Depuis la fin de la crise postélectorale marquée par la capture de l'ex-président Laurent
Gbagbo, la quasi-totalité des ivoiriens ont emprunté le chemin de la réconciliation et de la
reconstruction. Les populations sur la nouvelle voie choisie, étaient impatientes de connaitre
les animateurs des principaux départements ministériels. L'ensemble des ivoiriens attendaient
l'équipe de choc du tout président Alassane Ouattara pour son premier vrai gouvernement. Ce
nouveau gouvernement annoncé pour l'après investiture n'a laissé que peu de temps aux
spéculations. En effet prévu pour la mi-juin, c'est finalement ce mercredi 1er juin que le
secrétaire général de la présidence a rendu publique la liste des membres du Gouvernement du
1er Ministre Guillaume SORO. Ce gouvernement soulève plusieurs inquiétudes, notamment
celle de la participation des femmes.
Des visages connus, reconnus, inconnus et méconnus.
Sans grande surprise, ce gouvernement élargi à 36 membres présente certains visages connus
du grand public ivoiriens et d'autres inconnus ou méconnus des habitants. Il y'a également
ceux qui pour la plupart qui conservent leur poste et ceux qui ont tout simplement changé de
poste. On assiste au retour d'anciennes personnalités, en effet on reconnait des noms et
visages. Cependant, entre ministères d'Etat et postes clés du gouvernement, un genre ministre
se faire rare, ou presqu'absent ; la gente féminine.
Les femmes peuvent toujours rêver !
Les gouvernements se succèdent et les elles restent presqu'invisibles. On est loin, bien loin
même des 30% de représentativité féminine prôné dans la plupart des accords et textes
internationaux et autres conventions ratifiés la Côte d'ivoire. C'est bien triste pour les
femmes, qui quelque soit ce qu'elles sacrifient ne sont toujours pas récompenser à la juste
hauteur de leurs efforts. Nul ne peut douter du rôle déterminant des femmes de la Côte
d'ivoire dans la prise du pouvoir par Alassane Ouattara ; on se souvient justement de ces
désormais célèbres huit femmes tuées à Abobo en mars 2011 qui ne réclamait seulement que
le verdict des urnes des élections du 28 Novembre 2010.
Avec seulement 5 femmes sur 36 Ministres, soit 13,88% du point de vue de présence féminine
dans ce nouveau gouvernement chargé de réconcilier et de reconstruire la Côte d'ivoire, les
femmes peuvent toujours rêver, car c'est la seule chose qu'on ne peut pas leur promettre.
Jusqu'à quand atteindre 30% de représentativité féminines dans les instances de grandes
décisions demeurera un rêve pieux pour les femmes ? En tout cas c'est ce message que
semble leur transmettre les politiciens ivoiriens sans distinction.
Mixité n'est pas parité et parité n'est pas le genre.
Il ne suffit pas de confier des postes à des femmes dans un gouvernement pour que l'on parle
de prise en compte du genre. A la lecture de la composition du gouvernement, aucune femme
à un poste clé, on note également l'absence de femme ministre d'Etat comme pour dire que
les femmes ne peuvent pas encore exercer certaines fonctions, même dans gouvernement
formé par un ancien dirigeant du FMI. Si les femmes sont dans le gouvernement c'est sans
doute pour répondre au slogan de la promotion du genre au regard des départements qui leur
sont confiées. On observe toujours des fonctions stéréotypées des femmes à l'éducation
nationale, à la promotion de la femme, quoi de plus noble, ou encore à la santé et la salubrité
publique. En bref, Les femmes en savent que faire cela. Par un exemple à l'Education
nationale si la ministre échoue, on la jugera trop juste dans un monde d'hommes, à contrario
si elle s'en sort l'on saluera le choix judicieux du président de la république.
Et les femmes que font-elles ?
Les femmes veulent -elles vraiment leur émancipation ? C'est une interrogation qui ne nous
parait pas absurde. A la lumière des multiples actions menées par les femmes pour sortie la
Côte d'ivoire de la crise, il est presque impossible de comprendre leur insensibilité face à de
tels agissements. Les femmes sont des actrices à part entière dans la consolidation de la
démocratie et du développement d'un pays, cependant leur confier plus responsabilité reste
une question brulante. Aussi brulante que celle de la solidarité féminine qui parfois laisse sa
place à un enthousiasme individuel des femmes. Pour marquer leur mécontentement les
femmes nommées pourraient, au nom de cette solidarité féminine, refuser de siéger au
gouvernement. Ce serait vraisemblablement un grand pas vers leur autonomisation. En créant
ainsi cette première rupture, les femmes de Côte d'ivoire pourront véritablement montrer leur
importance dans le schéma politique ivoirien.
Un gouvernement d'union déjà fragile.
Il revient aux femmes de dénoncer la fragilité de ce gouvernement qui non seulement ne
prend pas en compte les prescriptions de la société civile, à savoir une équipe de 25 membres,
mais qui ressemble beaucoup plus à groupe élargi de récipiendaires après service rendu. On
n'a pas vraiment misé sur la technocratie et la compétence comme annoncé. En tout état de
cause, ce premier gouvernement Ouattara, ne reflète d'aucune façon toute les promesses
faites lors de la campagne présidentielle et autres discours solennels. Ce gouvernement de
large ouverture en nombre n'est qu'un écran de fumé qui cache la prochaine crise sociale en
Côte d'ivoire. En attendant mieux regardons le gouvernement au travail !
Article écrit par Armand KOUAKOU Kan, Economiste, Chargé de la Prospective et de la Planification
Stratégique, à l'APROGED (Association Pour la Promotion du Genre et du Développement),
Responsable de Millennia2015 Côte d'Ivoire