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Le tilapia, un poisson modèle pour la recherche et le séquençage du génome


Le projet de séquençage du génome du tilapia soumis par dix organismes internationaux de recherche * (dont le Cirad), représentant le Cichlid Genome Consortium (plus de 100 laboratoires de 25 pays) et accepté en 2006 par le NIH (National Institutes of Health, Etats-Unis) vient de démarrer au Washington University Genome Sequencing Center. Le projet permettra à terme une aquaculture raisonnée garantissant sécurité sanitaire et alimentaire.


Le tilapia, poisson originaire des pays du Sud, a été introduit dans plus de cent pays et représente à lui seul la seconde production aquacole mondiale après les carpes (à 99% produites et consommées en Chine). Son élevage est facile et peu onéreux, il s’adapte bien à l’eau douce ou salée et grossit vite. Contrairement à la plupart des espèces carnassières d’aquaculture (saumons, truites, bars, dorades) pour lesquelles farine et huile de poisson restent des composantes indispensables de leur alimentation, le tilapia figure en bas de la chaîne trophique ou chaîne alimentaire, en se nourrissant d’algues, plancton ou petits animaux. En condition d’élevage extensif ou semi intensif, le tilapia est essentiellement alimenté à partir de déchets végétaux (riz, coton etc.).Le tilapia, dont la forte production s’élève à plus de 2 million de tonnes par an, contribue ainsi au développement durable en ne ponctionnant pas les ressources marines. C’est l’un des arguments avancés pour les recherches sur le séquençage complet de son génome. Il est par ailleurs l’une des deux espèces d’intérêt aquacole la plus étudiée en laboratoire.

Le déterminisme du sexe au service de l’aquaculture

Ce poisson modèle appartient à l’ordre des perciformes qui regroupe beaucoup d’espèces françaises et européennes comme le bar, la dorade, le pagre. Or, ces poissons ont une maturité sexuelle tardive qui ne facilite pas leur étude génétique. De par son court intervalle de génération, le tilapia peut servir de modèle d’étude à l’amélioration des perciformes. C’est aussi le principal groupe utilisé pour l’étude des phénomènes de spéciation (naissance d’une nouvelle espèce).

Parmi les dix laboratoires porteurs du projet de séquençage du génome du tilapia, le Cirad et l’Université d’aquaculture de Stirling (Grande Bretagne) s’intéressent plus particulièrement aux retombées aquacoles du projet et rechercheront les gènes liés à des caractères d’intérêt comme la croissance, la rusticité, le sex-ratio (proportion de mâles et femelles) etc.

Les éleveurs de tilapias en appellent à la recherche pour une production sélective de tilapias mâles qui grossissent beaucoup plus vite que les femelles. L’Unité propre de recherche (Upr) Aquaculture et gestion des ressources aquatiques du Cirad développe des programmes de recherche pour mettre en place une alternative propre sans hormones, pour la production de population mono sexe mâle. Compte tenu du danger des hormones pour l’alimentation, la santé humaine et la préservation de la biodiversité, les pistes de la génétique et de l’utilisation des conditions d’élevage semblent être les solutions.

« La température élevée de l’eau pouvant influencer le sexe des alevins, nous procédons à la sélection génétique des parents qui donnent une descendance sensible à ce caractère héritable » explique Jean-François Baroiller, chercheur à l’Upr Aquaculture et gestion des ressources aquatiques. L’utilisation de marqueurs génétiques de cette sensibilité thermique permet d’optimiser une telle sélection mais aussi de rechercher des individus d’intérêt dans la diversité naturelle des tilapias. Une approche similaire est mise en place pour répondre à la demande de nombreux pays producteurs de tilapias résistants à de fortes variations de la salinité de l’eau.

L’arrivée attendue des premières séquences viendra compléter les nombreuses ressources génomiques spécifiques du tilapia déjà développées par le Cirad. En collaboration avec des organismes de recherche internationaux, trois thésards de l’Upr Aquaculture et gestion des ressources aquatiques sont impliqués à plein temps sur ces problématiques. Les retombées de ce projet de séquençage s’annoncent d’ores et déjà considérables pour la communauté scientifique mais aussi pour l’aquaculture mondiale.


* Cirad (France)

University of Maryland (Etats-Unis)

Stanford University (Etats-Unis)

Rutgers University (Etats-Unis)

Harvard University (Etats-Unis)

University of Konstanz (Allemagne)

Tokyo Institute of Technology (Japon)

University of Stirling (Ecosse)

University of Bern (Suisse)

Georgia Institute of Technology (Etats-Unis)



Contact scientifique : Jean-François Baroiller, jean-francois.baroiller at cirad.fr

Contact presse : Florence Vigier, florence.vigier at cirad.fr
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