Comment révéler mais aussi rendre compte de certains aspects du travail qui sont ignorés par les acteurs, soit parce qu’ils n’en ont pas conscience, soit parce que la mémoire les efface ou leur donne une signification qui les rend naturels et donc non dicibles ? Et pourtant le travail de terrain, l’observation, l’entretien, l’enquête ethnographique le plus souvent, permettent non seulement de révéler des faits, des comportements, des relations mais aussi de se rendre compte qu’elles sont porteuses de difficultés pour les acteurs et parfois de mal-être. La notion de mal-être a été choisie pour rendre compte de ces problèmes qui apparaissent parfois naturalisés, parfois minimisés et considérés comme normaux y compris par ceux ou celles qui ont à en subir les conséquences. Le travail effectué par les chercheurs est aussi d’expliciter les différences que crée l’existence d’un rapport social de sexe, rapport social qui interfère sur les places attribuées, sur les comportements et les représentations des acteurs.
C’est dans le travail, mais aussi dans l’articulation du travail et du hors travail que se tapissent des sources de mal-être dont certaines sont ignorées des grandes enquêtes. Cet ouvrage, construit autour des résultats des enquêtes de terrain, révèle une part de l’invisible : invisibilité quant aux contraintes qui pèsent pour orienter le choix des places et des rôles, notamment des femmes dans les mondes masculins, invisibilité des impositions de sens et d’orientation des conduites.
Si les dimensions factuelles sont importantes pour analyser les conditions de travail, ce livre interroge aussi les dimensions idéelles qui sous tendent les relations entre acteurs. C’est ainsi que l’on peut débusquer ce qui atteint : des formes de vêture à respecter dans le monde des experts, des manières de se comporter et de faire face à des émotions tant dans la police que dans le soin.
Régine Bercot (coord.), Le genre du mal-être au travail, Ed. Octares, 218 p., 20 euros. ISBN : 9782366300383
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