteur privé constitue une source de leadership et de financement, par exemple à travers le Groupe des leaders africains dans l’énergie. Mais la tâche consiste à faire avancer tout le monde dans la même direction. Le Nouveau Pacte est donc une initiative africaine visant à mobiliser la volonté politique et un soutien financier pour résoudre les défis énergétiques de l’Afrique...
Lire la suite de l'article de la BAD (764 hits)