Par Anne-Ryslène Zaoual, Associate professor, Université d'Artois & Xavier Lecocq, Professeur de management stratégique, Université de Lille
Depuis le 1er août 2018, l’humanité est entrée en situation de dette écologique. Chaque année, le « jour du dépassement », marquant la date théorique à laquelle les ressources naturelles de la planète produites annuellement sont consommées, survient de plus en plus tôt. Parmi les solutions plébiscitées pour réduire notre empreinte écologique, l’économie circulaire fait des émules.
Dénonçant le fonctionnement linéaire de notre système économique, cette approche s’inspire des écosystèmes naturels pour proposer de nouvelles manières, plus vertueuses, de produire et de consommer.
À partir du principe selon lequel les déchets des uns peuvent devenir les ressources des autres, les entreprises sont invitées à réorganiser leurs flux en boucles fermées.
Engager les entreprises dans une coopération créatrice de valeur autour des déchets implique cependant des changements cognitifs (de nouvelles façons de penser), puis organisationnels (de nouvelles manières de structurer les procédés industriels et la gestion des déchets).
Une pensée plus écosystémique
Regarder les entreprises voisines comme des partenaires potentiels avec lesquelles échanger des déchets n’est pas courant. L’économie circulaire implique pourtant une relocalisation des flux, avec la mise en place d’échanges matériels et énergétiques sur les territoires.
Ces coopérations reposent sur une approche écosystémique où la priorité est donnée à la recherche d’opportunités de symbioses. Ces dernières correspondent à des coopérations environnementales par lesquelles les entreprises partagent ou échangent des déchets pour réduire leur impact écologique entre les acteurs. L’économie circulaire se pense donc surtout à un niveau inter-organisationnel ; la confiance joue ici un rôle prépondérant dans sa mise en œuvre.
Le manque de communication entre les entreprises sur leurs résidus et la culture du secret industriel compliquent cependant l’identification de ces opportunités de coopération.
Dans ce contexte, des structures comme les associations ou les clubs d’entreprises peuvent être utiles, comme nous l’avons souligné dans une étude parue en 2018 et portant sur la mise en œuvre de projets d’économie circulaire en France et à l’étranger (Canada, Danemark).
Nos travaux portent plus particulièrement sur l’association dunkerquoise Écopal, le Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTÉI) québécois ou encore le Symbiosis Center Danemark. Ces structures agissent comme plateformes d’intermédiation et permettent aux acteurs du territoire de se rencontrer et de développer des stratégies collectives.
Avec leur vue d’ensemble, ces structures sont intéressantes pour chercher et activer les opportunités de coopération en connectant les entreprises en fonction des flux disponibles. « Ce dont les entreprises ont le plus besoin, c’est la mise en relation », souligne ainsi Pauline Nackaerts, ancienne animatrice environnement d’Écopal. En centralisant l’information, en pilotant les actions collectives et en absorbant une partie des coûts liés à la recherche et à la négociation des partenariats, Écopal est ainsi devenu, depuis une quinzaine d’années, un levier stratégique dans l’écosystème dunkerquois...
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.
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