Le Comité pour la protection du parc de la Gatineau (CPPG) est d'avis
que le projet de loi d'initiative parlementaire déposé le 8 novembre par la
députée néo-démocrate Nycole Turmel comporte de graves lacunes et qu'il doit
être modifié.
" La mesure de madame Turmel est une capitulation
devant les intérêts privés et les gouvernements locaux, et elle minera la
capacité d'agir de la Commission de la capitale nationale (CCN), tout en
encourageant la construction immobilière dans parc de la Gatineau ", a déclaré
le secrétaire du CPPG Jean-Paul Murray.
Tous les plans directeurs du parc de la Gatineau ont précisé
que les propriétés privées posent de sérieux problèmes de gestion, soulignant
qu'elles doivent éventuellement être acquises. Par ailleurs, le gouvernement
fédéral a incorporé les terres privées du parc dans la Masse des terrains d'intérêt
national en 1988, donnant à la CCN la directive de les acquérir sur une base graduelle.
Toutefois, la mesure de madame Turmel stipule que la CCN " ne peut porter
atteinte aux droits de propriété privée des résidents du parc ".
" Or, ce projet de loi donne carte blanche aux
propriétaires fonciers, qui pourront dorénavant subdiviser et exploiter leurs
terrains comme bon leur semble, puisque la mesure de madame Turmel enchâsse
leur droit de le faire ", de dire M. Murray. " D'ailleurs, cet
article va à l'encontre de la disposition de son projet de loi qui donnerait à la
CCN la mission d'acquérir les terres privées du parc - l'acquisition des terrains
privés et l'encouragement de la spéculation foncière sont des objectifs contradictoires ",
a-t'il ajouté.
Le parc de la Gatineau comprend nombre de grandes
propriétés qui pourraient faire l'objet d'énormes projets immobiliers, y
compris des centaines d'acres le long du chemin Kingsmere et dans la vallée du
ruisseau Meech. En outre, plusieurs terrains autour des lacs Meech et Kingsmere
pourraient accueillir de nouveaux projets domiciliaires, si la mesure de madame
Turmel est adoptée sans modifications. Depuis 1992, 125 nouvelles maisons ont
été construites dans le parc.
La mesure déposée aujourd'hui est également en conflit
avec l'article 14 de la Loi sur la capitale nationale, qui stipule que la CCN
peut recourir à l'expropriation de terrains privés lorsque cela est nécessaire
aux fins de son mandat. " Comment la CCN pourrait-elle stopper la
construction de 100 nouvelles maisons dans le parc, si elle "ne peut porter
atteinte aux droits de propriété privée", comme le prévoit le projet de loi de
Mme Turmel ? " de dire M. Murray.
"De plus, ce projet de loi entrave le mandat national
de la CCN en exigeant que celle-ci coopère avec les autorités locales ", a déclaré M.
Murray. " C'est totalement inacceptable, puisque cela permettra aux
gouvernements municipaux de miner le parc, par exemple, en émettant plus de permis
de construction, en empêchant la CCN de fermer des routes comme Gamelin ou de mettre
un terme à des activités comme la motoneige dans le parc", de dire M. Murray. "
Cela transfère effectivement aux autorités locales la gestion du parc de la
Gatineau ", a-t-il ajouté.
Par ailleurs, ce projet de loi ne comprend aucun
mécanisme de consultation publique, il passe complètement sous silence la
question de l'intégrité territoriale du Québec, et il ne fait pas de la
conservation la première priorité de gestion du Parc, comme l'exigent les
écologistes et comme le prévoit la Loi sur les parcs nationaux.
Nous soulignons que le projet de loi de Mme Turmel satisfait
plusieurs des critères essentiels à la protection du parc : il accorde au Parlement
le dernier mot sur tout changement à ses limites; il consacre le parc aux générations
futures; et il lui donne un mandat exigeant la conservation des écosystèmes.
Néanmoins, et malheureusement, son enchâssement de droits de propriété privé
mine l'évolution du parc de la Gatineau en tant qu'aire de conservation voué à
l'agrément du public.
Le CPPG est d'avis que l'article consacrant les droits
de propriété privée dans le parc de la Gatineau doit être modifié comme suit: "
La Commission de la capitale nationale ne peut porter atteinte aux droits de
propriété privée des résidents du parc de la Gatineau, à moins que ces droits n'entrent
en conflit avec le plan directeur du parc ou la Loi sur la capitale nationale ".
Par ailleurs, nous demandons que l'article obligeant la CCN à coopérer avec les
autorités locales soit supprimé ou modifié afin de permettre à l'agence d'avoir
le dernier mot sur la gestion du parc.
Le CPPG est le groupe qui a convaincu les
parlementaires du Sénat et de la Chambre des communes de déposer des mesures
législatives pour protéger le parc de la Gatineau. Il a également conçu tous les
projets de loi d'initiative parlementaire préalablement déposés sur le sujet.