L’Instance permanente sur les questions autochtones a entamé, la deuxième semaine des travaux de sa seizième session en examinant la situation des défenseurs des droits de l’homme des peuples autochtones, l’occasion, tant pour les experts que pour les délégations, d’appeler au renforcement de leur protection en raison de la pénalisation et du harcèlement dont ils sont victimes dans de nombreux pays.
Président du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, M. Albert Barome, a indiqué, étude à l’appui, que sur les 282 membres des communautés autochtones assassinés cette année, la moitié avait été tuée pour avoir défendu le respect des droits fonciers, aux ressources et à l’autodétermination. De son côté, la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, Mme Victoria Tauli-Corpuz, a signalé qu’en 2015, sur les 185 meurtres des défenseurs de la terre et de l’environnement enregistrés, 40% étaient des membres des communautés autochtones.
La Rapporteuse spéciale s’est aussi alarmée du fait que, dans de nombreux pays, la pénalisation et le harcèlement des défenseurs et des organisations des peuples autochtones soit d’une telle ampleur qu’ils sont obligés de passer le plus clair de leur temps à se défendre devant les tribunaux au lieu de renforcer leurs mouvements.
Mme Tauli-Corpuz s’est notamment attardée sur la situation à Standing Rock, dans le Dakota du Nord, où elle s’est rendue en début d’année, s’inquiétant notamment de la pénalisation des autochtones qui exerçaient leur droit de manifester leur opposition à la construction d’un pipeline.
Soulignant la nature pacifique des manifestations, elle a dénoncé la réponse militarisée et parfois violente de la part de la police locale et des forces de sécurité privées. Elle a appelé les États-Unis à veiller à la bonne prise en compte, par toutes les parties concernées, des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, dans le contexte de tout projet susceptible d’avoir un impact sur les peuples autochtones.
À une époque de « capitalisme féroce, qui empiète sur les droits des peuples autochtones dans le monde », une des membres de l’Instance, Mme Terri Henry, a suggéré de son côté aux entreprises de se doter de politiques de responsabilité sociale. D’autres délégations ont aussi appelé le secteur privé, et notamment les industries extractives, à respecter le principe de consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones.
Les représentants de plusieurs organisations autochtones ont par ailleurs engagés les États, en Asie notamment, à mettre un terme à la militarisation des territoires autochtones.
À l’instar de plusieurs délégations, le Président du Mécanisme d’experts s’est par ailleurs préoccupé de la situation des défenseuses des peuples autochtones qui travaillent souvent dans des contextes difficiles.
Face à cette situation, la représentante de l’Asia Indigenous Peoples Pact a recommandé une étude sur les risques de représailles élevés qu’encourent les défenseurs des droits des autochtones, engageant par ailleurs le système des Nations Unies à octroyer des ressources supplémentaires pour financer l’aide juridique.
En la matière, la Présidente du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, Mme Mirna Cunningham, a signalé que depuis son lancement, le Fonds a aidé plus de 2 000 défenseurs des droits de l’homme des peuples autochtones à participer à des processus onusiens, tels que l’Instance permanente.
La déléguée de l’Union européenne a de son côté signalé qu’à l’heure actuelle, 150 défenseurs des droits de l’homme des peuples autochtones bénéficient des subventions de l’Union qui, a-t-elle précisé, leur servent souvent à obtenir une aide juridique ou à contrôler le déroulement des procès et les conditions d’incarcération.
À noter par ailleurs que, dans son intervention, la Rapporteuse spéciale s’est aussi inquiétée de la situation en Australie où le taux d’incarcération des autochtones, ainsi que le nombre d’enfants autochtones retirés à leurs familles, est en nette augmentation. Elle a notamment indiqué que les aborigènes et les insulaires du détroit de Torres, qui constituent seulement 3% de la population nationale, représentent 27% de la population carcérale nationale. Elle a également rapporté avoir visité, durant une récente mission, un centre de détention juvénile où les autochtones représentent 95% des jeunes détenus, certains âgés de seulement 12 ans.
(9e séance) Instance permanente sur les questions autochtones
(10e séance) Instance permanente sur les questions autochtones
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