Un consortium de chercheurs espagnols, italiens et français, de l’Inra, montre que la vulnérabilité à la sécheresse du Pin maritime peut être prédite grâce à l'information génétique portée par certains de ses gènes. Publiés dans la revue Genetics, ces résultats devraient améliorer les modèles de prédiction de l'aire potentielle de distribution de cette espèce en fonction de l'évolution du climat. Ainsi, les gestionnaires forestiers pourraient anticiper les effets du changement climatique par le choix d’arbres adaptés et identifier les zones les plus propices à la culture de l’espèce.
Planté sur 4 millions d’hectares, le Pin maritime est une essence forestière d'importance majeure pour le Sud-Ouest de l'Europe. En Aquitaine, il fait l'objet d'une sylviculture intensive par une filière forêt-bois très dynamique. Cependant, le Pin maritime pourrait être menacé par le changement climatique qui affectera les températures et le régime des précipitations durant sa période de croissance et donc sa productivité.
Pour prédire les futures aires de répartition des essences forestières à partir des aires actuelles et de l'évolution du climat, les chercheurs font appel à la modélisation. La plupart des modèles actuels ne prennent pas en compte les deux facteurs majeurs qui influencent le devenir des populations d’arbres : leur composition génétique et leur évolution. Or, ces effets génétiques pourraient changer radicalement les prédictions. Le but de cette étude a été de les quantifier pour les incorporer ultérieurement dans les modèles.
Les différences génétiques entre populations de Pins impliquent que leurs réponses physiologiques seront différentes lors d'une sécheresse chronique ou d'un évènement extrême (ex. : canicule de 2003). L'évolution des populations d'arbres influence la prévalence de ces différences génétiques. Ainsi, les arbres qui possèdent des mutations favorables pour faire face à des épisodes de sécheresse deviendront plus courants au fur et à mesure du changement climatique et la fréquence de ces mutations devrait donc s'accroître.
Pour détecter des mutations qui affectent la survie du Pin maritime dans différentes conditions climatiques, les chercheurs ont tout d'abord sélectionné parmi des milliers de polymorphismes de l'ADN, 300 mutations nucléotidiques (appelées SNPs pour single nucleotide polymorphisms) localisées dans 220 gènes potentiellement impliqués dans des mécanismes moléculaires affectant notamment la réponse des plantes au déficit d'alimentation en eau. Ils ont ensuite étudié la covariation entre le climat d'origine de 36 populations de Pin maritime récoltées en Tunisie, au Maroc, au Portugal, en Espagne et en France et la fréquence de ces SNPs estimée par le génotypage des descendants de ces arbres. Ils ont retenu 18 mutations dont la fréquence présentait une corrélation significative avec le climat d'origine des populations. Ils ont ensuite testé si ces mutations présentaient un avantage adaptatif. Pour ce faire, ils ont planté 19 de ces populations dans le Nord-Est de l'Espagne dans un site à climat beaucoup plus sec que celui des Landes de Gascogne, et mesuré leur survie cinq ans plus tard. Le regroupement des différentes populations sur ce site a permis de comparer leur potentiel génétique dans un environnement identique. Cinq ans après, les arbres portant les mutations avantageuses face au climat du site d'installation présentaient le taux de survie le plus élevé. Et plus la fréquence des mutations avantageuses s'éloignait de l'optimum local, plus la survie des arbres était affectée.
Ces résultats démontrent que le climat a façonné la diversité génétique du Pin maritime et qu'il est désormais possible de prédire la valeur adaptative des arbres dans un environnement climatique donné grâce à cette information génétique.
Les chercheurs étudient maintenant la variabilité de 10 000 mutations localisées dans des milliers de gènes en utilisant la même collection d'arbres plantée dans cinq sites répartis sur trois pays (Espagne, France et Portugal). Pour mieux comprendre le fonctionnement du Pin maritime face à la sécheresse, ils étendent la palette des caractères adaptatifs dont ils étudient le lien avec ces mutations, en considérant la phénologie du débourrement, les performances de croissance et des traits de réponse à un déficit d'alimentation en eau.
Source : INRA
Communiqué de l'INRA
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