Lundi 15 août, et jusqu’à début septembre, une équipe internationale d’une dizaine de glaciologues et ingénieurs %u2010 français, italiens, russe et américains - coordonnée par Patrick Ginot, ingénieur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) au sein du Laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement (LGGE) de l’Université Grenoble Alpes et du CNRS et Jérôme Chappellaz, directeur de recherche CNRS dans ce même laboratoire, se rendra au col du Dôme (4 300m, massif du Mont-Blanc) pour prélever les premières « carottes-patrimoine ». L’objectif est de constituer la première bibliothèque mondiale d’archives glaciaires issues de glaciers menacés par le réchauffement climatique. Trois carottes de glace, de 130 mètres chacune, seront extraites, pui descendues par hélicoptère dans la vallée. Elles seront ensuite transportées à Grenoble au LGGE, tout en maintenant une chaîne du froid rigoureuse. L’une d’entre elles sera analysée en 2019 pour constituer une base de données disponible pour l’ensemble de la communauté scientifique mondiale. Les deux autres seront acheminées par bateau puis par véhicules à chenilles sur les hauts plateaux de l'Antarctique, en 2020, pour être stockées à la base Concordia, gérée par l’Institut polaire français Paul%u2010Emile Victor (IPEV) et son partenaire italien le Programme national de Recherche Antarctique (PNRA). À terme, ce sont des dizaines de carottes de glace patrimoine qui devraient être stockées dans une cave, creusée sous la neige, par -54°C, le congélateur le plus sûr -et naturel - au monde.
L’idée de créer ce projet s’est imposée quand les scientifiques ont observé la hausse des températures de plusieurs glaciers. À 10 ans d’intervalle, la température à proximité des glaciers du col du Dôme et de l’Illimani dans les Andes s’est élevée de 1,5 à 2°. Au rythme actuel, on projette que leur surface rencontrera des épisodes systématiques de fonte durant l’été d’ici quelques années à décennies. Avec cette fonte, et par la percolation de l’eau de fonte au travers des couches de neige sous%u2010jacentes, ce sont des pages uniques de l’histoire de notre environnement qui disparaîtront à tout jamais. « Nous sommes la seule communauté de scientifiques travaillant sur les climats à voir disparaître une partie de ses archives. Il était devenu urgent de constituer ce patrimoine pour le futur, à l’instar du patrimoine mondial de semences conservé au Spitzberg », explique Jérôme Chappellaz, l’’initiateur français du projet. Apport indispensable à la science environnementale et climatique, cruciale pour mieux anticiper notre avenir, la science des glaces n’aura en effet bientôt plus de matière première de qualité en provenance des régions de montagne en raison du réchauffement climatique.
Communiqué du CNRS (704 hits)